BLUE DEAL – Can’t Kill Me Twice

Dixiefrog
Blues-Rock
BLUE DEAL - Can't Kill Me Twice

En matière musicale comme en football, cela fait belle lurette que l’Allemagne impose le respect. Qu’il s’agisse de Bach, Beethoven ou Beckenbauer, nos cousins Germains n’ont en effet jamais démérité, et c’est toujours le cas pour les courants les plus récents. Outre Nena et Udo Jürgens, ils nous ont en effet offert Can, Tangerine Dream, Klaus Schulze, Popol Vüh, Amon Düül, Faust, Birth Control, Kraftwerk, Nina Hagen, Rammstein, Accept et Scorpions, tout en prodiguant une patrie d’accueil à quelques relégués notoires du rock anglo-saxon (de Kevin Coyne à Mitch Ryder, en passant par Roger Chapman, Eric Burdon et Spencer Davis), voire-même à certains bluesmen (de Louisiana Red à Big Daddy Wilson, en passant par Champion Jack Dupree). Dans ce registre, ils ont aussi produit quelques cadors autochtones (de Jimmy Reiter et Kai Strauss à BB & The Blues Shacks), mais n’avaient à ce jour exporté que peu de formations issues du pourtant fertile terreau blues-rock local. Avec déjà cinq tournées écossaises à son actif (ainsi que quelques incursions françaises), le quartette Blue Deal (de Donaueschingen, dans le Bade-Wurtemberg, au sud-ouest de la Forêt Noire) semble bien parti pour briser cette malédiction. Vainqueurs du German Blues Challenge en 2023, ces musiciens ont en effet vu leur second effort (que voici) sacré meilleur album blues 2024 dans leur pays, peu après s’être hissés jusqu’en demi-finale de l’International Blues Challenge de Memphis. C’est le souvenir du regretté Johnny Winter qu’évoque d’entrée de jeu l’énergique “Short Time Runner”, mené par les riffs du jeune guitariste Tom Vela et le timbre chaud et puissant du vétéran Joe Fisher (ex-Cadillac Blues Band). L’orgue bienvenu de ce dernier vient renforcer le quartette sur le shuffle “Hard Times”, suscitant cette fois la comparaison avec Stevie Ray Vaughan et Double Trouble (solo de wah-wah à l’appui). La rythmique impeccable qu’y assurent Martin Bürger et Jürgen Schneckenburger se rétracte à l’économie pour “Got 2 Go” (Delta blues façon “You Gotta Move”), avant que la cavalcade ne reprenne avec “Favorite Mistake”, irrésistible rock seventies à la Bad Company (vocals et pyrotechnie inclus). Ballade bluesy à trois temps, la plage titulaire convoque à nouveau l’orgue de Fischer (celui de Procol Harum était tenu par un certain Matthew du même nom), et accentue encore la similitude de son timbre vocal avec celui du grand Paul Rodgers. Le bref instrumental à la wah-wah “Bluecata” introduit la plage la plus longue de l’album, “1942”, hendrixienne au possible (et citant même furtivement les ponts de “Hey Joe” et “The Wind Cries Mary”). La section rythmique y prend toute sa dimension, et mêlant arpèges de guitare acoustique et heavy riffs électriques, “Gilded Cage” évoque pour sa part le Wishbone Ash des grandes heures. Le riff de “Seen To Be Believed” s’avère par-contre trop manifestement calqué sur celui du “Old Love” de Clapton pour passer inaperçu, et en dépit des efforts louables de Fischer, cela reste flagrant. Plagier n’est pas jouer, Messieurs, carton jaune! Avec sa slide saturée et son boogie beat au ras du plancher, “Stand By” est de cette essence dont AC/DC et Status Quo consumaient les foules il y a un demi-siècle, et l’inattendue ballade au piano “Over” conclut les 40 minutes réglementaires sur un mode mélancolique et éthéré. Fischer, Vela et consorts y démontrent toute la subtilité dont ils sont capables, en dépit de leur caractère bien trempé. Une formation que l’on peinerait à ranger pleinement dans la catégorie blues, mais qu’il conviendra néanmoins de suivre de près (d’autant que son label français en annonce une troisième livraison d’ici la fin de cette année).

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, July 23rd 2025

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