RYAN HARTT – Be About It!

Far-Tone Records
Blues
RYAN HARTT - Be About It!

Originaire de Nouvelle-Angleterre, l’harmoniciste Ryan Hartt fit d’abord ses classes en Californie, au contact de géants de la West-Coast tels que Lynwood Slim (aka Richard Duran), Rick Holstrom, Junior Watson et Rod Piazza.  De retour en son État natal au début de ce millénaire, il ne tarda pas à y former son propre combo, les Blue Hearts, à la tête desquels il a réalisé trois albums entre 2003 et  2012 (sur le même label que celui-ci), tout en remportant quelques prix à l’échelle de la scène locale (qu’il représenta à trois reprises lors de l’annuel International Blues Challenge de Memphis). Pour son premier album solo per se, il s’entoure d’une section rythmique top-notch (Nick Toscano aux baguettes et Jeffrey Berg à la basse, tous deux issus de The Wicked Lo-Down, chroniqué ICI), ainsi que d’un brelan de guitaristes (et d’un pianiste pour quelques titres). Si ce bon Ryan ne signe “que” cinq compos originales sur les onze plages proposées, son chant et son harmonica émaillent ce disque d’une joviale personnalité. Il se montre ainsi brillant au chromatique dès le “Breakin’ Even” d’ouverture, où le gratteur Jad Tariq ne se montre pas manchot non plus. C’est Berg (par ailleurs guitariste émérite chez ses comparses du Lo-Down) qui s’octroie le solo de six cordes sur “Queen Of Everything”, malicieux mambo dans la veine des premiers T-Birds où il cède la basse à un certain Mike Law, tandis que le patron s’y taille à nouveau la part du lion. Chanteur et parolier savoureux (“she drives around in a big car, I have to ride the bus/ anything that I get, she says it’s for both of us“), notre homme Ryan ne s’en laisse pas non plus conter dès qu’il embouche son ruine-babines, et l’on sent qu’il a parfaitement assimilé le Texas-style de stylistes tels que Lee McBee et Kim Wilson. Ce que confirme à l’évidence l’enlevé “Old Habits Die Hard” au pattern louisianais, où Tariq sévit à nouveau, tout comme sur le jump-swing instrumental “All Night Long” (de Joe Houston) qui embraye. Le genre de barouf à faire tourner les robes à crinoline sur la piste, où l’harmo pallie à lui seul une entière section de cuivres. Il n’est que temps de calmer le jeu, et c’est la NOLA ballad “Nothing As Sweet As You” (de Dave Bartholomew) qui s’y colle. Le temps des covers étant venu, Ryan et ses hommes entament ensuite “I Wonder Why” de Mel London, introduisant un nouveau guitar slinger en la personne d’un certain Nick Adams, sorte de synthèse pétrifiante entre Ronnie Earl et Duke Robillard. Pour ne pas demeurer en reste, le patron y ranime pour sa part le fantôme de Paul Butterfield (ce qui vous indique par quelle plage débuter en priorité l’écoute de cette sélection). Les toms de Toscano rythment ensuite l’exotique instrumental “Hawaïan War Chant” (dont les credits désignent pour auteur le Prince Leleiohoku), avant qu’un nouvel original de Hartt, le non moins sagace et groovy “That’s Right, You’re Wrong”, n’offre un nouveau cameo au terrassant Adams, tandis que l’humour tongue-in-cheek de Ryan s’y exprime avec la même verve que celle qu’il emploie sur son instrument. C’est ce même Mississippi saxophone qui introduit ensuite le slow blues “Lonely Hour”, où se déploie au chromatique une palette digne de celle du regretté William Clarke. Brooks Milgate s’y fend d’un magistral solo sur ses ivoires, tandis que les six cordes y incombent cette fois à Tom Ferraro. Second sommet manifeste d’un album déjà de très haute tenue, que Ryan clôt en beauté avec deux ultimes reprises: le “I Can’t Stop It” de Dave Bartholomew (en jump effréné, où la guitare de Ferraro et l’harmo du boss escaladent les pendrillons) et le placide et apaisé “You Belong To Me” de Pee Wee King. Un disque où la virtuosité ne verse jamais dans l’esbroufe, et où le talent musical ne se départit jamais d’un clin d’œil complice. Foncez!

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, October 27th 2025

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