Americana |
Près de six ans jour pour jour après son troisième album (“The Lonesome Side Of Town”, chroniqué ICI), le singer-songwriter et guitariste Ed Dupas se résout enfin à nous donner signe de vie. Des événements personnels (la perte de son paternel) et universels (la crise COVID) l’ont en effet tenu un temps éloigné de la scène et des studios. Lors des funérailles de son père, sa mère lui révéla qu’il fut conçu à L.A. (bien qu’il naquit finalement à Houston, Texas, et fut élevé à Winnipeg, Canada). Il n’en fallut pas davantage pour que cet introspectif notoire ne commençât à réévaluer son appétence pour cet état occidental, et notamment le courant folk-rock pré-Americana qui y prit son essor peu de temps avant sa naissance, en 1971. En comité guère moins restreint que lors de son prédécesseur, Dupas n’en délivre pas moins dix nouvelles pièces, dont la plage titulaire qui ouvre le ban. On y retrouve sa verve folky, entre le Cat Stevens de “Tea For The Tillerman” et le regretté Jimmy LaFave. La pedal steel et sa cousine, la lap-steel, y tiennent toujours une place de rang, et le timbre de Ed s’y exprime toujours avec la même assurance. Sur le genre de beat qu’affectionne Dylan LeBlanc, “Barbed Wire Cross” se réfère à la décoration saugrenue d’un Airbnb où il séjourna sur les hauteurs de Laurel Canyon, tandis qu’avec son orgue façon Al Kooper, le single “Box Of Lonely Men” traite de la solitude de maints travailleurs amenés à occuper leurs soirées loin de leurs foyers (peinture sociale où excellait également le grand Jim Croce, qu’évoquent aussi les métaphores de “Queen Of Hearts”). Sa pedal-steel en embuscade, le languide “Ready To Be Found” se rapproche des registres de Steve Earle et du regretté John Prine, pendant que “The Great Shutdown” aborde avec sagacité la situation sociale et politique actuelle aux States sur des entrelacs de dobro et de guitares acoustiques, et que “Holy Land” (sous-tendu par un orgue discret) en fait autant avec le holisme philosophique, dans la veine de Woody Guthrie, ou encore de Country Joe McDonald. C’est le Springsteen de “Nebraska” que rappellent ensuite “The Medicine”, “Angel” et “My Only One” (tandis qu’un duo violon-violoncelle accompagne ce dernier). Produit par Michael Crittenden (qui officie également aux guitares, à l’orgue et aux percussions), voici donc un disque éminemment intimiste, où l’on éprouve parfois l’impression que son auteur nous susurre ses impressions directement à l’oreille. Poignant, attachant et convaincant.
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, October 13th 2025
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