TORONZO CANNON – Shut Up & Play!

Alligator
Blues
TORONZO CANNON - Shut Up & Play !

Pour sa troisième livraison sur le major label de Chicago (et son sixième en tout), Toronzo Cannon ne s’est d’évidence pas résolu à garder sa langue dans sa poche (contrairement à l’injonction titulaire). Pour de plus amples présentations du lascar, merci de vous référer à nos précédentes chroniques (ICI et ICI). Plus ancré que jamais dans la tradition urbaine et moderne de la Windy City, son blues s’inscrit naturellement dans le sillage de grands prédécesseurs tels que Son Seals,  Fenton Robinson, Lonnie Brooks et autres Michael Coleman. Dès le funky “Can’t Fix The World” d’ouverture, toute la faconde et l’exubérance d’un chanteur passionné et d’un guitariste à la vélocité éprouvée sautent aux tympans. Remarquablement épaulé par son stage band (le claviériste Cole DeGenova, le bassiste Brian Quinn et l’impressionnant drummer “Jroc” Edwards), il délivre avec le brûlant “I Hate Love” l’une de ces harangues montées sur roulements dont le regretté Luther Allison cultivait la recette. La guitare y grimpe à nouveau en fusée éclairante, de même que sur l’épique et groovy “Him”, dans la veine de Johnny Guitar Watson. Le gospel effréné “Had To Go Through It To Get To It” permet à DeGenova de s’illustrer autant à l’orgue d’église qu’au piano, avant que le riff de “Something To Do Man” n’évoque ces charges shuffle historiques que Chester Burnett lançait jadis depuis Memphis. Dans un climat soul crooning aérien, “Message To My Daughter” n’en propose pas moins deux nouveaux guitar choruses chromés sur tranche. Avec sa slide guitar vicelarde, c’est le fantôme d’Elmore James que convoque ensuite “Unlovable” (autour duquel virevoltent les ivoires d’un DeGenova décidément en verve), mais c’est aux jeunes Robert Cray et Joe Louis Walker d’il y a quarante ans que semble se référer le funky “Guilty”, tandis que c’est vers le Freddie King dernière période (celui de “Palace of The King”) que lorgne le déchaîné “She Got Me By The Short Hairs”. Le languide, semi-acoustique et salace “My Woman Loves Me Too Much” propose en guest l’harmonica goûteux du grand Matthew Skoller, avant que menée par le grand piano du crucial DeGenova (et à nouveau illuminée d’un renversant guitar solo), la soul ballad “If I’m Always Wrong” ne s’apparente au registre du Stevie Wonder d’il y a un demi-siècle. La plage titulaire s’insurge en conclusion contre les injonctions à la boucler que subit Toronzo chaque fois qu’il aborde quelque sujet de société, et son propos s’appuie dès lors sur une déferlante réminiscente du Jimi Hendrix de “Electric Ladyland” (passé à l’orgue, DeGenova y transpose l’esprit qu’insufflait alors le grand Stevie Winwood à ce double LP). En abordant sa 57ème année, un bluesman s’avère soit potentiellement rincé, soit au contraire au faîte de sa maturité. Pour Toronzo, pas d’hésitation, c’est seconde option qui l’emporte!

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, May 28th 2024

Follow PARIS-MOVE on X

::::::::::::::::::::::::::

Album à commander ICI