DOGS – A DIFFERENT KIND – 4 OF A KIND VOL.2

Rock
DOGS - A Different Kind - 4 Of A Kind Vol.2

Quelques mois après la réédition vinyle du Volume 1 “spéciale Disquaire Day” de l’album des Dogs de Rouen “A Of A Kind”, l’indispensable et audacieux label d’Annecy Déviation Records, du passionné Philippe Margueron et de ses fidèles Lieutenants, nous propose le Volume 2. Joli cadeau de Noël en perspective à commander dès à présent au vieux barbu de Laponie, bien mieux qu’un énième roman d’Amélie Nothomb, un pull-over flanqué des rennes du traîneau du Père Noël d’un goût douteux, une paire de chaussettes écossaises Burlington ou un programme minceur Comme J’aime, glorifié à longueur de journée par l’irritant Benjamin Castaldi… On devait déjà à ce jeune mais précieux label Haut-Savoyard, spécialisé dans le rock, la world music, le jazz ou encore l’afro-beat, la résurrection discographique inopinée de Jean-Pierre Kalfon (entre autres…), avec un album merveilleux sorti de nulle part (Méfistofélange, chroniqué ICI et ICI), il récidive dans l’excellence avec ce Vol. 2 des Dogs, agrémenté d’un maxi 45 tours de 5 titres en français (chose plutôt rare pour le gang de Dominique Laboubée qui, comme Little Bob (Story ou pas), a toujours privilégié le rock dans la langue de Shakespeare, peut-être à cause de la proximité géographique de Rouen et du Havre avec l’Angleterre).
Cependant, sans vouloir jouer les rabat-joie de service ni les empêcheurs de tourner en rond, je me souviens très bien, même si aujourd’hui plus personne n’en fait cas, que la presse dite spécialisée ou non, avait été frileuse et timorée à l’égard de ces deux albums des Dogs sortis quasiment coup sur coup, soulignant je cite: “l’accent franchouillard de Dominique et le chanteur maniéré, voire chichiteux qu’il reflétait!” Véridique, je n’invente rien! Certes, en 1999, la mode n’était plus au rock électrique et aux guitares incisives des Dogs, mais quand même… L’outrecuidance paroxysmique de certains journaleux et leur amnésie partielle et volontaire m’avaient fait sortir de mes gonds, retrousser les babines et montrer les crocs. J’étais devenu un American Pit Bull Terrier, prêt à mordre. Même Little Bob avait morflé à cette période, avant que la légende du Havre revienne au premier plan et dans la lumière, en remettant définitivement les pendules à l’heure. A l’époque, pour parler de ces deux albums 4 Of A Kind (Night & Day) des Dogs, pas plus de quelques lignes insipides dans la presse-rock que je lisais assidument et quelques entrefilets dans la presse généraliste, noyés entre la rubrique des chiens écrasés (sans mauvais jeu de mots!), les courbes de la Bourse en quasi direct live du Palais Brongniart et les pronostics du PMU des prochaines courses de canassons à Chantilly. Le minimum syndical en somme, même en deçà des préconisations unilatérales de la CGT.  Le rock’n’roll des Dogs n’était plus en odeur de sainteté et médiatiquement, les mouches avaient changé d’âne et la cabane était tombée sur le chien, ou plutôt sur les chiens. Mis à part Philippe Manœuvre qui ouvrit les portes de son émission Top Bab (Canal Jimmy) en 2000 à Dominique Laboubée, puis d’un Rock Press Club spécial David Bowie en 2001, avec notamment une version survoltée de Suffragette City par nos Dogs, sans oublier l’émission Des Mots De Minuit de Frédéric Taddéï sur France 2 qui suivra, avec notamment une version live totalement débridée de Dreadful Times, les médias ne se bousculaient pas aux portillons pour parler des Dogs, exceptés quelques irréductibles et autres inflexibles. Ils avaient quasiment tous capitulé, rendu les armes, succombé au chant des sirènes tel Ulysse dans son Odyssée et courbé l’échine face aux modes du moment, comme des petits roitelets serviles, sans penser une seule seconde que le rock était immortel et qu’il allait bientôt renaître une énième fois de ses cendres, après avoir traversé bien des cataclysmes, des boulevards de Memphis au funeste club des 27, en passant par les artères venteuses de Rouen et du Havre, des ports de Detroit et de Liverpool, de la rue Drouot à la Fontaine des Innocents, du maudit taxi d’Eddie Cochran aux WC beurre de cacahuètes de Graceland une nuit noire d’ébène de 1977… Je n’ose imaginer ces piètres scribouillards du rock, en 1917 au Chemin des Dames, un casque de poilu sur la tête ou lors de la bataille de Camerone au Mexique, coiffés du képi blanc de la Légion Etrangère. Encore aujourd’hui, je garde un chien de ma chienne envers ces conformistes nauséeux et opportunistes et je les regarde inlassablement en chiens de faïence.
