BOB CORRITORE & FRIENDS – You Shocked Me

Vizztone / SWMAF Records
Blues
BOB CORRITORE & FRIENDS - You Shocked Me

Depuis le temps que ce bon Bob Corritore nous abreuve du fruit de ses archives personnelles (rappelons aux plus récents de nos lecteurs que ce remarquable harmoniciste et infatigable activiste dirige depuis son Phoenix d’élection son propre club, le bien nommé Rhythm Room, tout en animant sa propre émission radio sur KJZZ FM), on pourrait se laisser tenter à ânonner: “another Bob Corritore Vaults anthology”… Sauf que la routine s’avère ici un cru d’exception, et qu’il faudrait être sacrément blasé (ou sourd) pour n’y point porter toute l’attention qu’il requiert. Captée en une douzaine de sessions réparties entre 2018 et 2022 dans les studios Tempest de Tempe, Arizona, cette collection de seize plages aligne quasiment un who’s who de la scène blues actuelle. Comptez les: d’Anthony Geraci à John Primer et de Johnny Rawls à Sugaray Rayford (en passant par Bob Margolin, Bob Stroger, Doug James, Fred Kaplan, Ben Levin, Kid Ramos, Brian Fahey, Billy Perry, Alabama Mike, Diunna Greenleaf, Oscar Wilson et encore une vingtaine d’autres), c’est un véritable annuaire qui y participe. Et n’allez pas imaginer que ce beau monde ne pointe que pour le cacheton, car c’est réellement party à tous les étages: un peu comme si tous ces Elmore James (“Hiding Place” de Primer), Howlin’ Wolf (“Josephine”, “Back to The Crossroads” ou le “Blues For Hippies” de feu Otis Spann), Jimmy Reed (“Blue Blue Water”), Jimmy Dawkins (“Blinded”), Little Walter (“Train Fare”, “Sunny Day Friends” ou l’infernal “Don’t Need Your Permission”), Jimmy Rogers et autres Muddy Waters (“That Ain’t Enough”) n’avaient jamais déserté les clubs de Chicago que pour mieux hanter celui de Bob. Tout juste si “Soul Food”, “The World’s In A Bad Situation” et “Work To Be Done” (voire la plage titulaire) parviennent à taquiner sporadiquement la fibre vintage rhythm n’ blues d’un Hank Ballard (cuivres à l’appui), mais pour le reste, ce recueil résonne de bout en bout comme un authentique fantasme de blues addict. Documentant l’inextinguible verve d’un genre se refusant obstinément à entrer au musée, cette nouvelle livraison de haut niveau fait ainsi écho à l’antique ferveur documentaire des John Lomax, John Work et Alan Lomax d’antan. Sauf qu’aucun de ces trois-là n’a jamais pratiqué l’harmonica avec la même flamme et le même brio que Bob Corritore (ni bénéficié non plus de pareils claviéristes, guitar slingers et sections rythmiques)… Privez-vous donc de ceci, et vous serez à plaindre pour longtemps!

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, August 13th 2022

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