Swing Blues |
Cinquième album à ce jour de ce duo rétro-musical canadien (et couple à la ville), que nous vous avons déjà présenté ICI et ICI. Suite à leur “Scream, Holler & Howl” d’il y a deux ans (produit par Duke Robillard en personne, et qui leur valut quantité de prix et de critiques louangeuses), nos tourtereaux, A.W. Cardinal (chant, guitare) et Jasmine Colette (chant, contrebasse) se sont octroyé deux séances consécutives dans la Mecque (et le berceau) de leurs musiques favorites, la Nouvelle-Orléans. Produites cette fois par le précieux Big Jon Atkinson, ces sessions se sont réalisées en deux après-midis distincts, à une année de distance mais selon un protocole commun. Chacun des dix titres qui en résultent fut en effet capté live par les musiciens et interprètes, jouant et chantant simultanément dans la même pièce, à l’ancienne en somme. Constitué à 60% de reprises (se répartissant de Charlie Patton à Lonnie Johnson, en passant par Leadbelly, Bo Carter, Irving Mills et Memphis Minnie), ce disque s’ouvre sur le “Black Rat Swing” de cette dernière. C’est évidemment Jasmine qui y tient le micro, et l’on est immédiatement saisi par l’ambiance décontractée (voire quelque peu “loose”) qui y préside. Nos amis ont recruté pour l’occasion des musiciens du cru : le pianiste B.C. Coogan, le saxophoniste Danny Abrams et le batteur Nicholas Selnick, qui instaurent un vintage ragtime groove omniprésent, comme en atteste le “Ain’t Going Down” de Leadbelly qui suit (dont notre duo se répartit les parties vocales). On s’aventure davantage encore dans les bas-fonds avec le “Let’s Get Drunk” de Bo Carter, drivé par une rythmique paresseusement chaloupée, où le piano bastringue de Coogan et le sax baryton actionnent la pompe. Plus rag que jamais, A.W. chante lead le classique “Shake It And Break It” de Patton, avec pour contrechants le timbre de sa régulière, ainsi que sa contrebasse et ce sax mutin qui s’octroient soudain leur échappée libre. Premier des quatre originaux que co-signe notre duo, “Trickster Coyote” les présente en la seule compagnie de Big Jon Atkinson (qui embouche pour la circonstance l’un de ses instruments de prédilection, l’harmonica). Suit le slow-blues “What I Wouldn’t Do”, autre composition que Cardinal braille seul. Sans que cela soit manifeste à l’oreille, on y a changé de session, ainsi qu’en témoigne l’irruption d’un autre batteur, Brett Gallo, mais le reste du line-up demeure inchangé, comme en attestent les soli de sax et de piano y alternant. Toujours signé Blue Moon Marquee, “Red Dust Rising” est un barrelhouse shuffle auquel le honkin’ sax confère la touche locale de rigueur, avant que le combo n’entame le convenu “Saint James Infirmary” (l’un des hymnes putatifs de Bourbon Street). Le quadrilatère piano, sax et rythmique s’y montre plus couleur locale que jamais, tandis que le chant éraillé d’A.W. y confère sa touche Tom Waits aviné. Dernière composition du lot, “Some Ol’ Day” offre enfin à Cardinal l’occasion de contrebalancer son chant de quelques brillantes saillies aux six cordes électrifiées, sans empêcher pour autant le saxophone ni le piano d’en faire autant. Le “Got The Blues So Bad” de Lonnie Johnson ramène l’harmo brillant d’Atkinson, pour conclure en simple trio avec les deux leaders. Un réjouissant album récréatif, dont le caractère spontané et bon enfant s’avère le plus souvent communicatif.
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, October 30th 2024
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