KEVIN REVEYRAND – Yolo

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KEVIN REVEYRAND - Yolo

Vous en connaissez beaucoup, vous, des bassistes français dont le CV aligne des collaborations avec des artistes aussi divers que Robben Ford, Billy Cobham, Charles Aznavour, Laurent Voulzy, Patrick Bruel et Julien Clerc? Et si l’on ajoute à ce palmarès les noms de Francis Lai, Alice Dona, Souad Massi, Paul Personne, Patricia Kaas, Christopher Cross, Mike Stern, Didier Lockwood, Larry Carlton, Michel Portal, Mokhtar Samba et Jean-Félix Lalanne, on trouvera difficilement plus éclectique dans notre Hexagone (à part peut-être Jannik Top). C’est que Kevin Reveyrand est un boulimique de musiques, du genre à avoir fait sien l’adage de Miles Davis: “il n’existe réellement que deux types de musiques: la bonne et la mauvaise”… Pour son quatrième album solo en une décennie (alors qu’il en aligne huit fois plus en collectif sur ce quart de siècle), Kevin s’est entouré pour trois titres d’un orchestre à cordes de 17 musiciens (quinze violons et deux violoncelles, sur des arrangements signés Khalil Chahine), en s’appuyant de bout en bout sur les percussions de Jean-Luc Di Fraya, l’accordéon du Marseillais Christophe Lampidecchia (dont nous avions chroniqué ICI le “French Colors”) et la guitare d’Olivier-Roman Garcia. Fidèle à ses inclinations, il se promène de continent en continent, “Utarizona” et “Nostos Algos” sillonnant les contreforts argentins tout en flirtant avec le flamenco, tandis que la plage titulaire revisite le versant manouche du swing, et que “Too Many Cooks In The Kitchen” et “Ba Ba Iwa” empruntent un bossa beat pour joindre Rio à Buenos Aires. Dès le “Tener Esperanza” d’ouverture, Kevin dessine les contours de son territoire, dont les horizons s’ouvrent de fait aux quatre vents: depuis son introduction limite ambient jusqu’aux arabesques égyptiennes du thème, alternant avec une trame rythmique en forme de saudade, il s’emploie à brouiller les pistes tout en tissant l’écheveau de ses références, y semant au passage des soli délicats et inspirés, privilégiant toujours le lyrisme à la démonstration. Entre Paco de Lucia et Tal Farlow, “Renaissance” et “September 21st” offrent de belles opportunités aux six cordes de Garcia et à l’accordéon de Lampidecchia (réminiscent ici d’Astor Piazzola), sur le tapis soyeux des cordes en embuscade. Peu importe dès lors de tenter d’en identifier la provenance: comme pour le reste de cet album, il suffit d’indiquer que l’on s’y trouve au Sud. La basse, la guitare, l’ukulélé et les percussions mènent la danse de concert sur la biguine acrobatique “Out Of The Box”, avant de conclure sur l’apaisé “A Father’s Rest”, que Kevin exécute seul avec ses quatre cordes, dans le même esprit que le récent “Palace Sessions” de Pascal Lovergne (chroniqué ICI). Un album d’un œcuménisme jubilatoire, et animé d’un irrépressible souffle vital.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, February 2nd 2024

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https://www.youtube.com/watch?v=uaTCIUTRGgg

https://www.youtube.com/watch?v=mHFiPhY0Tto