Heureusement, comme Bob Piazza, Dominique et les Dogs ne sont pas restés inertes à dormir en chien de fusil dans leurs niches douillettes de Mont-Saint-Aignan, et en suant sang et eau, sans-même le soutien moral et logistique de 30 Millions d’Amis ou de la SPA, feront définitivement fermer leurs bouches à tous ces ostrogoths, ces mêmes personnages immoraux qui dorénavant et sans sourciller, font brusquement volte-face, fanfaronnent et portent aux nues ces deux rééditions du groupe de Rouen, en faisant abstraction du passé, de leurs errements indélicats, de leur prose assassine et inique et de leurs moult inepties d’antan. Les Dogs, quel que soit le line-up et la période, sont intouchables. Fustiger injustement Dominique Laboubée, c’est comme s’attaquer sans vergogne au patrimoine rock et culturel français. C’est s’attaquer à la Tour Eiffel, au musée du Louvre, à l’Obélisque de Louxor, au Général de Gaulle, à Gabin, à Delon, aux flonflons du 14 juillet, aux pinacles de la façade enchanteresse du Parlement de Normandie ou encore à la cathédrale Notre-Dame de Rouen par son versant le plus vertigineux. Bien évidemment, je soutiens ardemment et sans aucune réserve Amnesty International, les Conventions de Genève, la Convention contre la torture des Nations Unies, mais avec ces pseudos rock-critic ou journaleux sans envergure, je suis partisan de remettre au goût du jour, une certaine forme de torture. Mais attention, pas une torture physique, pas d’écartèlements Place de Grève comme sous l’ancien régime, non, une torture cérébrale, beaucoup plus sophistiquée et subtile, sans geysers d’hémoglobines repeignant l’asphalte et les caniveaux. Je ne sais pas moi, par exemple les forcer à lire le dernier best-seller de Sarkozy ou les mémoires de Michel Drucker et d’en rédiger dans les plus brefs délais une explication de texte de 20 pages, en écriture Gothique et en alexandrins. Personnellement, j’étais favorable qu’on les force à écouter en boucle et sans interruption, l’œuvre complète de Carla Bruni et en particulier lorsque la diva turinoise reprend Highway To Hell d’AC/DC, au risque de faire se retourner Bon Scott dans sa tombe et que Angus Young raccroche définitivement sa Gibson SG au clou, mais le Président de la Cour Européenne des Droits de l’Homme s’est formellement opposé à ma requête jugée trop inhumaine…
En 1999, les planètes étaient de nouveau alignées pour les Dogs qui sortaient le Vol. 2 de 4 Of A Kind, avec une superbe pochette qui n’était pas sans rappeler celle de Too Much Class For The Neighbourhood de 1982, Rickenbacker en moins… Comme pour le Vol. 1, le line-up des Dogs se compose de Dominique Laboubée (chant-guitare-harmonica), de Laurent Ciron (guitare-chant), de Christian Rosset (basse) et de Bruno Lefaivre (batterie). Autant dire le nec plus ultra du rock hexagonal, une dream team incroyable, à l’ère où le formatage tous azimuts commençait à faire des ravages (irréversibles?), à gangréner cette utopie collective et où le rock était considéré par certains, comme un péché de jeunesse, voire le 8ème des 7 péchés capitaux définis par Thomas d’Aquin, qui, au sein de son abbaye pontificale et au regard de sa culture débordante, de sa philosophie et de son ouverture d’esprit, lui qui pensait que le bonheur est le but de l’existence, aurait pu être sans conteste un fan inconditionnel des Dogs et sonner le tocsin aux riffs de Little Johnny Jet ou de M.A.U.R.E.E.N.
