STEVE DAWSON – Eyes Closed, Dreaming

Black Hen Music / Proper
Americana
STEVE DAWSON - Eyes Closed, Dreaming

Pour rappel, il existe deux Steve Dawson homonymes, et chacun s’avère de surcroît auteur, compositeur et interprète !.. À ne pas confondre donc avec celui de San Diego (désormais établi à Chicago), revoici le natif de Vancouver émigré à Nashville. Virtuose des instruments à cordes pincées et frottées, nous le découvrîmes avec son magistral (et intégralement instrumental) Lucky Hand (chroniqué ICI), puis en tant que sideman et producteur de maintes réalisations récentes (John Wort Hannam, Steve Marriner, Matt Patershuk, toutes chroniquées ICI, ICI et ICI…). Après son Phantom Threshold 100% instrumental de l’an dernier, il donne à nouveau de la voix sur dix des onze plages que dénombre cette nouvelle livraison. Collaborant avec son ami Patershuk (qui co-signe quatre titres avec lui), Steve s’entoure cette fois encore d’un aréopage de pointures diverses, depuis les batteurs Jay Bellerose et Gary Craig jusqu’aux claviéristes Chris Gestrin et Kevin McKendree, en passant par le bassiste Jeremy Holmes, les choristes de luxe Keri Latimer, Casey Dawson (sa propre fille) et la Britannique Alice Russell, ainsi que d’une section de cuivres, des mandolinistes Fats Kaplin et Tim O’Brien, ou encore du violoniste Ben Plotnick et de la violoncelliste Kaitlin Raitz. Le “Long Time To Get Old” d’ouverture rappelle à nos tympans émus le souvenir du Band de “Music From Big Pink”: même lazy beat funky et claudiquant, mêmes parfums de mandoline et de tandem orgue et piano bastringue, parmi lesquels zinzine lascivement la slide guitar du patron. Dans un registre sensiblement distinct, “A Gift” mêle ses références celtico-appalachiennes à des sonorités orientales, dans l’esprit des premières livraisons d’un Harry Manx. La paire Dawson/ Patershuk récidive dans la veine du grand Mississippi John Hurt pour un “Hemmingway” accompagné d’un quatuor à cordes, sans se référer explicitement pour autant au monument littéraire quasi-homonyme. Digne de la B.O. du “O’ Brother” des frères Coen, le traditionnel “House Carpenter” confirme la dextérité de Steve sur Weissenborn, tandis que Tim O’Brien s’y fend de choruses de mandoline aussi subtils que pénétrants. Avec ses cuivres et chœurs languides la cover du “Small Town Talk” de Bobby Charles (of “See You Later, Alligator” fame) évoque pour sa part la magnificence du “Imperial Bedroom” d’Elvis Costello, tandis que “The Owl” rappelle l’inspiration agreste du Lennon de “Dear Prudence”. Les facétieux “Waikiki Stonewall Rag” et “Singin’ The Blues” (seuls instrumentaux du lot) nous renvoient aux effluves surannées des premiers albums des regrettés Bob Brozman et Leon Redbone: à la Weissenborn, la National et l’ukulele, Dawson y dialoque tour à tour avec l’harmonium et le piano délibérément bastringue de Chris Gestrin, dans l’esprit résolument ragtime qu’évoque leurs titres. Quatrième (et ultime) collaboration Dawson / Patershuk de cette martingale, “Polaroïd” s’assimile à cette americana que développait jadis un certain Robert Zimmermann sur la B.O. du “Pat Garrett & Billy The Kid” de Sam Peckinpah – une musique languide et cinématique, faisant défiler sous vos paupières closes de grands espaces en panavision. Le “Guess Things Happen That Way”  de Cowboy Jack Clement reprend en dodelinant le chemin des honky-tonks, témoignant de l’imprégnation par Steve de la culture locale de sa terre d’élection, avant que ce dernier ne conclue avec le “Let Him Go On Mama” de John Hartford, selon un picking davant autant à Woody Guthrie qu’à Dave Van Ronk. Si ce n’est peut-être pas le sommet de sa carrière dont l’on tente de nous persuader, voici néanmoins l’album le plus éclectique de Steve Dawson à ce jour. Chaleureusement recommandé!

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, March 25th 2023

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