Blues |
Pour son quatrième album en neuf ans, Toronzo Cannon crève le plafond. Après que ses deux précédents (sur Delmark) lui valurent l’intérêt croissant de la blues community mondiale, sa signature chez le saurien recèle toutes les chances de l’établir en tant que figure marquante de la scène contemporaine. Les trois plages qui ouvrent le ban constituent de tels uppercuts que l’auditeur sonné doute que le challenger puisse tenir pareil régime de bout en bout. Ce dernier le détrompant avec panache, tentons d’en disséquer les arcanes. Comme tout bluesman arrivé à maturité, le lascar fit d’abord ses classes. Le concernant, ce fut auprès de L.V. Banks, Wayne Baker Brooks et Tommy McCracken qu’il débuta voici une vingtaine d’années, avant de former son propre band, le Cannonball Express. Et d’écumer dès lors tout ce que les West et South Side comptent de clubs exigeants. Ensuite, notre homme compose son propre répertoire, dans une veine combinant respect de la tradition et modernité. Il aborde ainsi dans ses textes la violence, dont il fut longtemps témoin tandis qu’il conduisait un bus urbain (“The Pain Around Me”: “il y a bien un curé dans l’église du coin, mais on ne voit jamais un politicien hors des périodes électorales”). Mais aussi la précarité (“Bad Contract”, quand la fragilité des couples aggrave le surendettement), ou encore le terme récurrent de la rivalité amoureuse (le truculent “Walk It Off” et l’émouvant “When Will You Tell Him About Me?”). Enfin, ce superbe chanteur se complète d’un guitariste impressionnant, chez qui se complètent les références à Freddie King (“Mrs From Mississippi”) et Buddy Guy, autant qu’au Hendrix d’All Along The Watchtower (“I Am”).
Après Joe Louis Walker et Larry Garner, Toronzo Cannon s’avère donc le bluesman des temps que nous traversons aujourd’hui. Avec énergie, passion et sincérité: les qualités essentielles de cette musique désormais quasi-séculaire.