GANAFOUL – Roll On

Bad Reputation
Rock
GANAFOUL

On les voit venir de loin, les thèmes du bac de philo. Genre: peut-on être et avoir été? Ou encore: la liberté ou la mort, vaste dilemme.… Voire: les papys ont-ils encore le droit de faire de la résistance? Car une chose est sûre, ils l’ont fait. Et non contents de voir leur nouveau label rééditer leur second album (“Full Speed Ahead” de 1978) – et promettre d’en faire autant avec les deux autres – ils TOURNENT à nouveau, et osent même cette ultime transgression: un nouveau skeud studio, présentant la relecture par l’actuel line-up d’une douzaine de titres issus de leur première incarnation (augmentés de trois bonus live). Ils ont rameuté pour la circonstance rien moins que leur historique batteur, Yves Rothacher (étincelant d’élégance brute de bout en bout), ainsi que Édouard Gonzalez (dit Doudou), également guitariste co-fondateur (avant de migrer vers Factory et Killdozer, puis Colorkode et OK Boomers). Ne manquent à l’appel que Jean-Yves Astier (bassiste originel, désormais planqué aux Antilles) et Bernard Lemoine (supplétif de Rothacher à partir de 1977, hélas disparu en 2006). Balayons d’entrée de jeu tout malentendu: en dépit de (ou grâce à) l’énergie folle qu’il dégage, Ganafoul ne se réduisit jamais à une simple bande de soudards du boogie (comme purent l’être Foghat ou Status Quo en leur temps). En plus de vous secouer le popotin, “After All Those Days”, “Far From Town”, “I’ve Bot It Bad” et le splendide original “Goodbye My Old Friend” sonnent au contraire comme du Elliott Murphy jouant à Chuck Berry. Ses cures successives de blues et de pub-rock (à la tête des remarquables Slim Combo et Buzzmen, chroniqués ICI et ICI) ont fait le plus grand bien à ce bon Jack. Et là où d’aucuns prétendent ouïr ici les prémisses antérieurs du stoner rock  (question de générations, sans doute), on retrouve avec un plaisir non feint les racines des Stones (cette fusion funk AC/DC / Robin Trower que risque le riff du “Free Tomorrow” d’ouverture) jusqu’aux early-Pretenders (ce “Bad Street Boy” en forme de “Brass In Pocket” virilisé), voire le reggae skank “Sometimes”, dans l’esprit du “Kashmir” du Zep. C’est que rétabli dans sa configuration initiale (deux guitares, et lesquelles), Ganafoul renoue à présent avec la fibre héroïque des challengers anglo-saxons de sa jeunesse (Thin Lizzy, Wishbone Ash, Point Blank, you name it…), pour atterrir pile là où un certain Roberto Piazza les découvrit voici bientôt un demi-siècle. En plein crossroads, avant de se lancer sur le périph’ comme des gamins effrontés au volant d’une Simca 1000 aux pistons surgonflés. Il y a bien ce mid-tempo bluesy façon “The Jack” (“Trying So Hard”, avec cette slide qui allait diriger ensuite le parcours de Mr Bon) et cette ballade entre “Wild Horses” et “Tangerine” (“A Slow Song For You”, solo lacrymal inclus), mais les imparables “Let Me Burn (With Rock N’ Roll)”, “Nothing More” et “Low Down Inside” sonnent plus que jamais comme les hymnes selon lesquels ils furent conçus. Un bonheur ne venant jamais seul, ces ruffians ont charpenté le final de trois extraits survitaminés de leur live set. “Full Speed Ahead” aura rarement si bien mérité son titre. Mais qu’ont-ils donc mangé? Il vous en reste?

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, June 28th 2023

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