POKEY LAFARGE – Rhumba Country

New West Records
Rhythm 'n' Blues
POKEY LAFARGE - Rhumba Country

Autant le confesser d’emblée: j’ai une sainte horreur des culs-bénis et autres grenouilles de fonds baptismaux. Aussi, en découvrant (à la lecture de son interview parue sur le site émérite La Face B, suite à son récent showcase parisien) que Andrew Heissier (c’est son véritable état civil) avait rencontré Jésus en janvier 2019, cette révélation m’a laissé de marbre. En effet, à la même période exactement, j’ai pour ma part rencontré Bernard et Louise, et ça ne m’a pas fait plus d’effet que cela. Bref, hormis l’excellente boutade de Jonathan Richman en réponse à la proposition d’un de ses fans (un certain John Lydon) de lui organiser une mini-tournée anglaise en 1977 (“Je ne pourrai pas, j’entre en religion”), les illuminations sur la route de Damas et autres buissons ardents et épiphanies diverses, très peu pour moi. De nos jours, les réseaux sociaux remplissent avec une efficacité plus performante encore la fonction d’opium du peuple, et il n’est donc plus nécessaire de mêler les effluves d’encens à celles du pastaga. En un mot comme en cent (et pour paraphraser le titre du dernier Toronzo Cannon, chroniqué ICI): “Shut up and play”… Quant à la rubrique matrimoniale (ce bon Pokey a divorcé de sa régulière pour épouser sa choriste – bon Dieu, Ike Turner, Renaud Séchan et Eddie Barclay t’ont devancé de près de 70 ans, mon pauvre…), on s’en contrefiche à peu près autant. Foin de carnet rose, attardons nous donc plutôt sur le carnet de bal. En dix plages (ah oui, vous a-t-on informé aussi qu’après la campagne, ce que préfèrent Mr et Mme Lafarge, c’est le littoral?), Pokey décline ici sa conception élargie de la country. S’ouvrant sur le calypso “One You, One Me” (plus digne du “Calypso Is Like So” de Robert Mitchum que du “Banana Boat Song” de Harry Belafonte, de même que “Run Run Run”), la mémoire de Chris Montez est tout autant honorée sur les chaloupés “For A Night”, “Like A Sailor” et “Sister André”. Le vintage R&B circa New-Orleans ou Memphis se fraie encore un strapontin (“So Long Chicago”, “It’s Not Over”, “Made To Be Loved”), de même que le gospel façon John Williams (“Home Home Home” de Ken Boothe), mais si entre Glen Campbell et les Kinks de “Village Green”, “You Make My Garden Grow” aurait pu bénéficier des circonstances atténuantes du second degré, sa niaiserie assumée l’en dispense funestement. En résumé, la onzième livraison du Buster Keaton de la rétro-music contemporaine se rapproche davantage de feu Leon Redbone que du non moins regretté Bob Brozman, et son timbre vocal plus que jamais de celui de Bugs Bunny. Dès qu’il cessera de pleuvoir, j’accorderai peut-être à ce disque une seconde chance. En attendant, voici une nouvelle victime de la météo: Johnny bigot…

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, June 1st 2024

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