Americana |
Nous vous l’avions déjà signalé voici pile deux ans (avec son remarquable “St. Paul’s Boulevard”, chroniqué ICI), mais cette fois Michael McDermott surpasse haut la main tous les espoirs que nous fondions en lui. “La musique revêt deux personnalités, une dualité qui se répartit souvent entre l’introspection tranquille et l’affirmation puissante. Pour un photographe, cela se peut se traduire entre l’ombre et la lumière, et pour un musicien entre l’acoustique et l’électrique”. Pour simpliste qu’elle puisse paraître, cette assertion ne s’en est pas moins confirmée dans l’histoire de nos musiques dites actuelles (les “une face rapide, une face lente” de la collection “Formidable Rhythm n’Blues”, dont le principe s’étendit au “Atlantic Crossing” de Rod Stewart et au “Tattoo You” des Stones), et McDermott en prolonge à présent la formule, jusqu’à proposer deux albums faux-jumeaux. Le premier, “Lighthouse On The Shore”, s’avère d’un romantisme à tirer des larmes, tandis que le second, “East Jesus”, assume son caractère plus rentre-dedans. Si l’on serait légitimement tenté de les commenter séparément, le simple fait que Michael les publie jumelés en un double CD nous en dissuade. Et le bougre fait très fort, en distillant dès le premier volet une martingale de killer-ballads à renvoyer le Springsteen et le Neil Young de “Streets Of Philadelphia” à leurs chères études (ainsi que tous les Eric Carmen, Billy Joel et Elton John de la Création). Personnellement, je revendique que l’on joue la plage titulaire du premier à mes funérailles (juste après le foudroyant “Bradbury Daydream” qui ouvre le ban, suivi des “Goddammit Lovely”, “I Am Not My Father” et “Grateful” qui lui emboîtent le pas). Il faudrait être croque-mort ou broker à Wall Street pour ne pas être bouleversé par ce torrent d’émotion contenue, porté par une interprétation à fleur de derme, et des arrangements d’une délicatesse à rompre toutes les digues. On retrouve à ses côtés une partie des usual suspects déjà présents sur “St. Paul’s Boulevard”, au rang desquels son épouse la chanteuse et violoniste Heather Lynne Horton (dont nous avions chroniqué ICI le récent “Get Me To A Nunnery”), ainsi que l’émérite Will Kimbrough aux guitares, banjo et mandola, Matt Thompson à la basse et John Deaderick aux claviers. Enregistré comme son faux-frère à Chicago (mais dans un autre studio), “East Jesus” est une autre paire de manches. Avec pour principales distinctions de line-up la batterie de Steven Gillis (principalement présente sur ce second volet, dont il s’avère le co-producteur avec Michael), et le violoncelle de Katie Burns (uniquement sur le premier), il s’ouvre sur les héroïques (et springsteeniens en diable) “FCO” et “Berlin At Night”, suivis du lumineux “A Head Full Of Rain”, dont la mélodie et les arrangements n’auraient pas déparé le “16 Lovers Lane” des Australiens Go-Betweens (lesquels commirent en leur temps leur propre “Head Full Of Steam”). La filière New-Jersey/ Ashbury Park récidive avec le céleste “East Jesus”, dont Willy DeVille et Southside Johnny auraient aisément pu faire leur miel. Le violon de Madame et les claviers de Deaderick y fourbissent l’écrin princier qui sied à cette redemption song en forme de mise en garde. “Lost Paradise” est votre Tom Petty mid-tempo rocker de circonstance. Sur un funky-beat aux accents orientalisants, “Quicksand” évoque Cornershop jammant avec Anders Osborne, tandis que l’intro et le pont du mélancolique “Charlie Brown” laissent la part belle au piano et au violon, avant que la rythmique et les chœurs ne viennent leur botter énergiquement le train. Le furibard et tonitruant “Behind The Eight” reprend à son tour des allures d’hymne scénique taillé pour le Boss au crépuscule des seventies, et le mélancolique “The Circus” emprunte le même genre de beat buté et un brin fourbu que ce dernier affectionnait au cours de la décennie suivante, au service de lyrics n’ayant guère à lui envier non plus. Cette collection se referme sur la ballade épique “Whose Life I’m Living”, dont le caractère existentialiste et angoissé renvoie au premier de ces deux disques. So, Michael McDermott might easily be your new favourite singer-songwriter (the only issue being you just don’t know it yet). Avec le “Passage Du Désir” de Johnny Blue Skies, “Lighthouse On The Shore” s’avère en tout cas en passe de postuler au titre de mon album de l’année, et je vous en souhaite bien fraternellement autant.
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, August 6th 2024
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