THE WICKED LO-DOWN – Out Of Line

Gulf Coast Records
Blues
THE WICKED LO-DOWN - Out Of Line

De 1988 à 1994, les Red Devils, roots & roll band de L.A., dessinèrent une trajectoire météorique qui les inscrivit durablement au panthéon du West-Coast blues. Si l’on n’en retient désormais plus guère que la personnalité flamboyante de leur leader (l’harmoniciste prodige Lester Butler, prématurément disparu à 38 ans), on est aussi en devoir d’ajouter à leur postérité leur inénarrable premier album, “Live At King King” (incandescence captée dans leur club de prédilection, et produite par Rick Rubin), ainsi que leur apocryphe participation à la tentative impromptue d’album blues d’un Mick Jagger tombé sous leur charme (et toujours disponible via les circuits parallèles). Nés en tant que projet parallèle des fameux Blasters, les Red Devils (qui cumulèrent à leurs débuts le pianiste Gene Taylor et le co-leader des précités, Dave Alvin) révélèrent aussi un jeune guitariste émérite, Paul Size (surnommé alors “The Kid”). C’est précisément ce dernier que l’on retrouve au sein de cette nouvelle formation, fondée en 2020 en Nouvelle-Angleterre. Constitué d’un all-star five piece (chacun de ses membres alignant un curriculum vitae long comme le bras), ce gang propose à présent son second album, sur le label de Mike Zito. Fort d’accointances avec Curtis Salgado, James Harman, Rick Estrin, Jason Ricci, Ronnie Earl et Duke Robillard, leur frontman Nick David combine un coffre de blues shouter avec un sérieux talent d’harmoniciste, et le reste de la bande accuse le même niveau de références. Dès le “Kill Me Or Keep Me” d’ouverture, on perçoit la filiation avec les origines texanes de Size, tandis que “Marchin’ On” et “Dime Store Darling” en font autant avec John Fogerty et les Sudistes de Skynyrd (inutile de préciser que les guitares y fusent comme à la parade). Comme son titre le suggère, le musclé mid-tempo “Bogeyman” exhale un parfum réminiscent des Blasters, et les six cordes de Size s’y mesurent brillamment à celles de l’autre guitariste, Jeffrey Berg. Leur nouveau patron de label passe la tête (et le manche) sur la plage titulaire, un Texas rockin’ number dans la veine des premiers T-Birds. Comme l’indique son titre, “The Wildest One (Lester’s Boogie)” est un hommage à feu Lester Butler, sur un riff entêtant proche de ceux de “Feelin’ Good” et “Boogie Chillun”. Sans plagier le jeu de ce dernier, l’harmo de Nick s’y montre néanmoins à la hauteur de l’enjeu, tandis que Paul s’y trouve d’évidence en territoire de connaissance. Autre voisin notoire, Monster Mike Welch (qui signe également les liner-notes de l’album) preste sa slide guitar à un “Toxic” qui fleure son pesant de Nighthawks. Nos amis s’approprient ensuite “Action Woman” (sans relation avec le titre éponyme de The Litter), avant la seule plage lente de cette série, le magistral “If I” (minor key dans la veine du “Double Trouble” d’Otis Rush, où s’illustre à l’évidence la guitare de Size). Texas-shuffle  dans la veine de Mike Morgan, Anson Funderburgh et consorts, “You Don’t Know Me” est un nouveau prétexte à bras de fer entre guitares et harmo, tandis que la section rythmique (Brad Hallen, bass & Nick Toscano, drums) démontre tout ce qu’elle a assimilé de l’école Antone’s. Signé Paul Size, l’instrumental “Vanna Be” est une torpille comme en expédiait Freddie King au début de sa carrière, et “Put Up With You”, un mambo-blues chaloupé de bon aloi (à nouveau récurrent d’Otis Rush). Ces forbans concluent sur une adaptation enlevée du “I Just Can’t Make It” de Hound Dog Taylor. Chant passé à l’harmonica microphone et slide électrique fumante à l’appui, on y songe bien entendu à Elmore James, ainsi qu’à ses diverses déclinaisons par Jeremy Spencer aux débuts de Fleetwood Mac. Bref, un nouveau combo de premier ordre à ajouter à la longue lignée des incendiaires de planches, et un album qui réjouira assurément tout amateur sincère du genre.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, March 17th 2024

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