WILLIE BUCK & BOB CORRITORE – Oh Yeah!

South West Musical Art Foundation / Vizztone - CDSWMAF 29
Chicago Blues
WILLIE BUCK & BOB CORRITORE - Oh Yeah !

On ne présente plus dans ces colonnes l’harmoniciste émérite Bob Corritore (multi-chroniqué ICI, ICIICIICIICIICIICIICIICIICIICI et ICI), mais il n’est peut-être pas inutile de le faire pour Willie Buck. Né le 26 novembre 1937 à Houston (bourgade du Missisippi, sans relation avec le cœur stratégique de l’industrie aérospatiale américaine, situé au Texas), et de son vrai nom William Robert Crawford, ce dernier s’est établi à Chicago en 1954. Bien qu’ayant frayé tout jeune parmi les clubs de la ville, où il côtoya la crème locale d’alors (de Muddy Waters à Little Walter, en passant par Buddy Guy & Junior Wells), Willie ne considéra longtemps la musique que comme un loisir (étant marié et en charge de famille, il exerçait en effet le métier de mécanicien automobile). En dépit d’un premier album en 1982 (alternativement connu sous les titres de “I Wanna Ve Loved” et “It’s Alright”, sur le label confidentiel Bar-Bare Records), il lui fallut attendre près de trois décennies pour connaître la faveur de récidiver. C’est d’autant plus regrettable que cette première livraison s’avérait des plus prometteuses, avec un casting regroupant alors Johnny “Big Moose” Walker, les frères Myers, John Primer et Little Mack Simmons. Delmark finit par le rééditer en 2010 sous le titre “The Life I Love” (augmenté de cinq bonus live)… En 2012, son “Cell Phone Man” (sur le même prestigieux label) rencontra enfin un certain succès, et Delmark publia l’an dernier un “Live at Buddy Guy’s Legends”, le présentant entouré des Delmark All-Stars (Billy Flynn et Thaddeus Krolicki aux guitares, Scott Dirks à l’harmonica, Johnny Iguana au piano, Melvin Smith à la basse, et le cruellement regretté Willie Hayes derrière les fûts). Buck et Corritore (lui-même natif de Chicago) sont amis depuis le plus jeune âge de ce dernier, quand Willie lui proposa de se joindre à son propre band. Fidèle en amitié (et l’inverse d’un ingrat), Bob n’a jamais manqué d’inviter Willie à se produire dans le club qu’il a ouvert à Phoenix (Arizona) à l’orée des eighties, le fameux Rhythm Room. Captées lors de trois sessions distinctes (de 2021 à 2023, à l’exception d’un titre datant de 2010), ces dix plages dévoilent un personnel n’ayant guère à envier à celui de son live de l’an dernier. Outre Bob, on y reconnaît en effet aux guitares rien moins que le légendaire Bob Margolin (band leader historique de Muddy Waters) sur six titres, Billy Flynn sur trois autres, Big Jon Atkinson et Mojo Mark Cilhar sur une plage chacun, et Jimi “Primetime” Smith (chroniqué ICI) sur pratiquement toutes. La section rythmique se compose de l’impérial Bob Stroger à la basse, et de l’impeccable Wes Starr aux baguettes (supplantés en 2010 par Troy Sandow et Brian Fahey, par ailleurs membre intermittent des Paladins, aux côtés de Dave Gonzalez et Thomas Yearsley). Ultimes cerises sur le cake, ce sont les excellents Antony Geraci et Ben Levin qui se répartissent les parties de piano. Constituée à 70% d’originaux signés Willie, la set list s’augmente de trois standards (dont le “Baby Please Don’t Go” de Big Joe Williams, erronément attribué ici à Muddy Waters, mais aussi le “She’s Alright” de ce dernier, ainsi que la plage titulaire, due à Bo Diddley). Vocaliste puissant (chez qui l’on reconnaît sans peine les influences prégnantes de Muddy Waters et de Junior Wells), Willie ravive sans effort les effets et sensations du Chicago blues classique des fifties et sixties, comme le démontre d’entrée de jeu la plage titulaire (où Corritore se glisse tout aussi aisément dans les mocassins des deux plus grands Walter à s’être distingués sur son instrument, tandis que Billy Flynn y ravive le souvenir de Sammy Lawhorn et Jimmy Rogers, et que le jeune prodige Ben Levin en fait autant avec Sunnyland Slim et Pinetop Perkins). Après un “She’s Alright” où s’illustre forcément Margolin, Willie émarge encore à la Société des Droits d’Auteurs avec un “That Ain’t Enough” qui eût néanmoins pu lui valoir quelques contestations, tant celui-ci s’inspire du “She’s Nineteen Years Old” de son modèle (dont les slide licks caractéristiques sont parfaitement restituées par un Margolin tout aussi imprégné de l’art du Maître). On pourra certes ergoter les mêmes reproches à “Money Can’t Buy Everything” (sensiblement démarqué de “I’m Ready”), tandis que “Brand New Cell Phone” adresse un clin d’œil appuyé à son propre hit de 2012, et que “Went Home This Morning”(capté en 2010) vaut pour sa part son pesant de Jimmy Reed (Corritore y réalisant une convaincante incarnation croisée de Lazy Lester et Slim Harmo). “She Turned Me Down” n’est qu’une nouvelle démarque du “Nine Below Zero” de Rice Miller, et ce ne sont ni la version présente de “Baby Please Don’t Go” (avec un Margolin forcément d’astreinte), ni “Me And My Baby”, ni le “Let Me Find Out Your Name” conclusif (déjà paru il y a deux ans sur “Somebody Put Back Luck On Me”, chroniqué ICI, avec un Corritore impérial au chromatique) qui démentiront l’empreinte manifeste de McKinley Morganfield sur ces sessions.
Comme me le déclara un jour le regretté Big George Jackson, “how do you modernize perfection, anyway?“… Amateurs de vintage Chicago Blues bon teint, a splendid time’s guaranteed for all!

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, June 22nd 2025

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