Psych-Pop |
Qu’est-ce donc que ce nouvel OVNI ? Ah, certes (et comme en indique l’enseigne), le label est coutumier du contre-pied. N’ont-ils pas débuté en exhumant certaines pépites enfouies du rock français le plus digne (autant dire une micro-niche), avec des incunables de Wild Child et des Bad Losers? Ils poussent cette fois le bouchon plus loin encore, en ressuscitant le format délibérément désuet du maxi 45 tours vinyle 4 titres. Mais au lieu d’y caser platement “Daniela”, “Je t’aime trop”, “Betty” et “Eddie sois bon” (comme jadis les Chaussettes Noires de Claude Moine et consorts – s’expliquer dehors), ils en consacrent chacune des faces à deux musiciens à la fois distincts et complices (sur un vinyle, il y a du son des deux côtés, vous pouvez vérifier). Auteur, compositeur, interprète et producteur, Feelgood est un artiste multiple, qui a parcouru les modes et les styles des quatre dernières décennies, depuis les Bad Losers toulonnais jusqu’à la House Music de Kool Kontrol. Il rencontre ensuite le groupe Tanger, dont il devient le manager, et noue une solide amitié avec leur guitariste, Christophe Van Huffel. Revenu à la scène, il reprend ses pérégrinations musicales avec Ciao Manhattan: rock, électro, free jazz, difficile de caser la formation dans un seul tiroir. Après avoir composé et enregistré la bande originale du film de la plasticienne Orlan (en collaboration avec Jean-François Pauvros), Feelgood retrouve Van Huffel à l’issue du lockdown. Installé depuis une dizaine d’années en Provence (où il a fondé son propre studio d’enregistrement), ce dernier se consacre donc à Tanger de 1994 à 2008, avant d’embrasser la carrière de réalisateur artistique. Il travaille ainsi avec le regretté Christophe Bevilacqua de 2001 à 2018, aussi bien sur scène qu’en studio, co-réalisant avec lui les albums “Aimer ce que nous sommes” (2008) et “Les Vestiges du Chaos” (2016), ainsi que plusieurs titres isolés (dont certains des ultimes duos du Beau Bizarre), et collabore également avec Alan Vega, Nina Morato, Leslie Winer, Gail Ann Dorsey, Eumir Deodato, Carmine Appice, Érik Truffaz, Diego Carrasco, Moraíto Chico, Minino Garay et Steve Shehan… Sur ce nouveau projet, enregistré entre le Var et Paris, Van Huffel transfigure le springsteenien en diable “Girl In Uniform” des Bad Losers (aux accents Mink de Ville) en somptueuse vignette électro-pop acidulée (entre Bowie et Mark Hollis), tandis que Feelgood en démarque sa propre version space-folk, à mi-chemin entre le Vassiliu pastoral des seventies et Dashiell Hedayat. Avec “L’Infini, Elle Aime”, Christophe signe pour sa part un proto glam-rock où se bousculent les ombres de Gary Glitter, Axel Bauer et Alan Vega, mais Feelgood tue le match avec son “Chaotic Sky/ Planets”, en y convoquant les spectres complices de Kevin Ayers et Syd Barrett. Ex-aequo, balle au centre… Prêts pour la belle?
Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
PARIS-MOVE, September 9th 2022
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