ITW de TASTE


ITW de TASTE
 
Préparée et réalisée par Nathalie ‘Nat’ Harrap et Frankie Pfeiffer
ITW publiée dans le numéro 27 du magazine Xroads
Photos : © Frankie Pfeiffer
 
Le nom du groupe TASTE est intimement lié au nom du mythique guitariste irlandais Rory Gallagher. Mais au sein de TASTE, il y avait aussi un batteur du nom de John Wilson, et 40 ans après les deux albums sortis en 1969 chez Polydor, l’éponyme ‘Taste’ et ‘On The Boards’, un opus aux influences très jazzy sur lequel Rory jouait d’ailleurs pas mal de saxo, John Wilson reforme TASTE et nous présente le premier album de cette nouvelle formation, ‘Wall To Wall’. Un album où le feu de la guitare jaillit à nouveau. C’est ce nouveau TASTE, composé de John Wilson (JW), Albert Mills (AM) et Sam Davidson (SD), que nous avons rencontré pour vous avant leur concert dans la salle du Plan, à Ris Orangis. Une salle située rue Rory Gallagher…

 

NH : Vous êtes tous les trois Irlandais, mais tous de Belfast ?
JW : Oui, oui, on est tous les trois de Belfast. Quand tu parles de Belfast, la majorité des gens pense tout de suite à Van Morrison, puis au Titanic. Mais pas à nous…(rire). Tu sais, on nous demande toujours, parce qu’on est irlandais, si on a été influencés par la musique traditionnelle irlandaise lorsqu’on était jeunes. Hé bien pas du tout, parce qu’à Belfast on n’écoutait pas de musique traditionnelle irlandaise mais plutôt les Everly Brothers et du Chicago blues. J’aime beaucoup la musique traditionnelle irlandaise, mais c’est venu beaucoup plus tard.
AM : Pour moi aussi, et je pense que c’est la même chose pour pas mal de gens de notre génération.
 
FB : On a entendu dire que vous vouliez faire la promotion du Blues irlandais avec un label que vous avez failli créer…
JW : Oui, c’est vrai, on voulait créer un label mais malheureusement notre timing n’a pas été bon parce qu’on a voulu le lancer juste au moment où la crise économique s’est déclarée, et du coup aucune banque n’a accepté de nous soutenir dans ce projet. C’est dommage, parce que l’on avait, et on a toujours, un studio, Sam et moi.
SD : Mais c’est pas un problème, parce que nous utilisons notre studio pour jouer avec d’autres musiciens et on y prend vachement de plaisir (rire).
 
FB : Peut-être que dans un an, ou six mois, quand la situation économique se sera améliorée, vous pourrez relancer ce projet ?
JW : Oui, mais peut-être qu’à ce moment-là on n’aura même plus besoin des banques, car notre disque va tellement bien marcher que ce sera grâce à Bad Reputation que nous pourrons financer nous même ce label pour faire la promotion du Blues Irlandais. On peut toujours rêver, non ? (rire) Mais peut-être que cela ne se passera pas comme j’en rêve, mais c’est pas grave. Faut prendre tout ça avec beaucoup de recul, tu sais, et beaucoup d’humour. Moi, j’ai 62 ans et je suis ici pour m’amuser, et plus pour me casser la tête. Ce que je veux, c’est jouer de la musique, rencontrer des gens sympas, m’amuser, et ne pas être comme ces jeunes musiciens qui veulent faire carrière à tout prix et qui sacrifient tout pour devenir quelqu’un. Et puis je ne veux plus avoir trop de pression mais faire ce que je veux, comme les projets qu’on a, avec Sam.
 
NH : Quel genre de projets ?
JW : Hé bien, par exemple on nous a demandés, à Sam et moi, de composer une comédie musicale dans un style rock. Ca se passerait à la période du Titanic, mais ce n’est pas à propos du bateau. Cela concernera des gens qui ont pris le Titanic, ce qui les a motivés à partir, ce que leurs familles et les autres gens qui ne partaient pas, pensaient d’eux,… et aussi ce que les Américains pensaient à ce moment-là de tous ces immigrés qui arrivaient chez eux, aux Etats-Unis.
 
