Blues-Rock |
Pour l’artwork de leur douzième album en vingt ans, nos deux parangons du mauvais goût rural ont encore franchi un palier dans l’outrage (jugez-en)… Le sosie de John Goodman qui affiche sa trogne épanouie auprès du cadavre frit d’un pauvre goret supplicié (faîtes gaffe, les rednecks, L214 pourrait bientôt vous chercher des noises) n’est autre que feu Chris Johnson, promoteur en son temps du Deep Blues Festival de Lake Elmo (Minnesota), et soutien de la première heure du duo. L’histoire ne dit pas si ce sont les effluves de combustible ou l’excès de cholestérol qui eurent raison du personnage, mais toujours est-il que Freddy J IV (on dirait le titre d’un sequel de snuff movie) et Brenn “Patte de Saucisse” Beck (là, on opterait plutôt pour Super Mario ou les Simpsons) lui dédient ce skeud. Que les fans se rassurent, question requiem, nos lascars n’ont guère varié leur ordinaire: sustain, huile de moteur et baston rythmé as usual. À force de hurler pour se faire entendre par-delà ce fracas, le larynx de Freddy accuse plus que jamais ce timbre papier de verre à côté duquel des cadors comme Paul Rodgers (voire même le regretté Lemmy) passeraient presque pour des premiers communiants. Sur un riff pattern évoquant celui du “In The Midnight Hour” de Wilson Pickett, le “Motown Mash” d’ouverture dégorge ainsi de scories en shrapnels, sous les coups de boutoir d’un batteur monomaniaque (dont Thomann apprécie sans doute la consommation effrénée de cymbales consciencieusement fêlées, peaux systématiquement crevées et baguettes réduites en copeaux). Avec leur slide hautement saturée, “Big Momma Shake”, “Black Forest Blues” et “River Picker” rappellent les rodomontades du Zep des débuts (quand Percy Plant prétendait que les femmes à grandes guibolles n’avaient pas d’âme). En grimpant de quelques tons encore, la voix de Freddy rejoint presque les éructations d’un Brian Johnson sur le furieux “Man Down The Road”, et on s’y retrouve au croisement des Groundhogs de “Split” et du Edgar Broughton Band de “Out Demons Out”. Les relativement plus modulés “Turkey Vulture” et “Get Down” évoquent davantage les débuts de Free (la guitare y alternant heavy riffs et chamarrures bluesy-orientalisantes, comme savait le faire aussi celle du regretté Paul Kossoff), avant que le spiraliste “Backyard” ne relance l’escalade. Entre Queens Of The Stone Age et Black Sabbath, “The Desert” autorise à Brenn Beck quelques ruades supplémentaires, tandis que les six cordes de son comparse achèvent de vous fusiller les tympans. Empruntée au Band, leur reprise d”Ophelia” conclut l’affaire sur le piano quasi-ragtime de James Leg (ex-Black Diamond Heavies). Toujours aussi mal léchés, nos croiseurs de la file de gauche n’envisagent manifestement pas de réduire le régime: vers l’infiniment bruyant, et au-delà!
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, May 10th 2024
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