Blues, Rock |
Voici treize ans déjà que Calvin Russell nous a quittés (il aurait fêté son 75ème anniversaire en novembre dernier). Né à Austin, Texas, c’est à Garfield (dans le même Lone Star State) qu’il s’est éteint, rongé par un cancer du foie. Révélé en France au début des nineties (la quarantaine alors déjà bien entamée) par le non moins regretté Patrick Mathé (alors à la tête du label indé New Rose, avant Last Call), ce songwriter à la tronche plus burinée encore que celles de Keith Richards et Tom Waits réunis laisse une quinzaine d’albums (dont cinq live), et un souvenir impérissable parmi ses nombreux fans européens. Si c’est bien la France qui le révéla (tandis qu’il demeurait presque inconnu dans son propre pays), c’est sur le continent européen qu’il tourna le plus au cours des deux décennies de sa carrière musicale professionnelle. Il n’est donc guère étonnant que ce soit de notre hexagone (et de la Belgique toute proche) que proviennent la majorité des quatorze artistes réunis sous la houlette de Manu Lanvin (son ultime comparse), pour cet hommage au plus Français des Texans disparus. Les expats ne sont pas en reste, puisque c’est au Britannique Hugh Coltman qu’échoit d’ouvrir le ban avec ce “Shadow Of A Doubt” (de “Rebel Radio”, sur Dixiefrog en 2001) qui rappelle à bon entendeur qu’il débuta en tant que hurleur au sein de la formation blues-rock albionne The Hoax. En introduction du boogie “Wild Wild West” (from “Sam”, 1999), Manu nous fait entendre un extrait d’interview de Calvin. Comparse de Neal Black et Popa Chubby, Mike Lattrell est à l’orgue Hammond, tandis que Bako Mikaelian y officie à l’harmonica, et c’est du lourd. C’est à un certain David Minster qu’incombe de chanter “Behind The 8 Ball” (“A Crack In Time”, 1990), où Manu cède la lead guitar à Éric Sauviat, et la slide à Mick Ravassat. Après un autre intermède parlé de Calvin, notre chère Beverly Jo Scott (elle nous appartient depuis qu’elle réside en Belgique, OK?) interprète ensuite “Crossroads” (“Sounds From The Fourth World”,1991) avec à nouveau Mikaelian au soufflant, tandis que Lattrell passe à la mandoline, Lanvin aux six cordes acoustiques et Nicolas Bellanger à l’accordéon. Autant le confesser, un puissant frisson nous parcourt alors l’échine. L’Irlandais Johnny Gallagher s’essaie avec bonheur à “Trouble” (“Dream Of The Dog”, 1995), auquel l’orgue de Lattrell confère quelques faux-airs du faste de Procol Harum. Après un autre aphorisme russellien, Théo Charaf assène sa propre version de “Nothing Can Save Me” (“Calvin Russell”, 1996), avec le renfort bienvenu du master of pedal steel Claude Langlois. Croyez le si vous voulez, on croirait presque y entendre le Dylan de “Pat Garrett & Billy The Kid”. Neal Black nous fait ensuite le coup du sentiment avec “Time Flies” (du même album que son prédécesseur), avant que Charlélie Couture en personne se fende de “Too Old To Grow Up Now” (provenant du chant du cygne “Dawg Eat Dawg” en 2009), avec un quarteron de choristes enjoués. Craig Walker délivre une version folk à souhait de “Baby I Love You” (“Sounds From The Fourth World”), avec un Langlois toujours en verve à la pedal steel, avant que le gargantuesque Popa Chubby ne déboîte le tout désigné “All We Got Is Rock And Roll” (avec pour guest la trompette de Boney Fields). Manu Lanvin duettise ensuite avec la chanteuse Haylen sur le honky rag “Ain’t Leaving Your Love” (de Townes Van Zandt, sur “Rebel Radio” en 2001), avant que Fred Chapellier n’en fasse autant avec Beverly Jo Scott pour le downhome blues “Rats & Roaches” (“Soldier”, 1992), et c’est un nouveau sommet en soi (la slide de Ravassat y duettisant également avec la lead guitar de Fred). Les Lanvin père et fils (Gérard et Manu) partagent le micro sur le “5 m2” qui refermait “Dawg Eat Dawg”, avant que le grand Axel Bauer ne conclue ce tribute sur une version d’anthologie (et en français) de ce “Soldier” qu’avait originellement produit le non moins décisif Jim Dickinson, et dont les paroles résonnent avec une cruciale acuité dans notre actualité présente. Le plus bel hommage dont notre pourtant modeste songwriter aurait sans doute préféré pouvoir se passer. RIP, brother, and thanks to everyone involved…
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, May 30th 2024
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Ils sont tous là! Ils sont venus rendre hommage au très très grand Monsieur qu’était Calvin Russell. Homme au coeur gros comme ça, musicien au talent immense, songwriter exceptionnel, au charisme indéniable, et j’en passe… Axel Bauer, Popa Chubby, Hugh Coltman, Beverly Jo Scott, Charlélie Couture, Gérard Lanvin, Théo Charaff, Craig Walker, Johnny Gallagher, Haylen, Fred Chapellier, David Minster, Boney Fields, Neal Black, Manu Lanvin. 14 compositions de Calvin Russell interprétées par les musiciens susnommés accompagnés par Karim Bouazza sur 11 titres à la batterie et Jimmy Montout à la batterie sur 1 titre, Nicolas Bellanger à la basse sur 11 titres et 1 morceau à l’accordéon, Mike Lattrell à l’orgue sur 11 titres, et Mick Ravassat sur 6 titres, guitare acoustique, slide guitar, guitare électrique. C’est en 2022 que La Traverse de Cléon demande à Manu Lanvin d’orchestrer et de rendre hommage au guitariste texan. Ce spectacle obtient un succès énorme et l’idée de graver cela dans la cire découle de cette belle réussite. L’occasion de se remémorer des morceaux fameux, d’écouter ou de découvrir de formidables artistes connus et reconnus, comme le chanteur anglais Hugh Coleman à la voix convaincante, Manu Lanvin, le suisse, beau frère de Calvin, neveu de Vince Taylor, David Minster, l’Irlandais Johnny Gallagher, Beverly Jo Scott à la voix faite pour chanter le blues, et de redécouvrir des musiciens brillants. Je pense particulièrement à Mick Ravassat (que je n’hésite pas à “qualifier” de Ry Cooder français depuis des années déjà!) mais aussi à Baco Mikaelian dont l’harmonica file des frissons (!!) et des chanteurs impressionnants tels Théo Charaf, Charlélie Couture, l’Irlandais Craig Walker, la talentueuse Haylen ou Axel Bauer, dont la version sonne plus vraie que nature! C’est une véritable épreuve que de commenter chaque morceau, car les artistes sont tous excellents. Rien n’est évidemment à jeter. On sent bien qu’ils donnent tous le meilleur d’eux mêmes. A noter: les titres sont entrecoupés de propos de Calvin lui-même… Ce qui provoque le petit frisson émotionnel inévitable. A figurer en très bonne place dans la discothèque!
Dominique Boulay
Paris-Move & Blues Magazine (Fr)
PARIS-MOVE, June 18th 2024
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A lire: les 2 ITWs de Calvin Russell
Concerts (avec Beverly Jo Scott, Charlélie Couture, Gérard Lanvin, Johnny Gallagher et bien d’autres…):
Le 30 juin : Bron (69)
Le 5 juillet : Cognac Blues Passions
Le 19 juillet : Nuits Suspendues, Le Havre (76)
Regardez les video teasers de differents musiciens presents sur ce bel hommage à Calvin: