Blues, Folk |
À ceux que le folk-blues consensuel d’Eric Bibb exaspère ou indiffère, rendez-vous à la chronique suivante. On ne peut toutefois nier que cet artiste recueille les suffrages d’un large public (fruit sans doute de ce qui en écarte les autres). Et à l’heure où de grands anciens comme John Mayall nous quittent à 90 piges, et où des héros d’antan tels que Neil Young, Paul McCartney, Taj Mahal, les Stones, Pete Townshend et Bryan Ferry abordent (ou ont entamé) leur décennie octogénaire, de relatifs gamins tels que Bibb (voire même Peter Perrett, chroniqué ICI) paraissent pouvoir encore jouir de quelques belles années. Les sessions de son 36ème album en un demi-siècle se sont réparties entre les fameux studios Real World de Peter Gabriel à Bath, ceux de son label suédois Repute Records et LittleBIG Sound à Nashville, avec un noyau de contributeurs d’où se détachent l’excellent guitariste Robbie McIntosh (Pretenders, Norah Jones, Paul McCartney…) et le multi-instrumentiste Glenvin Anthony Scott (basse, guitares, mandoline, claviers, batterie, backing vocals). Au total, une vingtaine d’instrumentistes contribuent alternativement aux quinze plages de cette galette, en garantissant la variété des climats et des arrangements. S’ouvrant en douceur sur le placide “Take The Stage” où se distinguent (outre la voix et le picking acoustique d’Eric) les chœurs, la guitare et l’orgue Hammond de Scott, ainsi que la slide délicate de McIntosh, la set-list oscille comme de coutume entre country blues (“Dear Mavis” – dédié à Mavis Staples – “Neshoba County”, “King Of The Castle” ou “Walk Steady On” et ses arrangements appalachiens de violon, handclaps, chœurs et mandoline) et gospel protest (l’acoustic boogie “Everybody’s Got A Right” ou “Stealin’ Home”, avec l’harmonica lancinant de Michael Jerome Browne). On retiendra de cette nouvelle livraison certains titres parmi les plus dépouillés (ainsi de “Best I Can”, où le picking de Bibb s’appuie sur un remarquable trio à cordes), ou encore ceux où transpire l’empreinte de sa collaboration de naguère avec Habib Koité (“Make A Change”, “Roll On Buddy” et “If There’s Any Rule”, avec leurs patterns ouest-africain), et on laissera aux touristes le prêchi-prêcha lénifiant (“This River (Chains & Free)”, “Judgement Day”). Bref, voici donc un nouvel album soigné de cet artiste consensuel, qui ne laissera de marbre que les amateurs de jaja plus corsé, mais en ravira tant d’autres.
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, November 3rd 2024
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