Concert de Eric McFadden et TASTE au Plan

                   

                  Concert de Eric McFadden et TASTE au Plan

 
Reportage: Dominique Boulay
Photos: Frankie Bluesy Pfeiffer
 
La coïncidence était telle que je n’avais aucune raison valable pour louper ce qui est pour moi un double événement: ma première visite au Plan, rue Rory Gallagher à Ris Orangis, et l’un des tous premiers concerts du come back de Taste.
Faute avouée étant immédiatement pardonnée, je dois dire que je n’étais, en effet, jamais venu au Plan, salle située pas si loin que ça de mon Val d’Oise de résidence mais que ni la bonne distance kilométrique ni la très mauvaise gestion du réseau routier régional ne m’avaient réellement motivé. Même si au compteur il n’y a qu’une cinquantaine de kilomètres entre le canapé de mon salon et le bar du lieu des festivités, faut reconnaître qu’en y allant j’ai eu comme l’impression que cela roule bien mieux sur les boulevards périphériques engorgés de Pékin et sur les cinq voies qui contournent Los Angeles que sur le réseau routier francilien.
Vous écrire qu’il nous a fallu plus de cent dix minutes pour faire le trajet n’est pas un dérapage du clavier car pour faire ce trajet ‘rapidement’, en moins d’une heure, faut attendre minuit passé de quelques bons quarts d’heure. Mais la motivation étant le fer de lance de l’équipe de Paris-Move, et l’enjeu en valant largement la chandelle, même éteinte, c’est avec kourage (avec un ‘k’, oui) que je me suis lancé sur la francilienne, direction Le Plan.
 
En première partie de soirée, c’est le Eric McFadden Trio qui ouvre les hostilités, avec un McFadden en pleine forme, bondissant d’un côté à l’autre de la scène comme un lion en cage, maniant sa gratte comme une hache, un sabre, une flamme olympique, la dressant vers le ciel tout en offrant à la salle des solos absolument fabuleux.
Côté gauche, c’est une bassiste américaine particulièrement allumée mais d’une dextérité diabolique, Paula O’Rourke, qui impose la cadence, entraînant dans son tourbillon le batteur français retenu pour cette tournée et qui, ma foi, s’en sort avec les honneurs.
 
Fidèle à son habitude, devrais-je dire, le McFadden assure sans en rajouter mais avec une telle classe qu’on se demande bien quel guitariste pourra un jour rivaliser avec le loustic. Doué comme pas possible, il passe de la gratte acoustique jouée de manière hispanisante à la six cordes électrique d’où il vous sort des soli à vous coller des frissons par vagues incessantes. C’est indéniablement la grande classe, la très grande classe, et l’on se demande encore pourquoi le bougre n’a pas encore envahi les radios et les émissions de télés style Taratata si ce n’est que la dextérité et le génie du mec pourraient faire de l’ombre à pas mal de monde…
 
Ce McFadden, je l’avais déjà remarqué lorsqu’il accompagnait Eric Burdon et ses Animals de circonstance, au Trabendo, il y a quelque temps déjà. Même s’il avait du faire preuve d’énormément de retenue, on avait senti le bougre prêt à exploser, à tout donner. Ce qu’il fait en cette soirée, alignant pour l’occasion bon nombre de titres de son dernier opus, ‘Train To Salvation’, un album à vous scotcher au plafond et que l’équipe de Paris-Move vous recommande plus que vivement (CD dispo sur le site de Bad Reputation).

 
A entendre Eric McFadden en live et le voir jouer avec une telle énergie, on ne peut qu’espérer qu’une télé ou une radio mette (enfin, car le bougre a déjà sorti près de vingt albums!) le doigt sur ce phénomène, cet artiste, dans le sens premier du terme. Un artiste que rien ne semble perturber et qui continue à chaque fois à prendre un plaisir immense à jouer là où il est invité, preuve que non seulement l’homme est un professionnel mais aussi un garçon d’une générosité extrême.