NH : Que pensez-vous de la situation actuelle de la musique par rapport à celle de la période des 70’s ?
AM : Tu sais, comme John te le disait, il y en a encore beaucoup de vieux musiciens de notre époque qui sont encore très bons et qui continuent à faire de la musique pour s’amuser, pour faire de la bonne musique, et pas comme ces jeunes qui font n’importe quoi pour être connus. Le problème de beaucoup de jeunes c’est qu’ils ne pensent qu’à être connus à tout prix, et ils ne pensent même plus à avoir du plaisir à faire de la musique.
JW : En fait, pour nous, il y a deux catégories d’artistes : les ‘musiciens’ et ceux que j’appelle les ‘musical entertainers’. Et j’espère qu’on est considérés comme des musiciens, et pas des ‘entertainers’.
 
NH : Mais étant irlandais, vous avez cette réputation de vous amuser, de faire la fête, et donc c’est ce à quoi les gens s’attendent.
JW : Bien sûr qu’on a ce ‘bagage’ irlandais, et on en est fiers aussi. L’avantage des musiciens irlandais, c’est qu’ils peuvent voyager n’importe où dans le monde et ils seront toujours extrêmement bien reçus car les Irlandais sont chaleureux, et savent bien vivre. Désolé de le dire ainsi, mais ce n’est pas la même chose avec les musiciens anglais. Quand tu es irlandais, tu peux aller n’importe où et tu seras toujours très bien reçu, comme ici, à Ris Orangis et au Plan. Et puis il faut que je te dise que ça a été un choc pour moi de découvrir qu’il y a ici une rue Rory Gallagher. On ne s’y attendait pas du tout. Quand on est arrivé, je pensais que cela avait été fait pour nous, qu’on nous faisait une blague. Mais voir qu’il y a en France une rue qui porte le nom de Rory Gallagher, c’est…comment dire,…génial.
AM : Oui, c’est vraiment génial.
 
FB : Je t’écoute parler de Rory Gallagher en prononçant le ‘g’ de son nom, alors que beaucoup de monde dit ‘Gallaher’, sans prononcer le ‘g’. Quelle est la prononciation exacte?
JW : Bonne question, parce que c’est vrai que beaucoup de gens ne prononcent pas le ‘g’ de Gallagher alors que chez nous, à Belfast, on le prononce. D’ailleurs c’est drôle que tant de monde fasse cette erreur parce que y’a des Irlandais partout (rires). Regarde par exemple la bassiste d’Eric McFadden qui va jouer avant nous ce soir. Elle s’appelle Paula O’Rourke. Cela, tu le savais,…mais ce que tu ne sais pas, c’est qu’il y a une famille O’Rourke à Cork, que la famille de Paula est de Cork et que c’est la même famille. Mais plus étonnant encore, c’est que Rory était de Cork, et on peut donc imaginer que la grand-mère de Paula a discuté avec la grand-mère de Rory. Le monde est si petit, tu ne trouves pas?
SD : Et y’a des Irlandais partout…(rires)
AM : Quand tu entends des gens rirent et s’amuser, tu peux être sûr qu’il y a des Irlandais avec eux.
 

FB : John, quand as-tu rencontré Rory?
JW : J’ai rencontré Rory en 1966. Il jouait encore à Cork à cette époque-là. On avait failli se croiser avant, en Allemagne, où j’étais allé, au milieu des années 60, avec un groupe qui s’appelait The Misfits. Rory, lui, est passé à Hambourg un peu plus tard que moi. C’est quand Taste a quitté Cork pour jouer à Belfast que j’ai rencontré Rory. C’était le rêve de Rory de jouer à Belfast. Il ne voulait surtout pas rester à Cork, comme s’il craignait que de rester à Cork allait le bloquer dans sa musique. Et puis il voulait aussi jouer là où Van Morrison jouait. Il voulait jouer au ‘Maritime Club’, à Belfast, car à cette époque-là le ‘Maritime Club’ était aussi célèbre que le ‘Marquee Club’ de Londres. Tout ce que Rory voulait, c’était vivre à Belfast, parce qu’à cette époque-là, Belfast était très ‘happening’, musicalement parlant. Le nombre de groupes qu’on y trouvait était faramineux et tout le monde était sympa. C’était une époque où tous les musiciens se parlaient, étaient potes. C’était…très rock’n’roll, alors qu’aujourd’hui les musiciens ne se parlent plus vraiment. Chacun reste dans son coin, comme pour se protéger de je ne sais quoi…
SD : Ca, c’est parce que les jeunes veulent être célèbres, et très vite. Et le côté convivial, amical, ce n’est plus du tout important pour eux.
 
