
On retrouve avec un plaisir non dissimulé le virevoltant groupe Jerry Lease, composé des plus célèbres rouennais du rock’n’roll et de la culture underground de Haute-Normandie, avec un second album intitulé Near Miss! sur l’incontournable label de l’ami Patrick Renassia: Rock Paradise Records. Pour cette suite à Sexy Boy (chroniqué ici) par votre serviteur, le fameux quatuor drivé de main de maître par Olivier Dutordoir, alias Olive Super, a frappé un grand coup et ne s’est pas reposé sur ses premiers lauriers. En effet, donner une suite discographique à Sexy Boy était loin d’être une sinécure et il a fallu que Jerry Lease se creuse les méninges, tout en implorant le Dieu Jerry Lee Lewis, afin de ne pas sombrer dans l’aphorisme du bis repetita, ni tomber dans la facilité qui engendre le désappointement, comme certains musiciens de patronages, d’inaugurations de Castorama en périphérie urbaine et de foire au boudin à Trifouilly-les-Oies, existants pathétiquement grâce à leurs acquis poussiéreux, à la date de péremption dépassée depuis belle lurette, en mal d’inspiration et incapables de se renouveler artistiquement. Avec Jerry Lease c’est tout le contraire. Ils ont su évoluer dans le bon sens, dans la bonne direction, tel l’équilibriste Alexis Gruss se produisant sans filet, tout en restant fidèles à une certaine orthodoxie du rock’n’roll et de ses racines. Réussir avec brio ce grand écart sans retourner sa veste tel l’opportuniste de Jacques Dutronc, n’est pas donné à tout le monde, car il faut faire preuve d’une audace et d’une détermination inouïes, d’un courage de sapeur-pompier domptant les flammes de l’enfer, être sévèrement burné et avoir des adducteurs en chewing-gum, afin d’éviter les petits déjeuners bourbon-croissants et boogie-woogie chez l’ostéopathe.
Déjà, le présent album a été enregistré à Rouen et en grande partie au studio ORB d’Austin, Texas. Oui oui, vous ne rêvez pas, je parle bien d’Austin, au Texas, la Capitale mondiale du blues et du rock’n’roll, la patrie de Calvin Russell et des Fabulous Thunderbirds, la ville de l’incontournable Continental Club à l’odeur de soufre, de sueur et de sang. Dès la première écoute, l’évolution du style, ou plutôt des styles, est bien palpable. Dès We’ll Go Beyond, même si le killer est toujours en ligne de mire avec respect et fidélité, on sent bien que Jerry Lease a mis de la soul dans son rock et du rhythm and blues dans son roll, avec quelques incursions du meilleur effet, chez Hendrix, les Beatles et les Stones et dans les décennies 50, 60 et 70. Même le piano d’Olivier peut parfois avoir des sonorités psychédéliques (You Can’t Be Me). Qualifier cette production exclusivement de disque de rockabilly 50’s serait réducteur, et en deçà de toute objectivité. Le son de l’album est puissant et extraordinairement bien capté, à faire fondre les colombages du centre historique de Rouen. Sur les 12 titres du vinyle, on compte 2 covers, Lawdy Miss Clawdy de Lloyd Price, standard qui sera également repris par Elvis, Little Richard, Fats Domino, Carl Perkins… et Hand Me Down My Walking Cane de James A.Bland, un titre de 1880, qui sera repris par Jerry Lee Lewis dans sa période phare de 1956.
Le remarquable line-up de Jerry Lease n’a pratiquement pas changé, excepté l’ami Franky Wankers (batterie) parti voguer vers de nouveaux horizons, pour laisser place à Tristan Batard et Antoine Michel. On retrouve bien évidemment le sublissime Olivier Dutordoir alias Olive Super (piano-vocal), auteur-compositeur de talent, chanteur à la voix profonde et convaincante, et pianiste fou, dans la lignée de Jerry Lee, Esquerita, Little Richard, Freddie “Fingers” Lee et des grands pianistes normands: Joël Drouin, Nicolas Noël ou encore Gene Clarksville… Sans oublier les excellents et indispensables au projet: Christophe Pelissié (guitares) et Nicolas Piolé (basse). A noter que Near Miss! est proposé en version vinyle (12 titres) et en version CD agrémentée de trois titres en bonus tracks dans la langue de Molière (une fois n’est pas coutume), dont Politiciens, sur l’honnêteté intellectuelle douteuse de nos élites, avec quelques passages de l’hymne National de Rouget de Lisle, après la sulfureuse version reggae de Gainsbourg qui, à l’époque, lui avait valu un œil au beurre-noir, et Je ne peux pas l’oublier, une sorte de mélodrame glamour, thriller-érotico au dénouement incertain et palpitant à la Stephen King, qui aurait pu servir de BO au film “50 Nuances de Grey”. Je le répète inlassablement, avant, à Rouen, c’était les Dogs du regretté Dominique Laboubée qui tenaient le haut du pavé, aujourd’hui, c’est Olivier et Jerry Lease qui s’évertuent à perpétrer un rock’n’roll à la fois sauvage, classieux et sans édulcoration superflue au sein de la Capitale normande, et j’espère au-delà. Album époustouflant à acquérir d’urgence! Dépêchez-vous les amis, car les 100.000 premiers exemplaires se sont arrachés comme des petits pains et les presses s’activent actuellement 24h/24h pour satisfaire la demande omniprésente des teenagers surexcités! INDISPENSABLE…!!!!
Serge SCIBOZ
Paris-Move
PARIS-MOVE, June 13th 2025
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Pour se procurer l’album de Jerry Lease, une seule adresse:
Rock Paradise – c/o Patrick Renassia
42 rue Duranton, 75015 Paris, France
Ou ICI sur le site de Rock Paradise!