TOMMY CASTRO – Closer To The Bone

Alligator / Socadisc
Blues
TOMMY CASTRO - Closer To The Bone

Pour son 18ème album en quarante ans de carrière (dont plus d’une trentaine en tant que leader de son propre band), on ne va pas resservir la bio de l’enfant chéri de San José, et pour de plus amples présentations, on se référera à de précédentes chroniques (ICI, ICI et ICI). Toujours est-il que si, parmi tout ce que nous apprécions chez Tommy, son éclectisme y tient bon rang (amalgamant en son chant, son jeu et son style, des genres aussi voisins et distincts que la soul, le rock, le funk et le blues), il n’avait jamais enregistré d’album “purement” blues à ce jour. Les guillemets ne sont pas là pour en questionner la démarche, mais pour prévenir tous ceux qui s’attendraient à un album de country-blues acoustique, comme ceux dont Bob Margolin nous a récemment gratifiés. Le blues qui a marqué le jeune Castro encore adolescent, c’est celui des fifties et des sixties, depuis le rhythm n’ blues de Ray Charles et Wynonie Harris jusqu’au West-Side sound de Buddy Guy, Junior Wells, Magic Sam et Otis Rush. Il nous en donne le gage dès le “Can’t Catch A Break” d’ouverture (qu’il co-signe avec Kid Andersen). Sur un vintage funky back-beat, les cuivres y donnent la réplique au timbre rauque de sa voix, ainsi qu’au jeu concis et habité de sa guitare. Dans le même registre, il assène d’emblée “The Way You Do” du trop méconnu Jimmy Nolen (guitariste des Blue Flames de James Brown, et killer dans son registre). Second invité de marque, Rick Estrin y va de son chromatique, tandis que son ex-batteur au sein des Nightcats, June Core, officiait sur la plage précédente. Tommy cite le riff du “All Your Love” d’Otis Rush, en clin d’œil au mambo beat commun à ces deux titres, avant que le Texas-shuffle “One More Night” (de Johnny Nitro, autre stalwart de la scéne de Frisco) ne rappelle à point nommé les contributions essentielles de bands tels que Mike Morgan & The Crawl, Anson Funderburgh & The Rockets et autres Fab T-Birds. Second original (co-signé Castro-Andersen et Mark Gilbert), “Crazy Woman Blues” est un hommage manifeste au Buddy Guy de “First Time I Met The Blues” (“I’m a fool for misery/ Yes, I’m a sucker for pain”), et le piano de Mike Emerson y démontre que celui-ci connaît son Otis Spann sur le bout des ivoires. L’enlevé “Woke Up And Smelled The Coffee” d’Otis Clay bénéficie de l’orgue Hammond de Mike, tandis qu’avec sa slide gouleyante, son barrelhouse piano et les gospel backing vocals des Sons Of Soul Revivers, “Keep Your Dog Inside” de Michael Duke s’avère un réjouissant intermède, préfigurant la reprise du “She Moves Me” du regretté Johnny Guitar Watson, où la guitare de Tommy rappelle autant ce dernier que celle de Jimmie Vaughan. Les cuivres y sont à la fête, et Deanna Bogart s’y fend d’un juteux solo de sax, tandis que la rythmique qu’y impriment la basse du fidèle Randy McDonald et les sticks de Bowen Brown s’y révèle implacable. Autre mambo, “Ain’t Worth The Heartache” est un original de Tommy dans la veine du “One Way Out” de Rice Miller, accueillant l’harmonica du grand Billy Branch, tandis que la cover du “A Fool For You” de Ray Charles présente rien moins que le guitar killer Chris Cain au… piano – ce qui n’empêche nullement Tommy d’y livrer un solo d’anthologie. Le “Freight Train” de Ron Thompson est attaqué férocement façon Elmore James, et Jeremy Spencer n’a qu’à bien se tenir, car à la slide électrique, Tommy n’a pas non plus de leçons à recevoir. Compo exceptionnelle de Randy McDonald, “Everywhere You Go” est un shuffle chanté par son auteur, avant que le standard “Bloodshot Eyes” de Wynonie Harris ne déboule tout jump et cuivres dehors (avec à nouveau June Core aux drums). Ne reste plus qu’à conclure avec le ‘Stroll Out West” d’Eddie Taylor (avec encore Rick Estrin), et le “Hole In The Wall” de Brownie McGhee pour profession de foi. S’il ne s’agit pas à proprement parler du retour de l’enfant prodigue (Tommy Castro a-t-il jamais été autre chose qu’un authentique bluesman?), voici sans doute ce qu’il a livré de plus conforme au genre. L’essentiel demeurant que cet album soit effectivement, et d’ores et déjà, un classique.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, January 29th 2025

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