NH : Pourquoi est-ce que Norman et Eric ont quitté Taste et Rory?
JW : Je n’en suis pas totalement sûr, mais on dit que leur manager pensait que Norman et Eric n’étaient pas les musiciens qu’il fallait pour Rory. C’est ce que disait la rumeur qui circulait entre musiciens, et c’est toujours cette rumeur qui circule. Personnellement, je pense que c’est parce qu’il ne voulait pas leur payer ce qu’ils demandaient. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé avec nous, par la suite. On travaillait tout le temps, on faisait des dizaines de concerts et on ne gagnait rien des disques, des tournées, des concerts. Mais à cette période-là, c’était comme ça, on jouait et on faisait confiance…, jusqu’au jour où tu veux être payé et là, on ne te donne presque rien. On nous donnait une enveloppe qui contenait 15 Livres alors qu’on avait joué sept soirs par semaine. Et on nous disait que c’était comme ça. Tu sais, je vais te raconter quelque chose: le jour où j’ai quitté ce manager, j’ai reçu ma dernière enveloppe et il y manquait pas mal d’argent. Et quand je lui ai demandé pourquoi, il m’a tout simplement dit qu’il avait déduit toutes les tasses de thé et les tranches de pain grillé que j’avais consommées depuis le jour où j’avais commencé à jouer avec Taste. Hé oui… Et que voulais-tu que je fasse, car on n’a jamais su combien d’argent le manager avait touché pour nos concerts, la vente de nos disques. On ne savait rien. C’était l’un des mauvais points de toute cette époque.
 
NH : C’est ce que Butch Trucks nous a raconté aussi. Lorsque le Allman Brothers Band a arrêté ses tournées, leurs managers ne leur ont presque rien donné, disant que tout était parti en frais.
AM : C’est parce que nous, tu vois, on était des musiciens et pas des businessmen et qu’on faisait confiance à ces gens là. Nous, on prenait notre plaisir en jouant, et du moment qu’on avait des salles, un public, un coin pour dormir et de quoi boire et manger, on était heureux.
 
FB : Vous avez rencontré des musiciens comme Jimi Hendrix, et Eric Clapton…
JW : (nous coupant la parole) Oui, c’est vrai, on a rencontré plein de gens comme ça, mais tu sais, en fin de compte, ils sont comme nous. Pour moi ce sont des gens ordinaires. Ce que je veux dire, c’est qu’ils ne sont pas différents de nous. Et puis, tu sais, il y a beaucoup de gens qu’on imagine être très sympas et qui, en fin de compte, ne sont pas si agréables que ça.
AM : C’est comme il y a des musiciens qui vous semblent plus distants que d’autres alors qu’en fait ils sont plus réservés, mais lorsqu’ils sont avec nous ils savent faire la fête et s’amuser comme tous les autres.
SD : C’est aussi toute la difficulté pour connaître vraiment qui est la personne qui est derrière le musicien qui joue sur scène. Un peu comme tu ne peux savoir comment est la personne que tu croises dans un bus, ou dans la rue.
JW : Nous, ce qui nous intéressait, c’est de pouvoir jouer avec des musiciens comme Hendrix ou Clapton, ou aller les écouter jouer. Hendrix c’était Hendrix, tout comme Rory était Rory. Mais en fait on n’était tous, les uns autant que les autres, que des musiciens.
 
