| Chanson rock |
Si vous ne connaissez pas encore Éric Frasiak, on vous plaint. Mais comme nous sommes pleins de mansuétude à votre égard, plutôt que de ressasser une fois encore les présentations, nous vous invitons déjà à vous reporter à nos précédentes chroniques le concernant (ICI, ICI, ICI, ICI, ICI et ICI). Moins d’un semestre après son excellent “Mon Béranger 3” (chroniqué ICI), notre homme revient avec son quatrième live en un quart de siècle de carrière (et son second en les mêmes lieux). Et comme il l’a enregistré quasiment at home (soit à nouveau au Théâtre de son fief, Bar-le-Duc), il l’a intitulé “En Concert Au Bercail” (s’il avait été Ch’ti comme Dany Boon, il aurait certes pu l’appeler aussi “À S’ Baraque”, mais puisqu’il est Lorrain d’origine et Meusien d’adoption, hein…). Et tel Blanche-Neige, Frasiak a su s’entourer, pour l’occasion, de pas moins de sept larrons. Mais en la circonstance, pas un nain en perspective, non: les gusses seraient de fait plutôt à ranger dans la catégorie des géants. Outre les usual suspects de sa garde rapprochée (Jipé Fara aux six cordes hautement électrifiées, Philippe Gonnand à la basse, à l’harmonica et au saxophone, Benoît Dangien aux claviers, mélodica et au cas-où- euh, au kazoo – et Jean-Yves Lozac’h à la pedal-steel, ex-comparse de François Béranger s’il vous plaît), on trouve également à ses côtés l’excellent Raphaël Schuler aux drum-sticks et les non moins éblouissants Patrick Leroux au violoncelle et Steve Normandin à l’accordéon. De quoi déployer la vaste palette d’arrangements qu’appelle le répertoire de l’un de nos chanteurs-compositeurs-interprètes favoris. Et comme cet album s’avère double, l’artiste ne lésine pas non plus sur la quantité, puisqu’il propose 22 belles pioches, issues de son conséquent catalogue originel. Après la guillerette introduction instrumentale que dispense au piano l’ami Dangien, Éric entame le faussement fataliste “Les Aujourd’hui(s) Qui Chantent”, en forme de “Je Ne Regrette Rien” revisité par son mentor, Béranger. En authentique chanteur de proximité, Frasiak veille à établir d’emblée le contact avec son auditoire, et c’est avec humour et humilité qu’il introduit son savoureux “Un Z À Mon Nom” (qui s’achève en épique mazurka pianistique). On a certes autant affaire à un amoureux de la musique qu’à un éperdu des mots, comme le confirment haut la main “Je T’Écris”, “Le Jardin De Papa” – presque au niveau du “Mon Vieux” de Daniel Guichard – le touchant “Charleville”, le cocasse “Rhinovirus”, le poignant “Un Faisan Sur Ma Fenêtre” et l’ironique country-boogie “Trop De Mots Dans Mes Chansons”. Ses propres réquisitoires et plaidoyers (le si juste “Mr. Boulot”, qui aurait pu figurer au générique de “Merci, Patron”, ou encore “Bure Sur Atome”, “Espèce De Cons”, “Couvre-Feu”, “Mon Anarchie” et le pertinent – et impertinent – “Non Essentiels”) côtoient comme de coutume son hommage rituel à François Béranger (dont il reprend aussi “Tranche De Vie”). Il faut souligner le haut niveau d’exécution instrumentale qu’assurent de bout en bout nos huit comparses: sur “Bar-Le-Duc-City Blues”, l’orgue de Dangien évoque ainsi celui du regretté Eddy Louiss, tandis que le Frasiak Band y décolle à la manière de celui de Jonasz circa “Joueurs De Blues”, et les codas de “La Poésie” et “Mon Anarchie” proposent des crescendos de guitare dignes de ce Gilmour auquel Éric semble vouer la plus grande admiration. Remarquablement enregistré, mixé et mastérisé, ce concert fait également l’objet d’une réalisation vidéo (visible ICI). À la manière d’un François Ruffin, Frasiak est loin de ne prêcher que pour les convertis (ni même pour les avertis, qui en valent bien le double). Faîtes-en donc l’expérience: on parie que la prochaine fois qu’il (re)passera dans votre coin, vous vous ruerez pour l’y (re)voir et le (ré)entendre… Dans votre bercail à vous? Chiche!
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, July 4th 2025
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