Eric McFadden Trio – Delicate Thing – Bad Reputation

Bad Reputation
Rock

Dire que j’appréhendais la suite serait même un peu faible tant le dernier opus de Eric McFadden nous avait foutu la grande baffe. Oui, incontestablement, ‘Let’s Die Forever…Together’ avait été pour nous, à Paris-Move et à Blues Magazine, l’un des grands albums de ces dernières années, les deux rédactions lui attribuant même la meilleure note possible (et distribuée au compte-gouttes !) : ‘Indispensable’. C’est pour vous dire combien j’appréhendais la suite…. Comment le lascar allait-il se relever après un tel bijou ? Surtout que lui-même, à plusieurs reprises, avait avoué lors d’ITW que cet album-là était pour lui l’un de ses préférés.
Je glisse la galette argentée dans le lecteur et houps, premier riff de gratte reconnaissable entre mille, avec le même son, la même énergie. Le premier titre est excellent, en droite ligne de l’opus précédent, avec basse ronde à souhait mais pas trop, batterie percutante mais pas trop, et toujours cette voix qui s’arrache, vous envoûte, vous embarque dans un trip propre à la McFadden. C’est clean sur soi et ça porte le nom de l’album, ‘Delicate Desire’. La suite vous reprend par la main et vous emmène sur les traces du double Dementia, avec un ‘Catch A Liar’ qui fera merveille en concert, avec ce cœur percutant qui vous l’envoie, le refrain. Sur ‘One Bad Reason’ la gratte vous offre une entame façon Tom Waits (on sait que le Eric songe fermement à faire quelque chose avec le Tom, et si cela se fait, réservez vos places parce que ce sera géant, pour sûr !), une entame disais-je, qui vous positionne encore ce titre dans un second volume de ‘Let’s Die Forver….Together’. Je craque et me remets ce ‘One Bad Reason’ une seconde fois avant de plonger dans la suite, qui, cette fois, bascule dans un rock plus rageur, même si parfois l’animal (je vous l’avais dit qu’il avait joué avec Eric Burdon, non ?) semble vouloir se poser un instant, comme sur ‘If I Ever Die’ ou ‘Ride’, intermède musical avec guitare hispanisante d’une exceptionnelle beauté.
A peine détendu, vous êtes happé par le fougueux et intense ‘Another Day’, témoin de l’énergie que le Trio infernal peut vous coller en multi-couches. Jouant avec les tempos comme avec mes nerfs, Eric McFadden me la colle cool à nouveau avec un ‘Are You Happy Now’, comme si je l’étais pas, happy, moi. Avant de me laisser embarquer à nouveau par la guitare hispanisante du maestro, je me dois de vous signaler les superbes nappes de violoncelle, superbes, vraiment, sur ‘Are You Happy Now’.
J’ai à peine le temps de relever le compteur que je me fais dépasser par le Trio, gratte en tête et alignant des notes suturées entre les rugissements de l’animal. Blessé ? Peut être, sinon pourquoi aurait-il chanté ‘Lie To Me’…
La suite sera conforme à ce qui vient d’affoler le compte-tours: un titre méga-percutant, avec ‘Bigger Piece Of You’, avant un autre morceau musical pour guitare acoustique hispanisante, ‘Waiting For Me’, et l’autre grand morceau de cet opus, le sublime ‘Come To Me’, avec son intro au violon à vous fendre le cœur. Là on tient du grand, du très grand McFadden. La voix y est grave, douce mais grave, annonciatrice des coups de tonnerre de la six cordes. Ca vous colle au siège, au plafond, ça vous en met plein l’appart, plein la rue, plein le ciel. Une chanson que Tom Waits aurait sans nul doute aimé chanter, et écrire. Il aurait été là, près de moi, le Tom, il se serait levé et il lui aurait dit ‘Monsieur’ au Eric: ‘Monsieur’ Eric McFadden. Et puis, pour ceux qui auraient encore des doutes, envoyez-vous le final de ‘Come To Me’, monumental, et prenez-en pour votre grade car des morceaux comme celui-là, y’en a pas des tonnes en ces temps de crise, OK ?

Un album qui trouvera tout naturellement sa place entre ‘Dementia’ et ‘Let’s Die Forever….Together’.

Frankie Rocky Pfeiffer
Blues Magazine & Paris-Move