FB : Depuis que vous avez repris la route, vous n’avez pas toujours joué dans des salles archipleines, ou si ? Dites nous la vérité…
SD : Hé bien je vais te la donner la vérité. Il n’y a pas très longtemps, on jouait en Allemagne et il y avait six spectateurs dans la salle. Oui, six, c’est tout. Hé bien, que crois-tu que nous avons fait ? On a fait notre show et on a tout donné pour faire plaisir à ces six spectateurs qui étaient venus.
JW : Et je pense que ce concert a été aussi bon, voire meilleur que les précédents donnés dans des salles pleines à craquer.
 
NH : Et cela n’a pas été frustrant pour vous de vous retrouver devant six personnes ? Vous n’avez pas été un peu vexés, sincèrement ?
JW : Non, pas du tout. Et là, je te parle au nom de nous trois. Pourquoi veux-tu que l’on soit frustrés ou vexés parce que l’on ne joue pour six personnes ? C’est le genre de sentiment négatif qu’il ne faut pas avoir car si l’on vient jouer chez toi, pour toi et quelques amis, vas-tu penser que l’on va jouer moins bien que dans une salle comme Le Plan ? Non, on se donnera autant que pour un concert où il y aura beaucoup plus de monde que chez toi, et on y prendra autant de plaisir. Qu’il y ait 2 spectateurs ou 20.000, on ne joue que d’une façon, et c’est de la meilleure façon possible. Quand je sors mes baguettes, c’est pour jouer le mieux possible, et pour que le public ait du plaisir. Tiens, un autre exemple: l’autre soir, on jouait à Monaco et il y avait pas mal de gens un peu coincés, tu vois, qui restaient assis, sans bouger, comme des statues de cire… Alors on a complètement changé notre set car c’est notre devoir de les satisfaire. On a changé de musique et d’ambiance pour que notre concert colle au public qui était là, et finalement on a été très applaudis. Parce qu’on a su leur faire plaisir et leur donner la musique qu’ils attendaient,… et c’est ce qu’on fera ce soir, ici au Plan, même si après Eric McFadden ça va être quelque chose de difficile parce que je sais que le garçon est très bon.
 
FB : Je confirme, le garçon est vraiment très bon…
JW : Et puis en plus, il a une très jolie bassiste, Paula. Nous, on a Albert, mais….il est plutôt mignon aussi, non ? (rires)
 
NH : Quand avez-vous recréé Taste ?
JW : En 2006, mais c’est en 1990 que j’ai rencontré Sam. Je jouais pour un club de jazz, pour la télé, pour d’autres artistes, et puis quelqu’un m’a demandé d’aller jouer juste à l’extérieur de Belfast avec un groupe de blues et j’ai accepté. La première fois, ce ne fut pas vraiment terrible et j’ai dit à Sam, qui jouait dans ce groupe, pourquoi tu ne joues pas comme tu as envie de jouer, et ce que tu as envie de jouer, car je sentais bien qu’il était sur la retenue. C’est comme ça qu’on a décidé de jouer tous les deux, sans le reste du groupe, et ça a marché tout de suite.
SD : Le genre de truc, tu sais, où dès les premières minutes tu sais que ça colle.
JW : Du coup, on est allé beaucoup jouer en Allemagne.

 
NH : C’était quoi le nom de votre groupe ?
SD : Le Belfast Blues Band.
JW : On n’avait peut être pas choisi le meilleur nom pour ce groupe parce qu’à chaque fois que les gens me croisaient ils me demandaient toujours si c’était bien moi qui avait joué avec Rory. Et cela commençait à m’énerver parce que je ne voulais pas que l’on imagine que l’on copiait Taste. Et puis, fatalement, on a commencé à nous demander de jouer ‘Same Old Story’, par exemple. Alors, pour faire plaisir au public, on a joué ‘Same Old Story’ et on est rentré dans cette spirale qui nous faisait rejouer du Taste.
 
