THE RIFLEBIRDS OF PORTLAND – Windmills On The Moon

Regional Records
Pop
THE RIFLEBIRDS OF PORTLAND - Windmills On The Moon

C’est l’histoire classique d’une bande d’amis qui se piquent de monter un groupe au mitan des années 80, sans que le lieu en soit aussi significatif que de nos jours. Portland n’en est alors encore qu’aux balbutiements de ce qui constituera l’une des scènes artistiques américaines les plus prolifiques au tournant de ce millénaire. Se composant d’un frère et d’une sœur, les Oser (Kate chante, et Lee assure la basse et la guitare rythmique), flanqués d’un lead-guitarist, Kevin Kraft, et d’un batteur, lui aussi prénommé Kevin (Jarvis), le quatuor propose une jangle-pop réminiscente des Byrds, comme les Bangles en avaient récemment établi le standard. Se dénommant simplement The Riflebirds, ce college band se produit essentiellement sur le circuit estudiantin de sa région, et connaît son apogée en publiant en 1989 un EP quatre titres (“April”, exclusivement disponible au format cassette), produit sous la houlette d’un Marvin Etzioni alors fraîchement émoulu de Lone Justice. Le temps que le single qui en fut tiré n’attire l’attention de Columbia Records, nos amis avaient déjà splitté, chacun s’en retournant à ses chères études… Hormis l’obstiné Jarvis, qui continua à battre trois décennies durant (derrière Elvis Costello, Lucinda Williams, Iggy Pop, Rodney Crowell, Peter Case, Bo Diddley, Donovan, Steve Wynn, les Bangles ou encore Brian Wilson, entre autres), jusqu’à fonder son propre studio d’enregistrement (Sonic Boom Room à Venice, en Californie). Entre temps, Lee Oser (principal parolier et compositeur) avait embrassé la carrière de professeur de littérature, sa frangine celle de bibliothécaire pour enfants, et Kevin Kraft celle de concepteur informatique dans la Silicon Valley… Comme dans un feel good movie hollywoodien, ces quatre-là n’en ont pas moins fini par remettre le couvert, quelque 35 ans plus tard, et voici donc leur second album, dont le producteur s’avère, comme par hasard, à nouveau Marvin Etzioni. Devenu entre-temps un sorcier de renom, ce multi-instrumentiste sévit en outre désormais avec son ami d’adolescence Willie Aron au sein de Thee Holy Brothers (deux albums, chroniqués ICI et ICI), et co-signe ces dix nouveaux titres avec Lee (celui-ci s’en réservant par ailleurs la primauté des lyrics). Pendant leur si longue absence, un groupe australien ayant à son tour adopté le même nom (le rifle bird est en effet une espèce de volatile autochtone des antipodes), nos amis se sont vus contraints d’ajouter leur localité à leur patronyme, mais hormis l’inéluctable maturité qui les guette désormais, leur son originel se révèle miraculeusement quasi-inchangé. Mixé par Sean Magee dans les mythiques ex-EMI studios d’Abbey Road à Londres, ce disque fut sans surprise capté dans ceux de Kevin Jarvis au soleil de L.A., et il s’ouvre sur le catchy folk-pop “Sometime Somewhere”, que chante Kate dans la veine Haight & Ashbury de la regrettée Signe Anderson (figure de proue de The Great Society, qui préfigurait en 66 le Jefferson Airplane). Hormis leur similitude de time-lapse, “She’s Not There” n’a par contre rien de commun avec le titre homonyme des Zombies, que reprit une bonne décennie plus tard ce grigou de Carlos Santana. Ornée d’un délicat fingerpicking, la plage titulaire s’enrichit des chœurs qu’y prodigue la nouvelle génération de Kraft et d’Oser (Grace et Briana). “My Mournful Bride” accentue sa touche rétro-vaudeville avec le renfort du trombone de David Ralicke, avant que le christian funk “Reach Out (Touch The Divine)” n’évoque les temps reculés où les Byrds de ce converti de Roger McGuinn scandaient “Jesus Is Just Alright” (bientôt rejoints à ce tabernacle par des Doobie Brothers pourtant pas si catholiques). Plage la plus faiblarde du menu, “Penguin” rappelle certains des rudimentaires efforts pianistiques d’un Lennon ou d’un Townshend en panne d’inspiration. Par malchance, c’est aussi la plus longue du lot. Le songwriting accuse dès lors un plateau, puisque le fade “It Doesn’t Matter Much To Me” mérite bien son titre (en dépit de ses chœurs et d’arrangements de cuivres qui n’en peuvent mais). Nos amis se reprennent heureusement avec le sunshine pop “You Win” et son mambo twist léger (dont Lee revendique à bon escient la filiation avec le regretté Buddy Holly), ainsi que le parting play “Last Day Of Your Love” (auquel Kate appose une touche de drame et de fraîcheur mêlés), avant de conclure sur l’incertain “Where Does The River Lead”. Avec ses persistantes effluves d’un indicible West-Coast spirit (que renforce sa dimension amicalo-familiale), voici certes un album sympathique, mais que l’on peinera toutefois à qualifier d’indispensable.

Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co

PARIS-MOVE, July 17th 2025

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