SUE FOLEY – Live In Austin Vol.1

Guitar Woman Records
Blues
SUE FOLEY - Live In Austin Vol.1

C’est peut-être une coïncidence, mais sur la cover de cet album, Sue Foley adopte, dans le feu de l’action, la même posture que le jeune Pete Townshend sur l’affiche “Maximum R&B At The Marquee” (incluse dans la pochette de “Live At Leeds”, et dans le même glorieux noir et blanc). N’empêche que la similitude saute aux yeux, suggérant d’emblée la même promesse de high energy live que sur le faux bootleg en question. Et que celle-ci arbore une Fender Telecaster (sa fameuse Pinky, qui donna son titre à son dernier album studio, chroniqué ICI), alors que ce dernier en faisait autant d’une Rickenbacker, ne change rien à l’affaire. Captée le 19 mai dernier au Continental Club d’Austin (sa véritable patrie d’adoption), Miss Sue ouvre le ban sans attendre avec son propre “New Used Car”, dont les refrains en twisting beat ne tardent pas à offrir à la dite Pinky l’occasion de deux estocades aussi ébouriffantes que celles que proposait un certain SRV, quand la jeune Foley débarqua en ville pour la première fois en 1991. Elle cite le “Tequila” des Champs sur sa coda, avant que “Walkin’ Home” n’embraye sur un Texas diddley beat, pour confirmer que la red haired woman n’a rien à envier non plus au défunt Mick Green (lead & rhythm guitarist des Pirates de Johnny Kidd, qui vulgarisa ce jeu mixte entre ces deux fonctions, dont s’inspira le tout autant regretté Wilko Johnson). “Highwayside” emprunte ensuite la touche hillbilly-rock que Sue affectionne également (ne fut-elle pas proche de Wayne Hancock, apôtre du genre?). Les choristes Angela Miller et Lauren Cervantes lui prodiguent alors la touche idoine, avant que le “Howlin’ For My Darling” que Willie Dixon co-signa avec Howlin’ Wolf ne nous ramène au blues urbain le plus éperdu. Je ne puis m’empêcher d’y repenser à la sanction que lui administra voici une trentaine d’années un critique belge parfois quelque peu obtus, qui prétendait que cette jeune femme ne disposait pas de la voix nécessaire pour chanter ce répertoire – à genoux, André! Elle enchaîne avec le “Queen Bee” démarqué de Slim Harpo (comme le démontèrent les Fab T-Birds, Mike Morgan et consorts, le swamp blues demeure populaire dans le Lone Star State). Dans la veine de Earl Hooker, Otis Rush et Magic Sam, l’instrumental rumba en mineur “Hooked On Love” tue littéralement le match: tout en reverb et sustain, la maîtrise du jeu de Sue y étincelle comme jamais, tandis que ses trois comparses rythmiques (le bassiste Jon Penner et le batteur Corey Keller, augmentés pour l’occasion du vétéran de la scène d’Austin, Derek O’ Brien en personne) lui fournissent le tapis roulant ad hoc. Inscrite comme tant d’autres au Zimmerman fan club, elle en reprend l’acerbe “Positively 4th Street” (où ses délicats entrelacs de cordes avec celles de O’ Brien font merveille, tandis que son chant en fait autant), solo bloomfieldien en prime (comment se fait-il que l’on ne mentionne plus Mike Bloomfield nulle part?), avant son titre fétiche, le “Me And My Chauffeur” de Memphis Minnie (dont Muddy Waters usa pour son propre “I Can’t Be Satisfied”). Sur la trame du “Boogie Chillun” de John Lee Hooker, Sue écrivit pour sa part le mutin “Better”, dont elle délivre ici une version irrésistible, avant de conclure ce premier set sur une improbable cover du “High Roller” de Cheap Trick (sans doute un souvenir de ses propres pyjama parties entre teen-agers). Les choristes sont de retour, et on n’a guère de difficulté à ressentir l’esprit de bamboula échevelée qui y préside. Produit par l’ultra-compétent Mike Flanigin, un live sans retouches ni tripatouillage, as raw as it gets. On s’y retrouve coude à coude au cœur d’une assistance ravie, à danser au milieu du salon et vociférer entre chaque titre. Vivement le “Vol. 2”, que l’on puisse demander des rappels!

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, November 1st 2023

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