FB : Rory était encore vivant, non ?
JW : Oui, Rory était encore vivant lorsque l’on a commencé à jouer ses titres, mais il est mort peu après,…et un ‘Best Of’ est sorti, sans que je sois au courant. Ni Richie ni moi n’avons été contactés pour la sortie de ce ‘Best Of’. C’était le frère de Rory, Donald Gallagher, qui en était l’initiateur, et tu ne sais pas ce qu’il a osé faire ? Nous demander d’assurer des interviews pour faire la promo du CD. Tu parles d’un ridicule ! Avec Sam, on est alors partis pour la Russie et les USA, pour jouer, et là encore, on s’est retrouvé face à des publics qui nous demandaient de jouer des titres de Taste. On en a joués et ça a été un gros succès. C’est là que je me suis posé la question de savoir comment on allait pouvoir continuer, et si, finalement, le mieux n’était pas de reprendre le nom de Taste. Mais ce qui me gênait, en reprenant ce nom, c’était de placer mon ami Sam à la place de Rory, car quand tu t’appelles Taste, on attend le trio, bien sûr, batterie-basse-guitare, mais avec des noms. Pour Albert et moi ce n’était pas un problème, mais pour Sam,…pauvre Sam, me disais-je. Comment allait-il supporter ce poids ?
 
FB : Peut être auriez-vous pu choisir un nom de groupe style Tribute to Rory Gallagher ?
JW : J’y avais pensé, oui, mais le problème, c’est quel que soit le nom que l’on choisisse, ce serait toujours le pauvre Sam qui serait comparé à Rory. Alors autant choisir le nom de Taste. Et j’ai finalement accepté que l’on reprenne le nom de Taste à la condition que Sam ne cherche jamais à jouer comme Rory, mais comme il joue.
SD : C’est vrai, c’est la condition de départ que John avait fixée. Et finalement cela nous a tous libérés et l’on a pu jouer sous le nom de Taste sans aucun problème, sans se poser aucune question.
JW : Tiens, je vais vous raconter une anecdote. On joue souvent en Allemagne et c’est assez courant qu’en première partie on nous mette un groupe qui est un hommage à Rory. On nous dit, « Vous allez voir, ce gars, il joue comme Rory ! », et quand il arrive sur scène, non seulement il fait tout pour jouer comme Rory, mais en plus il est coiffé et est habillé comme Rory. Et ça, tu vois, c’est ce que je n’aime pas, parce qu’en fait je n’ai encore jamais entendu un de ces guitaristes jouer comme Rory. Personne ne jouera jamais comme Rory. Et c’est pour ça que j’aime comment joue Sam, parce que lui, Sam, il joue les chansons de Rory, mais en restant lui-même. C’est grâce à cela que j’ai accepté de reprendre le nom de Taste pour le groupe. Et puis garder le nom de Taste est aussi le meilleur moyen de garder vivante la mémoire de Rory.
 
NH : Vous n’avez pas eu de problème pour garder le nom ?
JW : Non, parce que Richard et moi faisions partie du groupe et que nous sommes tous les deux encore vivants. Nous avons donc eu le droit d’utiliser le nom de Taste. Mais si, à travers ta question, tu me demandes si Donald Gallagher aime ce que nous faisons, la réponse est non. Il nous a même empêché de sortir un album en hommage à Rory, et je peux te dire que les fans n’ont pas été contents, car ils n’ont pas compris pourquoi il s’opposait ainsi à un album dédié à Rory. Par contre, il ne peut absolument pas nous empêcher d’utiliser le nom de Taste car nous sommes deux du groupe, et on a donc le droit de reprendre le nom de Taste.
 
NH : Comment expliques-tu l’attitude de Donald ? Il devrait être très ouvert à tout ce qui peut valoriser l’image de Rory, non ? Ou n’est-ce pas parce qu’il veut tout contrôler, surtout financièrement ?
JW : Je pense que Donald est très protecteur. Protecteur dans le sens où il veut protéger l’image de son frère et que rien ne puisse la dégrader. Tu sais, moi je reste très ouvert et je suis toujours prêt à lui parler et à lui serrer la main, car je le respecte pour ce qu’il a fait pour défendre la mémoire de Rory, même si parfois cela va un peu trop loin…

 
NH : C'est-à-dire, trop loin ?
JW : Je vais te donner un exemple et tu vas comprendre tout de suite. Deux mois après la mort de Rory, j’ai reçu un courrier de Brian May, de Queen, qui me disait qu’il avait été contacté pour participer à un album en hommage à Rory, et dans lequel il y aurait Eric Clapton, Jeff Beck, et Brian m’écrivait pour me demander s’il pouvait jouer ‘Morning Song’ avec Richie et moi. Comme si on allait dire non… Et en fait, cet album n’a jamais vu le jour parce que la plupart des artistes qui devaient y participer avaient joué dans un concert pour la lutte contre le Sida et Donald ne voulait pas qu’on associe la mort de Rory au Sida. Voilà un exemple de la manière dont Donald protège par tous les moyens la mémoire de Rory.
 
