SOUTHERN AVENUE – Family

Alligator / Socadisc
Gospel, Rhythm 'n' Blues, Soul
SOUTHERN AVENUE - Family

Ah, Memphis… Depuis que Chuck Berry la désigna pour confluent capital entre la plupart des musiques du Sud des USA (peu après que Sam Phillips y eut découvert un certain Elvis Aaron Presley), la ville jouit d’un statut à part parmi les diverses scènes musicales nord-américaines. De Stax à l’International Blues Challenge, et de Beale Street aux Royal Studios du non moins légendaire Willie Mitchell, ce port fluvial sur le Mississippi n’a cessé d’irriguer nos musiques dites actuelles. Howlin’ Wolf, Rufus Thomas, Al Green, Isaac Hayes, Ann Peebles, Booker T. & The MGs ou encore les Box Tops (suivis de Big Star): tous ces talents (et bien d’autres) surgirent en effet de ce creuset prolifique. Et bien que la plupart de ces héros aient depuis passé la main, le chaudron bouillonne encore, comme en témoigne à présent l’irruption de ce quatuor. Fondé par les sœurs Jackson (sans relation avec les Michael, Marlon, Janet, Tito et Jermaine de Detroit) et le guitariste israélien Ori Naftaly, ce family band au plein sens du terme (Ori ayant épousé la lead singer Tierinii) s’est agrégé dès 2015, pour publier un premier album éponyme en 2017 sur le label Stax réactivé (en tant que département du Concord Group), avant de récidiver sous les mêmes auspices deux ans plus tard (“Keep On”), et enfin chez Renew Records en 2021 (“Be The Love You Want”). Avec le bassiste Blake Rhea, le claviériste Jeremy Powell (ex-Ghost Town Blues Band, chroniqué ICI et ICI) et rien moins que le légendaire Luther Dickinson (North Mississippi All Stars, Black Crowes, à la basse sur quatre titres), les frangines Ava (chant, percussions, violon) et Tikyra (batterie, chant) livrent ici 14 originaux de leurs plumes mêlées, aux confins du blues, de la soul et de leur héritage gospel. Et ce sont bien les atouts d’un tel cocktail que confirme d’emblée le “Long Is The Road” introductif: les voix mêlées des sisters et la guitare prolixe d’Ory s’y appuient sur une rythmique souple, chaloupée et typiquement sudiste. C’est entre la soul infusée de gospel de Sam & Dave et celle des Staples Singers que se situent “Upside” et “Sisters”, le lead vocal de Tierinii y rappelant avec bonheur celui de la jeune Mavis d’il y a plus d’un demi-siècle, tandis que le chant choral de l’effréné “Found A Friend In You” s’adosse manifestement sur des années de pratique à l’église (handclaps à l’appui, tandis qu’Ava y use de son archet alerte). C’est vers Smokey Robinson et Curtis Mayfield que lorgnent ensuite le funky “Gotta Keep The Love” et le langoureux “So Much Love” (genre de ballade soulful à faire se damner Lenny Kravitz et Michael Jackson eux-mêmes). La set-list est ponctuée de trois brefs intermèdes chantés (“Family”, “Kept On Movin’ On” et “Believe”), et d’irrésistibles hollers tels que “Late Night Get Down”, “Rum Boogie” “Back To What Feels Right”, “Flying” et “We Are” célèbrent l’irréductible intrication entre le Memphis blues de Howlin’ Wolf et l’héritage des chants de travail. Accouplées à l’orgue Hammond et au piano de Jeremy Powell, la slide d’Ori et la rythmique salace y déploient le type de nasse poisseuse et parfumée que perpétuaient jadis les Swampers à Muscle Shoals. Capté aux mythiques Royal Studios de Memphis, ce disque témoigne de l’irrépressible ascension d’une formation appelée à laisser son empreinte dans la longue histoire des musiques afro-américaines. Imaginez les Pointer Sisters en totale épiphanie roots!

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, March 17th 2025

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