ANDREW HAWKEY – Hindsight – Andrew Hawkey At 80 – A Fifty year Overview

Mole Lodge Records
Americana, Folk-Blues

Il y a trois ans, nous vous avons présenté par le menu cet artiste anglais méconnu, lors de la parution de son second CD (chroniqué ICI). Entré dans sa quatre-vingtième année en septembre dernier, il propose à présent la rétrospective d’un parcours musical (que l’on n’oserait qualifier de carrière) couvrant plus d’un demi-siècle. Underground par choix (celui de la liberté), Andrew n’en a pas moins toujours été passionné de musique et d’écriture, et en puisant dans ses propres archives, il est parvenu à assembler cette auto-anthologie de 17 titres originaux, dont les plus anciens (à l’époque conservés sur cassettes) datent de 1969/70. Avec leurs arrangements dépouillés bien de leur temps (strumming acoustic guitar, bass, mandolin & harmonica), “Between Two Horizons” et “As Frightened As The Next Man” s’inscrivent dans la veine de folk singers alors en vogue, entre Dylan, Donovan, Cat Stevens et Stephen Stills en solo. Près de cinq ans plus tard, “Fences” verse, avec ses bongos et son violon plaintif, dans celle du Buddy Holly unplugged (dont on ne publia les démos qu’après sa mort), tandis que “Columbine” accuse l’influence manifeste du grand Jim Croce (alors tout juste disparu, et dans les mêmes circonstances que le précité). Démos captées en 1977, “Ivinghoe”,”Poor Jane” et “Clipper Line Pirates” attestent du décalage déjà manifeste de l’inspiration de Hawkey (alors toujours réminiscente du courant initié par CSN et consorts à l’aube de la décennie), tandis que Londres bruissait déjà d’émergences nettement plus tapageuses. Cinq ans plus tard, “Just One Night Of Love” présente Andrew en mode plus énergétique, entouré d’une section rythmique (dont le batteur se faisait appeler Nigel L’Estrange Sanctuary!), et propose un solo de slide électrique particulièrement acrobatique… Issus des mêmes sessions, “Always Treat Me Right” et “Make Do And Mend” rejoignent la tradition folk de ses débuts. Le chunka-groove quasi-reggae de “Waterloo” (1983) évoque autant Jona Lewie que certaines tentatives de Ronnie Lane et d’Albert Lee (avec le guitariste et bassiste John Holburn dans le rôle de ce dernier). L’atmosphérique instrumental “Desert Moon” s’inscrit dans les pas du “Wonderful Tonight” dont Clapton écoula des containers entiers, et Andrew en exécute seul toutes les parties (guitares, basse et synthés). Enregistré comme son prédécesseur au temps où il dirigeait son propre studio (Solar Sound), l’évocateur “Take Me” que susurre la voluptueuse Jane Gilbert s’avère l’un des multiples sequels au “Je T’AIme… Moi Non Plus” du couple Gainsbourg-Birkin. Il semble que cette dernière ait disparu des radars depuis (et c’est regrettable, car on eût pu lui prédire une carrière prolifique dans le doublage de films licencieux). On retrouve par contre Andrew dix ans plus tard, en tant que claviériste groovy des Pat Grover’s Blues Zeros, au sein desquels il dispense un juteux solo de Hammond sur une extensive cover, live et jubilatoire, du “Help Me” de Rice Miller, avant d’y céder le pas au fabuleux (et trop méconnu) guitariste gallois Terry Dixon. Caution blues de cet album en soi, c’est une performance magistrale  avant que Andrew ne revienne à ses premières amours avec “Spirit” (extrait de son “Long Story Short” de 2020), et ne choisisse de fermer le ban sur une nouvelle version du “Between Two Horizons” introductif, réinterprété en 2022 avec ses complices actuels, le multi-instrumentiste Clovis Phillips et la backing singer Zoe Spencer. Accompagnée d’un livret de 20 pages sérieusement annoté, cette compilation chronologique n’est apparemment éditée qu’à 500 exemplaires numérotés, et constitue le témoignage précieux de l’évolution d’un songwriter à l’indépendance chevillée au corps.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, June 19th 2023

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