Blues, Rhythm 'n' Blues |
Après avoir été, des années durant, l’un des piliers du Mac Arnold’s Plate Full Of Blues, l’harmoniciste, pianiste, chanteur et guitariste Max Hightower se décide enfin à se lancer en solo. Arnold fut bien entendu membre historique du Muddy Waters Band au milieu des sixties. Bassiste gaucher, il y côtoya des pointures telles que Francis Clay, Otis Spann et Sammy Lawhorn, avant de tomber amoureux de la Californie, où il emménagea avec femme et enfants quand il rendit son tablier à Muddy. Revenu à Pelzer (dans sa Caroline du Sud natale) où il coule désormais des jours paisibles, Stan Woodward lui a consacré un documentaire en 2009: “Nothing to prove – The story of Mac Arnold’s return to the blues”. C’est chez le guitariste Big Jon Atkinson, en son Big Tone Studio de New-Orleans (où Blue Moon Marquee a capté son dernier opus, chroniqué ICI), que Max est allé enregistrer les douze originaux de cette première échappée belle. Il n’y fut pas déçu par la réception, puisqu’outre Big Jon himself à la guitare (et à la console), y figure la crème des session players locaux. Dès le “Double Bubble” d’ouverture, on comprend que ces gens ne sont pas venus pour plaisanter: sur un beat à contretemps, son riff (évoquant celui du “Heartbreaker” du Zep, tel que revisité par Dread Zeppelin!) y fait office de piste de décollage pour le timbre rauque et éraillé d’un Hightower qui souffle les braises à travers son instrument à lamelles afin de s’extraire des cuivres. On plonge plus avant dans le Louisiana sound avec le funky “It’s On Me”, tapissé de l’orgue churchy de Brian Coogan. Max y assure les cocottes de six cordes, tandis que le lowdown groove qu’y impriment le bassiste Tyler Thompson et le batteur Nick Solnick exsude tout ce dont un Leon Russell fut capable durant sa période Shelter. Le funk persiste et signe avec ce “Here She Comes” que n’auraient pas renié les Meters en leur temps. Big Jon y actionne la wah-wah, tandis que les cuivres rougissent, que ce diable de Davis fait chauffer la cabine Leslie et que Max y retrouve certains maniérismes vocaux du regretté James Brown. Le swing blues s’invite ensuite pour un “Damned If I Do” évoquant les débuts de Magic Sam et Junior Wells (avec sa walking bass montée sur amortisseurs). Le travail de Max à l’harmo s’y avère des plus convaincants, mais le southern funk (tel que le pratiquait Tony Joe White voici un demi-siècle) reprend ses droits sur l’allitéral “Twitchy Witcha”, où les cuivres et le piano assurent un rôle décisif, tandis que l’harmo se fend à nouveau d’un chorus sans appel. On s’y croirait au cœur du score d’un TV serial où sévirait Antonio Fargas (alias Huggy les Bons Tuyaux), impression que corrobore ensuite le lascif “My Baby & Me”, où le phrasé de Max prend tout son suc, tandis que le piano véloce de Davis et la section rythmique y déploient leur imparable savoir-faire (impossible d’écouter ce truc sans se trouver saisi de gigotements). Le solo d’harmo façon Stevie Wonder enfonce le clou, avant que celui de “Sweet Gum Tree” ne ravive le souvenir ému du Paul Butterfield Blues Band (avec sa partie de cuivres et le solo d’Atkinson, digne d’un Bloomfield). Funk encore et toujours, avec ces “Too Much Of Not Enough” et “Thick Jello” tels qu’en en produisait le J.Geils Band au temps de son “Back To Get Ya”. Ayant failli donner son titre à l’album, “I Ain’t Lying” est une autre plage rappelant les riches heures de Paul Butterfield (au temps de “In My Own Dream” et “Keep On Moving”), tandis que le sax de James Beaumont, le piano de Rob Davis et la rythmique souple et swing s’y montrent dignes du “Moondance” de Van Morrison. Sur un riff devant beaucoup au “Shake For Me” de Willie Dixon et Howlin’ Wolf, “Snuggle Bug” s’avère un funky blues number sur lequel l’harmo pastiche de manière patente celui de Chester Burnett. Le programme se clôt sur l’instrumental “Assmograph”, jam de moins de trois minutes où chaque protagoniste trouve l’occasion d’apposer sa signature. Capté live en studio sur console analogique à bandes, voici donc un album des plus attachants, dont le cachet vintage et l’enthousiasme spontané séduiront tout amateur sincère de real deal blues et rhythm n’ blues.
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, February 19th 2025
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