ROSENTHAL – The Other Side Of Life

Me & The Rose Production
Pub Rock, Rock
ROSENTHAL - The Other Side Of Life

J’ignore si, comme le chantait Odeurs en 1980, “dans chaque homme il y a un porc latent / et dans chaque port, il y a une femme qui attend”, mais il faut bien reconnaître aux embruns portuaires quelques vertus bénéfiques pour les groupes de rock. Qu’il s’agisse du Havre (Little Bob), de Canvey Island (Dr. Feelgood, Eddie & The Hot Rods) ou de Newcastle (Eric Burdon & The Animals), on y dénombre en effet maints dépositaires de ce Maximum R&B spirit qu’arboraient les High Numbers à leurs débuts. Formé à l’aube de l’accession de Mitterrand aux plus hautes fonctions (et bien que sans rapport avec l’événement), ROSENTHAL est de Dunkerque, et toujours actif de nos jours (contrairement à ce dernier). Tout en vous narrant leur parcours, nous vantions naguère les vertus de leur précédent opus (ICI), et les revoici avec le troisième volet d’une trilogie entamée voici bientôt trois ans avec “Rock!”, suivi l’année dernière de “Simply 3 Chords In My Heart”. Comme son glorieux prédécesseur, ce nouvel opus propose pas moins de 21 titres (pour 17 originaux signés de leur chanteur, guitariste, harmoniciste et claviériste, Jean-Louis Gadea). S’ouvrant sur le puissant “Obedient Man” (porté par des power-chords de cuivres et guitare mêlés) dont les paroles renvoient presque aux diatribes du Trust de “Répression”, le ton radical et revendicatif de l’album est certes donné, mais la veine peine pub-rock-garage de la formation n’en persiste pas moins. Ainsi de ce “Gabardine”, reprenant à s’y méprendre la veine du Wilko Johnson de “Sneakin’ Suspicion” (dans l’exécution tranchante de sa guitare rythmique comme dans ses paroles), et où la basse de Christine Gadea se fend de breaks jubilatoires. La facture des Who croise également celle du Clash de “White Riot” sur “1, 2, 3, 4 We Want More”, et “Help Me Baby” celle des Godfathers de “She Gives Me Love” (tricot de break-beats furieux inclus). Jean-Louis assume ses origines basques au fil d’un “No Tengas Miedo” chanté dans la langue de Cervantès, et asséné sur un riff massif digne d’AC/DC. Entre le Stiv Bators de “Disconnected” et Stiff Little Fingers, l’irrépressible “Don’t Open The Door” combine accents pop et poing américain. Plus early-Who que nature, “You Got So Strong” et “Tu N’Sais Qu’Danser” n’auraient pas davantage déparé le premier album de Jam que le “Give ‘Em Enough Rope” du Clash, tandis que “Elle Est Partie” renvoie au temps doré de Ronnie Bird. En dépit de son orgue millésimé, “Let Roll The Mods” s’apparente davantage au Clash qu’aux Merton Parkas, et malgré son titre, “Where Is My Mind” a davantage à voir avec Cornershop et les Small Faces qu’avec les Pixies (de même que “Back To The Sun” avec les Remains). Sur un riff voisin de celui du “Can’t You Hear Me Knocking” des Stones, “Houba Combo” déploie un funk atmosphérique où le saxophone de Pascal Loyer et la section rythmique tirent leur épingle du jeu. Le registre des covers résonne dès lors comme un viatique: “Roadrunner” de Bo Diddley, “Cry To Me” de Solomon Burke (repris en son temps par nos regrettés Pretty Things) et “Baby Please Don’t Go” de Big Joe Williams (adoucissant à la sauce swing tribal celle des Them du gros Van Morrison). 21 titres représentent certes de nos jours un copieux menu à s’enfiler, mais leur concision, leur vigueur et leur éclectisme en garantissent néanmoins le plaisir de l’écoute.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, March 3rd 2024

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