Blues

En 2023, le stakhanoviste Bob Corritore n’aura une fois encore pas chômé, puisque voici rien de moins que sa cinquième production de l’année! Pour faire court (puisque son parcours figure déjà en exergue de la plupart des chroniques que nous lui avons consacrées), relocalisé à Phoenix, Arizona, depuis 1981, cet harmoniciste natif de Chicago y est devenu l’un des ferments les plus actifs de la scène blues locale. Y animant depuis près de quatre décennies une émission hebdomadaire sur la radio autochtone KJZZ, il y dirige également le Rhythm Room, club devenu incontournable pour quantité de musiciens, et d’aficionados d’un lowdown blues dans la tradition des juke joints. Profitant de leur programmation pour organiser au passage des sessions d’enregistrement de ces artistes, il en publie comme à la parade maintes anthologies. Singulièrement, la toute dernière se consacre davantage aux artistes du cru, résidents de la région de Phoenix. Captées entre 1987 et 2017, ces sessions permettent de retrouver, parmi quelques méconnus,  les grands Big Pete Pearson et Henry Gray, accompagnés de certains usual suspects tels que le pianiste Fred Kaplan, le saxophoniste Doug James, ainsi que les guitaristes Kirk Fletcher, Chris James, Dave Riley, Big Jon Atkinson, Junior Watson, Rusty Zinn et Johnny Burgin. Intervenant bien entendu sur chacun de ces douze titres, Corritore entame ce panel par le “Big Fat Woman 480 LBS” de son complice chicagoan, le batteur et chanteur Chico Chism. Un dynamique shuffle qui se poursuit dans une veine Chester Burnett avec le “Come To Me Baby” de l’obscur Chief Schabuttie Gilliame (avec les impeccables Rusty Zinn aux six cordes, et Richard Innes aux drums), que l’on retrouve plus loin pour un autre titre de son cru (cette fois avec le grand Henry Gray aux ivoires). Le New-Orleans rock n’ roll s’invite ensuite pour le “Walking In The Park” de Jay Miller que chante un certain King Karl (toujours avec Zinn), qui persiste en Louisiane avec le “Matilda” qu’interprétaient  à leurs débuts les Fabulous Thunderbirds (avec Doug James au sax). C’est au guitariste et chanteur Dino Spells qu’échoit ensuite une vigoureuse ode à la Ford V-8 intitulée “Jennie Bea”, sur laquelle Bob Corritore se fend de deux de ces soli d’anthologie dont il a le secret, avant de céder le pas au puissant vocaliste George Bowman pour le lancinant “I Was A Fool” (avec le grand Atkinson aux six cordes, et au solo d’harmo cette fois dans la veine saisissante de Little Walter), et que le vétéran guitariste et chanteur Tommy Dukes ne prenne le relais pour un “Real Bad Day” dans la ligne de Jimmy Reed (toujours avec Big Jon). George Bowman revient avec l’énergique “Nine Times Out Of Ten”, featuring un impérial Rockin’ Johnny Burgin à la guitare. Long time partner de Corritore, Dave Riley s’illustre ensuite avec le malicieux “Laughing Blues”, bondissant shuffle mené à la baguette par Brian Fahey et Yahni Riley aux quatre cordes basses. C’est Fred Kaplan qui s’illustre au clavier deux tons pour soutenir, auprès du magistral Junior Watson, l’imparable Sugaray Rayford sur le slow shuffle “The Glide” (sombre histoire de cheval planeur à trois pattes). La conclusion revient au regretté Big Pete Pearson, avec son propre “I’m Evil”, dans la pure lignée slow-Chicago, le guitariste Chris James y épousant notamment les licks du regretté Jimmy Rogers. Encore un must au palmarès du Phoenix blues mogul!

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, December 31st 2023

::::::::::::::::::::::::::