Kelly Green – Corner of My Dream (FR review)

Green Soul Studio – Street date : August 22, 2025
Jazz
Kelly Green – Corner of My Dream

Kelly Green et l’art de fabriquer des rêves : une voix qui redéfinit le jazz.

Ce n’est pas la première fois que j’écris au sujet de Kelly Green, et il est fort probable que ce ne soit pas la dernière. Green fait partie de ces rares artistes dont l’univers musical, à la fois poétique et profondément personnel, vous emporte en seulement quelques mesures. Dans son dernier album, elle nous convie à un coin reculé de ses rêves. Et croyez-moi: c’est un disque qui fera date. Il marquera les esprits non seulement par la beauté de ses compositions, par la richesse de ses textes et la finesse de ses arrangements, mais aussi et surtout par l’interprétation d’une justesse remarquable de Kelly Green.

Kelly Green accomplit ce que peu d’artistes osent: elle redessine les contours du jazz. Elle y mêle des textures venues de la musique classique avec la maîtrise d’un compositeur aguerri, et cisèle ses paroles avec une telle précision qu’on pourrait les entendre simplement parlées, et en être tout autant bouleversé. Il y a dans sa démarche une forme de théâtre musical, non pas dans la forme, mais dans cette façon de faire dialoguer récit et émotion, pensée et instinct. Écouter son œuvre, c’est comme ouvrir un livre écrit par l’âme elle-même: vulnérable, complexe, et radicalement sincère.

Au fil de sa discographie, Green a construit une œuvre toujours plus libre, plus affirmée. Elle ne court pas après les modes. Elle ne cherche pas à être autre chose que ce qu’elle est profondément: une artiste plurielle, explorant les paysages émotionnels du jazz contemporain. Et ce faisant, elle est devenue, sans bruit mais avec évidence, l’une des vocalistes les plus novatrices de sa génération.

Ce nouvel album est porté par un ensemble de collaborateurs de haut vol. On ne peut s’empêcher de se réjouir à la vue de certains noms: Andromeda Turre, Michael Mayo, Emily Braden, autant d’artistes qui incarnent aujourd’hui le meilleur du jazz engagé. Chacun d’eux apporte à l’album une sophistication et une intensité à la hauteur de l’univers de Green. Ensemble, ils forment une constellation artistique à la fois virtuose et profondément humaine, investie dans le présent et l’avenir du jazz.

Née et élevée en Floride, Kelly Green chante depuis son plus jeune âge. Elle débute le piano à sept ans. À onze ans, elle découvre le jazz, et commence à participer chaque été, avec son père Jeff Green, bassiste et ingénieur du son, aux ateliers Jamey Aebersold. C’est sans doute là qu’elle forge son immense ouverture d’esprit artistique et ce souci constant du son parfait. Et bien que son art soit différent, ce nouvel album fait naître une émotion comparable à celle ressentie à l’écoute de certains albums de Sinatra: cette impression de grandeur qui se confronte à l’immensité du monde.

Prenons le morceau Blue and Green. Il a cette grâce espiègle, presque irréelle, qui nous donne l’impression que Miles Davis pourrait surgir dans un coin de la pièce. On imagine. On espère. Et juste au moment où l’on croit que le maître ne viendra pas, c’est la voix magistrale de Kelly Green qui vient dissiper notre attente. Oui, définitivement, Kelly Green est l’une des plus grandes vocalistes d’aujourd’hui. Elle embrasse son art comme Dalí embrassait ses montres molles et ses visions chimériques, avec une audace absolue. Et alors que l’on croit toucher à la fin, un souffle gospel vient clore cette traversée onirique, porté par les voix des artistes que j’évoquais plus haut.

Signe indiscutable d’un album pleinement abouti: on ressent un manque lorsqu’il s’achève. Comme après un bon roman de Paul Auster, on y revient avec délice. Et à la deuxième écoute, un autre monde s’ouvre. L’effet de surprise passé, on savoure les arrangements, les textures vocales et musicales, parmi les plus réussis de tous les albums reçus cette année. À mes yeux, c’est sans aucun doute l’œuvre la plus personnelle et la plus accomplie de Kelly Green à ce jour.

Thierry De Clemensat
Member at Jazz Journalists Association
USA correspondent for Paris-Move and ABS magazine
Editor in chief – Bayou Blue Radio, Bayou Blue News

PARIS-MOVE, July 15th 2025

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Available August 22, 2025, here

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Tracklist :

  1. Let Me In
  2. Corner of My Dreams
  3. Tea with Kathie
  4. When It’s Time To Go
  5. Nothing At All (Intro)
  6. Nothing At All
  7. Blue and Green
  8. At Eternity’s Sunrise

Musicians :
Kelly Green – Lead Vocals/Piano
Luca Soul Rosenfeld – Upright Bass
Evan Hyde – Drum Set
Andromeda Turre – Percussion
Ludovica Burtone – Violin 1
Tomoko Akaboshi – Violin 2
Kayla Williams – Viola
Maria Figueroa – Cello
Michal Mayo – Bass Voice
Jimmy Kraft – Tenor Voice
Tahira Clayton – Alto Voice
Kelly Green/ Emily Braden – Soprano Voice