 
PS: Et puisque mon rédacteur en chef n’a pas pour habitude de sabrer dans mes textes, j’en profite pour vous (re)dire que ce concert fut, comme chaque concert de Eric McFadden, génial, et que tous ses albums le sont également. Voilà qui est dit.
Quant aux programmateurs de concerts, prenez-en de la graine car Le Plan démontre qu’il est possible d’organiser de véritables soirées de choc!
 
 
En deuxième partie de ce vendredi soir, ce sont trois Irlandais qui arrivent pour prendre possession de la scène, et c’est tout de suite le choc avec le premier titre, ‘What’s Going On’. Adolescents, nous avions trituré dans tous les sens la pochette du trente trois tours, au point de la réduire en charpie, car il n’y avait pas que cette chanson qui avait marqué nos esprits, mais l’intégralité de l’album. C’était l’époque où un Irlandais chevelu avait bouleversé le monde de la Fender, tout comme Jimi Hendrix l’avait fait aussi, à sa façon. Ce sont des décennies qui s’effacent en quelques secondes et toute notre jeunesse nous saute à la figure, nous revient en mémoire: la copine de classe avec laquelle on flirtait, les potes avec lesquels ont jouait de la gratte, les 33 tours qu’on s’échangeait comme de précieuses reliques, les mobs, les images de l’ile de Wight, et puis ce putain de groupe qu’était Taste, avec ce guitariste de génie qui nous laissait sur le cul, un certain Rory Gallagher.
 
En ce vendredi soir, les morceaux vont s’enchaîner à toute allure, comme si toute limitation de vitesse était 
suspendue et tous les radars en berne. Même le nouveau guitariste-chanteur, Sam Davidson, fait illusion, tant ses intonations rappellent, parfois, le premier guitariste de la formation. Tout comme certains de ses riffs.

 
Entre soli de guitare, de batterie et de basse, les morceaux de légende comme ‘Same Old Story’ et ‘Messin’With The Kid’ alternent avec des titres de leur tout dernier opus, ‘Wall To Wall’ (sorti en 2009 chez Bad Reputation), nous plongeant dans un nouvel univers Taste que le trio illumine de toute sa générosité. Un univers que je vous recommande vivement de découvrir le jour de la Saint Patrick, le 17 mars 2010, au Trabendo, puisque nous aurons le bonheur d’y retrouver Taste, mais aussi Pat McManus, Andy Powell (ex Wisbone Ash) et Eric Bell (ex Thin Lizzy) au cours d’une soirée qui sera placée, sans aucun doute, sous le signe du malt et du houblon.
 
 
 
John Wilson, batteur de la formation et membre originel du mythique trio de départ, ne fait pas que battre la mesure, il réécrit les morceaux, nous livrant une version ‘épurée’ de certains d’entre eux et pour lesquels la batterie, à elle seule, pourrait suffire tant les martellements des fûts remplissent la ligne mélodique des compositions. Côté guitare basse, c’est un Albert Mills à la chevelure blanche qui en impose, avec discrétion, certes, mais avec une telle maîtrise que son jeu ferait pâlir pas mal de bassistes se croyant doués. Comme un clin d’œil à cette époque de la rock musique où chaque membre des formations en présence ne manquait pas de nous donner la preuve qu’il était plus qu’un batteur, plus qu’un bassiste ou plus qu’un guitariste.

 
Habituellement appelée ‘final’, la troisième partie du concert pourra être qualifiée de feu d’artifice, de typhon ou de tsunami tant l’énergie y est palpable, à fleur de peau. Toujours aussi fougueux et passionné de belle musique, c’est un Eric McFadden tout sourire qui remonte sur scène, invité par le trio irlandais. Un final d’une telle beauté qu’il mériterait une page entière à lui seul, ne serait-ce que pour vous décrire le duel monumental que se livrèrent Eric et Sam à la guitare, un duel digne des plus grandes anthologies guitaristiques.
 
 

Ceci dit, mon rédacteur en chef ayant ses contraintes, je me dois de laisser la place aux photos, vous recommandant simplement de noter qu’en mai 2010 ce Eric McFadden devrait revenir en France, et que Taste sera au Trabendo pour la Saint Patrick.