La face A du vinyle démarre en trombe par Who’s Wrong – Who’s Right, un titre co-signé par Dominique Laboubée et Laurent Ciron. Suivi de The Story Of The Dogs teinté de nostalgie, morceau dans lequel Dominique rend hommage aux Kingsnakes à King Bob, aux Roadrunners, aux City Kids, Fixed-Up… Back To Bali, Hurricane Judith qui n’est pas une reprise d’Aerosmith, mais une chanson tirée de la série télévisée américaine Dream On (Canal Jimmy) de David Crane et Marta Kauffman avec Wendie Malick dans le rôle de Judith. L’album de 9 titres se terminant par 2 bonus Tracks live: “Walkin’ Shadows” (Phonogram 1980) à l’époque où les Dogs faisaient partie de l’écurie Philips et du French Rock Mania, avec Bijou, Go-Go Pigalles, Paris-Foxy, Ciné Palace… et “I’m Just Losin That Girl”, titre de Legendary Lovers de 1983. Le maxi 45 tours propose quant à lui 5 titres en français, dont “Jenny Jane”, qui en 1998 se trouvait en CD single accouplé au Vol. 1 de 4 Of A Kind. On citera également “La Belle Saison” qui est en quelque sorte l’hymne philosophique de Dominique et une version live vitaminée de “Fier De Ne Rien Faire” co-signée par Laboubée/ Eric Tandy, frère de Gilles Tandy (La Colère Monte!), chanteur enragé des Olivensteins, autre groupe majeur de Rouen. Et dire que quand ce Vol. 2 des Dogs est sorti en 1999, nous étions à mille lieues d’imaginer qu’il s’agissait du dernier album studio des Dogs, une sorte de testament spirituel et rock’n’rollesque, puisque malheureusement Dominique Laboubée nous quittait subitement le 9 octobre 2002, à Worcester (Massachusetts) lors d’une tournée du groupe aux Etats-Unis, en laissant un héritage musical considérable. Il n’avait que 45 ans et débordait de projets et de rêves chimériques inassouvis. C’était une aubaine inespérée pour la France de compter dans ses rangs un groupe comme les Dogs et un musicien-chanteur-auteur-compositeur-mélodiste extraordinaire tel que Dominique, n’en déplaise à John Lennon et à sa formule maladroite et erronée: “le rock français, c’est comme le vin anglais”. Quoiqu’il en soit, merci à Laurent Ciron, Christian Rosset et Bruno Lefaivre, qui indubitablement possédaient le profil, le talent, l’ADN et la philosophie d’une certaine idée du rock et de l’esthétisme, pour être un Dogs, et pour garder sempiternellement la flamme allumée, les chiens ne font pas des chats… Et merci au label Déviation Records pour son travail dantesque et pour que jamais on oublie Dominique et les Dogs. Quant à moi, je ne vais certainement pas donner ma part au chien et je vais réécouter inlassablement la réédition vinyle de 4 Of A Kind Vol 2.
XXL et INDISPENSABLE…!!!! Existe également en version CD regroupant les Vol. 1 et 2, ainsi que les titres en français. “Bonsoir, on s’appelle les Dogs, on vient de Rouen en Normandie.” Rien que de me remémorer cette entrée en matière chère à Dominique, qui plantait le décor d’un rock jubilatoire, les prémices d’aboiements furibonds et frénétiques d’une vie de chien, de chien à jamais sans collier, j’en ai la chair de poule, le pouls qui s’accélère et les yeux qui pleurent… Là-haut dans ma chambre, j’attends la belle saison, là-haut dans ma chambre, je ne vois pas l’horizon, du temps comme du reste, je perds toute notion…

Serge SCIBOZ
Paris-Move

PARIS-MOVE, November 18th 2023

::::::::::::::::::::::::

Site web du label Deviation Records

Tracklisting complet:

DISQUE 1 / 33 RPM

Face A – 18:54

A1. Who’s wrong – Who’s right ? 03:50
A2. The Story of the Dogs 05:06
A3. Back to Bali 03:43
A4. Hurricane Judith 02:20
A5. Never Stop 03:24

Face B – 14:18

B1. It’s about Time 02:50
B2. Rock’n Roll Lesson n°1 05:28
B3. Walkin’ Shadows (Live) 04:08
B4. I’m just losing that girl (Live) 01:47

DISQUE 2 / 45 RPM

Face A – 07:21

A1 – Jenny Jane 03:27
A2 – Entre Deux Feux 03:54

Face B – 08:46

B1 – La Belle Saison 02:51
B2 – Tout ce qu’elle veut 03:18
B3 – Fier de ne rien faire ( Live) 02:37

Et un Live : DOGS Live à La Locomotive (Paris 1992):