Blues

Nous l’avions quitté voici cinq ans déjà, à la tête de son Mighty Combo (chroniqué ICI). Expatrié sur la péninsule ibérique depuis une vingtaine d’années, le légendaire Mike Vernon (honoré en 2020 par la Couronne en tant que Member Of The British Empire, pour services rendus à la cause du British Blues) y coule une retraite plaisante, mais pas inactive pour autant. A blues lover for life, il n’a pas tardé à s’y enquérir de la dynamique scène locale, y reprenant même sporadiquement sa casquette de producteur auprès de quelques artistes du cru. Bien qu’unanimement saluée par la critique, sa dernière formation a finalement succombé à quatre périls majeurs: le Brexit (quatre de ses membres étant Britanniques, tourner sur le continent est subitement devenu un casse-tête fiscal et douanier), le confinement (plus d’engagements possibles) et le coût logistique élevé d’un tel sextette sur la route, auxquels se sont ajoutés les chiffres de vente décevants de l’album subséquent. La mort dans l’âme, Vernon dut donc se résoudre à dissoudre ce que Paul Jones qualifiait pourtant dans son émission sur BBC Radio 2, de “a sensational band, actually”. But all was not lost, in the end: pansant ses plaies durant le confinement, Mike y consacra son temps libre au songwriting, avec le soutien bienvenu du guitariste espagnol Kid Carlos (déjà présent au sein du dit défunt Mighty Combo). Avec le renfort de l’harmoniciste Mingo Balaguer (par ailleurs membre du groupe espagnol The Blues Intruders), ainsi que du bassiste Oriol Fontanals et du batteur Pascual Monge, ce dernier dirige indéniablement le combo idoine pour magnifier le répertoire d’un véritable héros de ces musiques. Dès la reprise du “Feel So Good” de Big Bill Broonzy, l’harmonica de Mingo, la guitare de Carlos et la rythmique bondissante d’Oriol et Pascual vous saisissent par le col pour corroborer le message du grand William Lee Conley: on n’est effectivement pas venus pour s’ennuyer! Le timbre de Mike n’est pas en reste, et il est manifeste qu’à pratiquement le même âge vénérable que Paul McCartney, il demeure en bien meilleure forme que celui-ci sur le strict plan vocal! Dans la veine du Canned Heat période Vestine et Robert Lucas (ou encore du Savoy Brown circa Chris Youlden), le mid-tempo “What Might Be Your Name” clopine sur un riff entêtant, avant que nos amis ne reprennent à leur compte le titre du Dr. Isaiah Ross auquel ils empruntent le nom de leur formation. Sur un beat quasi-rockabilly, la slide fumante de Kid Carlos et l’harmonica de Balaguer y sèment une traînée de kérosène sur leur piste, tandis que leur lead singer délivre une nouvelle prestation des plus persuasives. L’original “Sugaree Sugaree” bifurque vers le Texas-shufflin’ & rockin’ blues dans la ligne des premiers T-Birds, comme en atteste le solo de six cordes dans l’esprit du jeune Jimmie Vaughan. Retour à l’esprit californien d’un Rod Piazza, avec le swinging “Out On A Limb”, où les soli du Kid s’inspirent de Junior Watson et du regretté Hollywood Fats, avec un Balaguer au chromatique dans la veine du grand George Smith: très classe! C’est à Elmore James que nos amis rendent ensuite hommage, avec un “Heart Of Gold” ne devant rien à celui d’un certain Neil Young en période de moissons. Lamelles de Mississippi saxophone et bottleneck d’acier s’y ébrouent comme à foire d’empoigne, tandis que la rythmique bat imperturbablement le uplifting Chicago shuffle. L’anecdotique “My Baby’s Gone” cède le pas à un “Tell Me Mama” n’ayant rien de commun non plus avec le titre éponyme de Little Walter, mais dans le registre jump & swing des Boogie Wizards de L.A., “What The Blues Will Do” ravive les souvenirs des “Future Blues” de jadis. “All She Wants Is Me” s’ébat en mambo lascif comme un saurien dans son marigot, et ultime reprise de cette collection, “You Got Me Dizzy” de Jimmy Reed troque la touche swamp de l’original contre ce jump-shuffle beat dont Anson Funderburgh, Smokin’ Joe Kubek et Mike Morgan élevèrent le piédestal, vers ce sommet où s’érige Kid Carlos en deux soli ébouriffants. Retour dans le Chicago South Side de Magic Sam et Otis Rush pour le languide “Baby Please”, dont Mingo et le Kid se taillent la part du lion. Lazy funk lascif, “One Minute” bénéficie d’un son de guitare aussi gras et épais que celui de Mick Taylor au temps de “Blues From Laurel Canyon”, avant que “Let The Boogie RIP” ne conclue cette galette inespérée en cavalcade échevelée, façon “Hip Shake” de Slim Harpo et “Feelin’ Good” de Junior Parker. No matter the years, no matter the times: if you’re looking for a real blues party, you came to the right place!

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, August 30th 2023

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Attention! Uppercut et crochets simultanément! Car confirmation que monsieur Mike Vernon et ses sbires (since 2022 CAT SQUIRREL) savent de quoi ils parlent et ce qu’ils font. Il s’agit, ni plus ni moins, de la perpétuation du British Blues Boom! Tout cela s’impose dès la lecture du nom de la formation, Cat Squirrel, et l’audition du troisième titre qui évoque le titre du morceau composé par Isaiah Ross et les reprises du titre par Jethro Tull et Cream. Mike Vernon, créateur du Label Blue Horizon, découvreur, producteur, collaborateur de projets (John Mayall, Fleetwood Mac, Savoy Brown, Ten Years after, Chicken Shack, David Bowie, Oli Brown, Sari Shorr, Otis Spann, Champion Jack Dupree, Elmore James), est au chant, Kid Carlos à la guitare, Mingo Balaguer à l’harmonica, Oriol Fontanals à la contrebasse, Pascual Monge à la batterie. Un opus enregistré, mixé, masterisé en Espagne. Tous les morceaux, 14, sont composés par Mike Vernon, exceptées 4 reprises. Un opus qui titille la nostalgie chez les anciens et qui enflamme les plus jeunes qui découvrent des morceaux qui sonnent déjà comme des classiques, superbement interprétés! Une pépite 100 % authentique!

Dominique Boulay
Paris-Move & Blues Magazine (Fr)

PARIS-MOVE, September 20th 2023

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