Eric McFadden – Train To Salvation

Bad Reputation
Rock
Quand on détient une telle personnalité et un tel talent, ne pas être davantage sollicité en France pourrait logiquement décourager, mais Eric McFadden y trouve sans doute de quoi décupler sa créativité, alignant depuis quelques années maintenant des albums tous plus originaux et plus beaux les uns que les autres.
 
Premier opus de cette lignée, le superbe ‘Let’s Die Forever…Together’ qui faisait suite à 19 CD aux titres rageurs et puissants, comme si la bête de scène et de studio qu’est McFadden avait ressenti le besoin de se poser, de faire un petit tour en lui-même pour nous proposer de superbes chansons telles ‘Dead Man’s Lullaby’ ou ‘What’s In My Head’. Un album sur lequel la rédaction de Paris-Move avait craqué, lui accordant son ‘Coup de Cœur’ du mois.
 
Faisant suite à ce monument que fut ‘Let’s Die Forever…Together’, l’album ‘Delicate Thing’ avait le redoutable honneur de succéder à une galette de grande classe et on attendait donc le McFadden au tournant. Une fois de plus, le guitariste nous réserva quelques belles surprises, comme ‘Delicate Desire’, une chanson-prolongement de l’opus précédant, ou l’énergique et puissant ‘Another Day’, comme pour montrer que le McFadden des années 90 est toujours là, sans oublier le génial ‘Come To Me’. Un opus qui méritait amplement la note de 4CD.
 
Après ces deux étapes, il est donc inutile de dire que l’opus suivant était encore plus attendu, surtout que le label Bad Reputation voulait marquer le coup en proposant en plus du CD un DVD présentant McFadden en live, tel qu’il fut sur la scène du Café de la Danse, en 2007.
 
A la première écoute de ce nouvel opus, dire que l’on en est resté sur le cul ne serait pas la vérité. La gifle fut telle qu’on en est restés bouche-bée, l’air con et les larmes aux yeux, le cœur battant la chamade, les mains serrées sur le verre de J.D. (pas de pub, SVP, m’a dit mon boss, dont le prénom est Hugo), à le faire exploser comme avaient explosé nos neurones à l’écoute de ce ‘Train To Salvation’.
 
On vous l’a dit et répété que le McFadden est un super guitariste, mais faut rajouter que le mec n’est pas seulement doué à la gratte, il en est l’âme. Que ce soit à la guitare acoustique, en style bluesy ou hispanisant, ou à l’électrique, Eric McFadden a ce don inné de vibrer au son des cordes. Il ne joue pas les notes, il les vit et vous les fait ressentir, une à une. Ecoutez-le dans ‘Last Day Of My Life’ et vous en aurez des frissons. Et que dire de la contrebasse, du violon et du bandonéon qui ici et là enrichissent les arrangements juste ce qu’il faut, laissant la voix d’Eric McFadden survoler toutes les chansons, à l’exception de ‘Stealing From The Dead’, morceau musical à l’énergie débordante et qui rappellerait presque une gigue endiablée.
 
Côté atmosphères musicales, le McFadden fait dans le très haut de gamme, avec des ambiances intimistes pour soirées entre amoureux, avec chandelles et la pleine lune (si vous l’avez commandée à temps), comme sur ‘Drive’ et ‘All Those Tomorrows’, ou ambiances plus enjouées, comme sur ‘Fair Trade’, et sur lesquelles on retrouve l’énergie du bonhomme lorsqu’il lâche les chevaux.
Certains grincheux diront que le McFadden de ‘Dementia’ a perdu de sa rage en route, mais le fait est là, cette rage est toujours là, mais plus contenue, maîtrisée, signe que le garçon perçoit la vie d’une autre manière, moins ‘dark’, même si les circonstances font que…
Des circonstances qui ont amené Eric McFadden à apprendre que Ferdinand, le fils de l’acteur français Patrick Chesnais, écoutait du McFadden. Qu’il écoutait McFadden jusqu’à cette nuit fatale où il perdit la vie dans un tragique accident de voiture.
De tout cela, Eric McFadden en a fait une chanson, sans doute la plus belle de cet album, et dont l’émotion intense qui a du traverser le chanteur lorsqu’il apprit la nouvelle transpire au travers de chaque parole du chanteur, de chaque note du guitariste. Une émotion telle que j’ai vu des larmes couler des enceintes de ma chaîne hi-fi. Une émotion telle que vous ressortirez de cet album avec les poils dressés, le regard embué, le cœur chaviré, surtout si, comme moi et tous ceux qui ont écouté cet opus, vous êtes à votre tour monté dans ce ‘Train To Salvation’.
 
Véritable ‘coup de cœur’, cet album de McFadden mérite la note maximale, ‘Indispensable’, car dès la première écoute cet opus vous deviendra indispensable tant il est géant. Monumental.
 
Frankie Bluesy Pfeiffer

 

 
Fi des nombreux projets déjà réalisés. Fi, également, des multiples formations avec lesquelles Eric McFadden a joué. Nous ne parlerons pas, non plus, des albums précédemment réalisés, et il y en a un sacré wagon. Créatif et insatiable, le chanteur-guitariste semble être hors du temps, hors normes.
Nous ne reviendrons pas non plus sur le concert au cours duquel il accompagna Eric Burdon au Trabendo, il y a quelques années, ni à celui du Plan de Ris-Orangis, où il mit le feu en se livrant à une prestation digne des plus grandes formations de rock de la planète, au mois de novembre dernier.
Ce dont il est question, ici, c’est du dernier train dans lequel l’artiste est monté: celui du salut! De la rédemption, peut-être?

Un train composé de treize wagons, treize titres aux teintes sublimes, treize preuves de sa volonté de récupérer son âme qu’il n’a jamais aussi bien mise à nu que dans cet opus, justement. Tous les styles musicaux sont mis à contribution, de la chanson à boire, comme celles chantées par de vieux matelots, au fond d’une taverne du port de San Francisco, à celles qui semblent arriver tout droit d’Europe centrale, où l’accordéon et le violon sont les modes d’expression privilégiés.
 

Ce nouvel album démontre magnifiquement combien sont immenses les capacités de cet artiste. Tous les sujets sont traités sur le mode confidentiel. Celui qui est un redoutable bluesman, rocker et folk singer à la fois, parvient, et c’est ce que cet album prouve, d’une manière très intimiste, à délivrer ce qu’il avait toujours envie de nous révéler. Et les guitares hispanisantes ne font que souligner avec plus d’acuité encore l’importance de ces choses intimistes dites de façon particulièrement discrète.
Un disque qui se doit de trouver une place toute particulière dans chaque endroit où de la musique s’écoute.
 
Dominique Boulay