Otis Taylor – Hey Joe, Opus Red Meat

In-akustik
Blues

Ce nouvel album démarre avec une extraordinaire version crépusculaire du Hey Joe de Billy Roberts qui reste totalement dans les atmosphères Trance-Blues dont Otis Taylor est le chantre. La judicieuse juxtaposition du violon, du cornet et des guitares fait mouche à tous les coups! Après le regretté Gary Moore qui était venu égrener ses notes précédemment, c’est cette fois l’excellent Warren Haynes qui vient distiller parcimonieusement les siennes. Ce sont les deux premiers titres qui fournissent le loisir au guitariste natif de Asheville de fourbir ses armes: Hey Joe et Sunday Morning. Le deuxième morceau est d’ailleurs un somptueux instrumental dont nous nous voyons gratifier de trois versions différentes: 6’45, 1’50 et 3’60. La première nous est proposée avec le leader de Gov’t Mule, la seconde avec David Moore au banjo et la troisième avec Taylor Scott à la guitare. Si l’on excepte ces deux titres qui monopolisent 26 minutes de l’album (26 minutes ‘tayloresques’, titanesques!), les 20 autres minutes sont dédiées aux 5 autres compositions du musicien de Boulder (Colorado), dont un autre superbe instrumental, They Wore Blues. Les autres invités fameux ont pour nom Bill Nershi, guitariste de The String Cheese Incident, Daniel Sproul, Rose Hill Drive sur la seconde version de Hey Joe et le chanteur Langhorne Slim sur 3 titres. Un quatorzième chapitre qui confirme ce que je disais à propos du troisième, White African, en 2001: «Otis Taylor est l’incarnation du Bluesman du troisième millénaire!».

 

Le manitou du ‘trance blues’ a encore frappé, nous embarquant avec lui dans son trip. Impossible de résister à la force d’attraction de cet opus. Alors on enfile son blouson, ses bagues, sa mobylette ou sa Harley, on glisse quelques cailloux dans ses poches et on s’évade. Dressé face à nous, l’ours nous interpelle: Hey Joe! La voix est toujours aussi ténébreuse et rocailleuse, incendiaire et envoûtante. En prime c’est notre ami Warren Haynes qui est à la gratte, c’est dire le truc que vous vous prenez en pleine poire dès le lancement de l’album.
La suite est du même tonneau, de la même cuvée. De celle qui coule dans ces rades et ces juke joints dans lesquels on aime traîner dès qu’on a le blues. Ces endroits enfumés où Blues et alcool deviennent des maîtresses possessives, des amantes religieuses qui vous dévorent après l’accouplement, ces lieux aux lumières blafardes et où les vibrations sont incessantes, prenantes. Où le trance-blues est roi.
Dès la première écoute on a envie de mettre le son à fond, tellement c’est profond, intense. Un album prenant, captivant, envoûtant, certes, mais aussi novateur et qui démontre qu’avec des artistes comme Otis Taylor le blues est non seulement une musique actuelle, mais d’avenir. Un album qui s’impose en ce début d’année 2015 comme l’un des grands, des très grands albums de blues de ces 5 dernières années.

Frankie Bluesy Pfeiffer