THE PAWN SHOP SAINTS – Weeds

DollyRocker Records
Americana
THE PAWN SHOP SAINTS - Weeds

Quatrième album en onze ans pour ce véhicule des chansons de Jeb Barry (chant, guitares, basse, banjo, orgue, harmonica), toujours flanqué des fidèles John Pisano (batterie, percussions et chœurs) et Michael O’ Neill (guitares et chœurs), ainsi que de la violoniste Amy Attias et de l’accordéoniste Tony Pisano. Toujours basés en Nouvelle-Angleterre, dans le Massachusetts rural, nos Saints du Mont-de-Piété (dont nous avions chroniqué les deux précédentes livraisons ICI et ICI) se présentent cette fois d’humeur aussi agreste que sépulcrale. S’il échoue dans sa tentative revendiquée d’écrire un titre dans la veine du Alex Chilton période Big Star, c’est pour aboutir avec “Chelsea Off My Mind” à une quasi-incarnation de Jonathan Richman. “Il faut viser la lune”, disait l’autre, “car si on la rate, il reste toujours une chance d’atteindre les étoiles“. Preuve est donc établie que l’inverse est également possible. La plage titulaire persiste dans la mélancolie, et en dépit de sa twangy guitar, on y ressent l’impression d’ouïr Elliott Smith reprenant Daniel Johnston (entre couteau et diabète aigu). Avec son banjo façon “For The Turnstiles”, “Southern Drawl In Heaven” est un croisement entre ce dernier et le ‘Truck Stop Girl” de Little Feat: le genre de truc que sifflotent les ivrognes au cœur brisé, avant de se jeter du pont depuis lequel ils urinent à la lune… On poursuit dans la gaudriole avec “Generation Lockdown”, qui traite avec gravité des tueries récurrentes dans les écoles U.S. Faut dire qu’étant lui même instituteur dans le civil, Jeb sait un peu de quoi il retourne… “We could change this, but we won’t/ We could stop it, but we don’t” conclut-il, à l’encontre manifeste de la NRA. On se rapproche davantage encore du Neil Young acoustique avec “The Covid Unit” rappelant autant ce vieux lanceur d’alerte de David Peel que le “Old Man” de “Harvest”, et dans la même veine, “Miss June” aborde l’extrême solitude dans laquelle nous quittèrent nombre de nos aînés, isolés en période de confinement. “James” traite du deuil imminent d’un ami d’enfance, et des sentiments confus de culpabilité égoïste qu’en suscite l’attente impuissante. “The War” et “Memorial Day” évoquent les traumas des vétérans de guerre de retour au pays, aussi incapables d’en parler que de les surmonter. Toujours au registre des réjouissances, “Preacher” et “All Girls Break Hearts” (transcendé par le violon d’Amy Attias) recensent les stigmates que provoquent également maintes ruptures amoureuses, tandis que “Twine” discourt en filigrane de la perte de l’un des héros de Jeb: John Prine. Seule touche fantaisiste du lot, “Baby Got Drunk” ne se révèle pas plus particulièrement enjouée pour autant. En onze vignettes aussi directes que sobrement arrangées, Barry et ses amis frappent ainsi au cœur autant qu’à l’esprit, avec ce spleen poisseux d’où sourdent parfois quelques éclaircies ténues. Comme le chante encore notre ami Jef Kino: “Parfois la vie est une chienne de vie”…

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, July 11th 2023

::::::::::::::::::::::::::

Un album qui sera à commander ICI

Les albums précédents sont à commander ICI