FB : Venons-en à cet album, et cette chanson, ‘The Wall’, que nous avons adorée.
JW : (nous coupant la parole) Ca me touche vraiment que vous aimiez cette chanson, car cette chanson contient beaucoup de choses qui concernent l’Irlande, comme les murs qui existaient entre irlandais du nord et du sud. Pas des murs comme le mur de Berlin, mais des murs dans les têtes, et dans les relations entre les gens.
 
NH : Cette chanson, c’est une histoire d’amour impossible…
JW : Oui, absolument, c’est un mur qui sépare deux êtres qui s’aiment. Ce mur, c’est leurs cultures respectives, leurs religions, leurs familles, leurs pays. Lorsqu’on l’a écrite, on avait en tête de composer une chanson pour l’Europe, pour que plus jamais on n’y trouve de murs, réels ou pas.
 
FB : Et si on vous avait demandé d’aller la chanter pour l’anniversaire de la chute du mur de Berlin, fin 2009 ?
JW : Ha oui…! Dommage que d’autres n’ont pas eu ton idée, parce que oui, je pense que cela aurait été une très belle chanson pour cet anniversaire important, surtout que notre chanson parle justement de tout le mal que peut faire un mur entre deux personnes.
AM : C’est vrai, je pense que cela aurait été un très beau moment pour tous, et pas que pour nous. Et je pense que cela aurait été également un symbole énorme pour les Irlandais de nous entendre chanter cette chanson à Berlin.
 
NH : C’est vrai que vous avez chanté avec la fille de Van Morrison ?
JW : Oui, tout à fait. C’était il y a quelques années, alors qu’on jouait aux Etats-Unis. Pendant un des concerts, Shauna Morrison, la fille de Van, est venue nous voir dans les coulisses et quelqu’un lui a dit que j’avais joué avec son père. Et en fin de concert, alors qu’on commençait à jouer ‘Gloria’, Shauna est venue sur scène pour chanter avec nous.
SD : Ouais, ca a été un super moment, et j’espère qu’on arrivera à la faire venir en studio pour chanter avec nous sur le prochain album.
 
NH : Et pourquoi pas quelques autres ‘guests’, en plus ?
JW : Tu vas rire, mais c’est exactement ce dont on discutait, l’autre jour, tous les trois. On pourrait faire venir Pat McManus, que tu connais bien, je crois, mais pourquoi pas aussi des mecs comme Eric McFadden, qu’on a découvert, ici, en France.
SD : C’est un mec super, et un excellent guitariste.
 
FB : Dis par le guitariste de Taste, c’est un vrai compliment ça…
SD : (hoche la tête) Tu peux me croire, tu sais, c’est vraiment un excellent guitariste.
AM : Et un très bon chanteur, en plus !
JW : Et qui a une très jolie bassiste… ! (rires)
 
NH : Vos projets immédiats, à part la scène ?
JW : Quand on va rentrer en Irlande, on va préparer une démo de morceaux à jouer pour des bikers, parce qu’on fait pas mal de festivals de bikers en Irlande et on joue souvent des titres comme ‘Born To Be Wild’…et on aimerait bien aussi faire ça en France et en Allemagne aussi.
 
FB : Et des festivals de blues ?
JW : Bien sûr qu’on aimerait en faire, bien sûr, mais à ce moment-là ce ne sera pas du tout le même répertoire. C’est comme pour la soirée de la Saint Patrick, pour laquelle on va jouer avec Pat et quelques autres au Trabendo, à Paris. Venez, tous les deux, parce que ce sera une super soirée, vous verrez….(rires)
 
 
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