KAZ HAWKINS – Live In Brezoi (I)

Dixiefrog Live Series / Rock & Hall
Soul blues
KAZ HAWKINS - Live In Brezoi (I)

En juin 2021, quand furent enfin levées les mesures gouvernementales de confinement, le premier concert qu’organisa le festival Jazz en Nord (dans les Hauts-de-France) fut celui de Kaz Hawkins et de ses hommes. Quel autre choix eût pu s’avérer plus approprié? En effet, si, comme nous, vous suivez la carrière et le parcours de cette artiste (voir chroniques ICI, ICI et ICI), vous savez à quel point elle incarne mieux que personne les valeurs de résilience, d’humanité, d’émotion et de convivialité. Désormais résidente de notre pays (et passée sous la houlette bienveillante de Dixiefrog), elle n’en poursuit pas moins les tournées européennes, et c’est lors du Summer Camp Festival de Brezoi (Roumanie), dont elle est une habituée, qu’elle a enregistré ce premier volet d’un diptyque live (le second volume est d’ores et déjà annoncé l’an prochain). Son band est désormais aussi rodé qu’un équipage au long cours: le keyboards master Cédric Le Goff en assurant la capitainerie, aux côtés de notre voisin Stef Paglia (par ailleurs lead guitar des Flamands BluesBones), tandis que le vétéran des fûts Amaury Blanchard et le non moins compétent bassiste Julien Boisseau s’y activent en salle des machines. Dès le tourbillonnant “Don’t Make Mama Cry” (d’où la voix de Kaz émerge nimbée d’une impressionnante reverb), la réponse du public est palpable, et la Mama en profite pour l’embarquer dans un holler rageur sur l’impressionnant “Drink With The Devil”, qui bondit comme le “Wang Dang Doodle” de Willie Dixon au temps où la regrettée Koko Taylor en faisait son miel de Queen Bee. “The River That Sings” (que signe Kaz toute seule, comme les trois quarts du répertoire de ce soir) s’avère particulièrement émouvant, rejoignant les rives du gospel celtique comme seuls les Waterboys et Van Morrison savent encore le faire. Cédric en tapisse la mélodie d’amples nappes de B3, tandis que les six cordes de Stef y rivalisent de sensibilité (et que les Mama’s boys y assurent les backing vocals). Kaz empoigne une guitare acoustique pour une version touchante du “Lonely Boy” de son tout dernier album studio, “Until We Meet Again”. Paglia s’y montre à nouveau d’une délicatesse extrême, s’y fendant de licks dignes d’un Mick Taylor à son zénith. Le “Feeling Good” de Nina Simone (récemment remis au goût du jour par Muse) reçoit de la part de Le Goff le traitement vintage qui seyait à la diva du comté de Polk, tandis qu’hélas, l’excès d’écho y dessert par contre la prestation vocale (un comble). Comme pour le récent “Live In Paris” de Fred Chapellier (chroniqué ICI), la prise de son privilégie en effet la captation d’un son d’ambiance, et ce que cet enregistrement y gagne en authenticité ne compense pas toujours ce qu’il y perd sur le plan audiophile (s’il s’agissait, comme il est désormais la règle courante, d’une prise directe à partir de la console). Le solo de guitare de Paglia n’en tire pas moins allègrement son épingle du jeu, tandis que le sépulcral et autobiographique “One More Fight” (sous-titré “Lipstick & Cocaine”, et moment clé de chacun des concerts de la Diva) parvient à surplomber de la tête et des épaules cette brume sonore. C’est hélas encore le même écho intempestif qui pollue ce “Hallelujah Happy People” qui nous réjouissait tant de visu, et c’est d’autant plus dommage que derrière le grondement de la voix, le band assure un swing aussi impeccable qu’imperturbable. Etta James n’est pas en reste, puisque Kaz (qui lui consacra un spectacle et un album entiers) reprend ici son funky “Woman”, avant l’imparable “Get Up And Go” qu’elle co-signe avec Cédric Le Goff. Après deux autres originaux encore (son “Because You Love Me” où elle reprend la guitare acoustique, tandis que Paglia réalise à nouveau des prodiges, et “Better Days” où étincelle à son tour l’orgue de Le Goff), notre soul woman conclut sur le classique de Willie Dixon dont Etta James fit l’hymne que l’on sait: “I Just Want To Make Love To You”, dans une version d’anthologie de plus de dix minutes, sur laquelle s’invite un excellent harmoniciste local… Peu importent nos menues réserves techniques (dont ni l’artiste, ni ses musiciens ne sont responsables), car tant que vibreront ainsi des personnalités de la trempe de Kaz Hawkins, le cœur de nos musiques continuera de battre sans la moindre arythmie.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, September 3rd 2024

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On ne peut que se réjouir de la sortie de cet album dans la dite collection Dixiefroglive series, et entendu que les goûts de chacun varient aussi en fonction des artistes en présence, on peut dire que c’est là une bien belle collection! Pour cet opus le Band est exceptionnel: Cédric Le Goff aux claviers, Amaury Blanchard à la batterie, Stef Paglia à la lead guitare, Julien Boisseau à la basse, y compris Marcian Petrescu qui joue formidablement bien sa partition, lui aussi. Kaz Hawkins avait été fabuleuse au Blues Roots Festival de Meyreuil en 2023, parvenant à arracher des larmes à bon nombre de spectateurs émus par le tsunami émotionnel qu’elle déclenche lors de chaque prestation! L’intensité indéniable de la performance a dû faire sortir pas mal de mouchoirs mais c’est fait avec un tel talent qu’un tel spectacle restera longtemps dans les mémoires.

Dominique Boulay
Paris-Move & Blues Magazine (Fr)

PARIS-MOVE, September 12th 2024

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Album à commander sur son Bandcamp  (digital, CD, 2LP Deluxe Edition)