ZU et les Zigs – Acte 1, Scène 1 – En concert à la Grooverie

Autoproduction
Blues

“Ce ne sont pas quelques lignes de plus sur nos peaux tannées que je veux inscrire, aucun tatouage, aucun code facile, mais des caresses au scalpel, des mots incisifs, des images volées à nos existences possibles, je veux dire que la vie est une poésie sauvage et griffée où émerge parfois le sourire du rêve, une baffe qui aurait de la gueule, un spasme jouissif, essorer des distorsions dans nos machines à lover, faire l’humour pour avorter, donner sens à d’autres naissances, donne-moi cette sagaie que je crève la feuille, et ton ouïe, et ton huis, ouvre-moi ta porte mon ami, mon blues est une quête.
Relie tes ratures!” – ZU blues.

Depuis quelques années, comme aux âmes bien nées, avec deux albums à son actif dans ce monde loin du fictif, presque sans un flouze, Zu traine son blues. Fidèle à la langue de Molière, même si le genre est difficile, car on le sait, excepté pour les précurseurs de cette discipline que l’on connait et qui depuis quelques décennies ont tracé leurs sillons, une sorte d’aversion plus ou moins justifiée s’empare des programmateurs de festivals à l’écoute du moindre phénomène de leur langue natale associé au blues. Fort de ses convictions, avec en lui cette perpétuelle motivation, sachant qu’il y a du pain sur la planche, Zu remonte ses manches pour qu’à l’unisson balancent nos hanches. Zu persiste et s’entoure de trois musiciens professionnels, ses Zigs que sont Georges-Henry Peyrin aux claviers, Laurent Coulaud à la batterie et Jérémie Vinet à la basse et aux choeurs. La démarche est osée, car à ce jour le quartet n’a donné qu’un seul concert, en mars 2018, à la Grooverie à Lyon. Ce concert fut filmé dans le but de convaincre les organisateurs de festivals, les patrons de salles et même pourquoi pas, de trouver un tourneur. Ainsi est né et s’est vinifié ce nouvel album dans les chais de l’artiste, enregistré en public et totalement financé par une campagne de crowdfunding via Ulule dont la sortie est imminente en ce mois de septembre 2019.
Pari tenu, pari gagné! Quel bonheur de pouvoir profiter du meilleur pour plus d’une heure d’un blues swinguant et festif au fil de 9 compositions jouissives et 3 superbes adaptations de reprises. Tel un excellent cru millésimé, sans sulfites ajoutés, ce blues du terroir et de proximité est bio et certifié par un label Groove de Producteurs, garant de la survie de l’espèce.

Zu est un poète, sa plume tisse des fils de différentes textures et différentes couleurs pour broder les mots, embobiner le verbe pour qu’il s’accoquine en toute impunité avec le sujet, conjuguant le participe passé en bleu indigo jusqu’au présent de l’imparfait en monochrome. Un travail d’orfèvre comme savaient si bien le faire dans un autre domaine les dentelières d’antan.
Dès ce premier titre, ‘On ne vit qu’une fois’, la voix suave et les accords de guitare de Zu nous guident, l’amour roule autour de nous. Allez, donne ta main et soyons fous.
Le thème de cette chanson, ‘Homme de joie’, ne laissera personne insensible sur cette question existentielle concernant le plus vieux métier du monde. “Pas toujours un tapin facile, le métier ne tient qu’à un fil, pas toujours sous les lumières, parfois juste un lampadaire, le maquereau en coulisses fournit les artifices”.
En cadeau pour vous, lecteurs de Paris-Move, voici la vidéo de ‘Homme de joie’, ICI

Pratiquer l’humour sans autodérision est un manque de respect, dit-on. Zu est franc et l’avoue sur ce titre, ‘Je parle mal’. “Mais que voulez-vous, suis pas allé aux puces de Maxwell Street, il n’y a pas de Muddy Waters dans mon white spirit, je chante le blues dans ma langue natale , moi aussi j’dis des gros mots, je parle mal.”
D’ailleurs Zu confesse, je suis ‘Mûr pour le blues’, “j’y aspire comme une ventouse, j’entends chanter les Andalouses. J’ai fait mon virage, j’ai pris la route, c’est l’histoire du poète en déroute, je fais mon trou, je pisse partout où on veut de moi, de mon bagout. La corde sensible en résonnance, j’vous jure qu’il y a de l’échos en France.”
Avec quelques notes chatoyantes, Zu dévoile quelques parcours de la vie parsemés de différentes teintes sur un échiquier de couleurs vives et corrosives avec ces titres ‘Que le rose nous grise’, “A quoi ça te serre cet ivoire clair, les défenses t’enfoncent dans l’errance et ses ronces”. ‘On joue les bleus’, “ça marchera pas sous la terreur, où est passé le pouvoir des fleurs? Faudrait pouvoir bâillonner dieu, on est bavards, on joue les bleus.”
De plus, c’est bien connu, l’humour est l’adrénaline des optimistes et Zu cultive l’humour, tel l’équilibriste en apesanteur sur un fil tendu, jonglant avec la prose de ses compositions.
Il semble en rire lui même sur ce titre ‘Blanc-bec’, “j’voudrais changer de gueule, me tartiner de cirage, faire bien plus que mon âge et chanter comme l’aïeul. Il faut te faire une raison, mec, toute ta vie tu seras un blanc-bec.”
Notre bluesman n’est pas du genre à faire du lèche bottes blues, ni cirer les pompes des autres d’ailleurs, bien trop occupé par l’état des siennes, ses grolles en piteux états. Pour vous dire, même le cordonnier a revêtu son habit de croque-mort lorsqu’il a vu ses pompes complètement usées, il a ouvert la poubelle et a flanqué Zu dehors! C’est ‘Le blues des shoes’.
Après la gaudriole, passons au vitriol, avec cette chanson engagée, ‘Pourvoir’. Le texte est explicite, je cite, “Ils se pavanent en limousines et osent rôder vers les usines, ça fricote avec la justice, je tombe un peu, je reviens vite et à la raie publique le pisse.”
Superbe est cette adaptation d’un vieux blues ‘I’m Tore Down’, maintes fois repris, mais que nous devons au pianiste Sonny Thompson. Zu se l’approprie et écrit le texte en français dont le titre est ‘J’suis bourré’. “Je t’aime ma belle, mais chaque fois que tu pars, tu me laisses seul ici. J’suis bourré, j’suis en train de piquer du nez”. Je me pose la question, car Zu chante avec tellement de conviction, qui est cette belle…?
Avec humour j’en fais la déduction suivante, sans le savoir je me suis dit que peut-être le prénom de la belle rimait avec Pimprenelle.
Si c’est le cas, après une telle cuite, réelle ou fictive, et après que le marchand de sable soit passé, le lendemain au réveil, j’imagine qu’en se frottant les yeux avec un large sourire aux lèvres que Nicolas est Content….. un Nounours passe…..bonne nuit les petits.
(Désolé Zu, je n’ai pas pu m’empêcher, la tentation était trop forte, mais promis mon pote, je ne recommencerai plus.)
Zu rend hommage à deux des ses mentors, pionniers du Blues que sont Benoit Blue Boy avec ce titre ‘Allonz’ au tortillage’ et également à Bill Deraime avec ‘Tire ailleurs’, laissant s’exprimer par un long solo chacun de ses musiciens aux claviers, à la basse et à la batterie. Ces derniers, complices aguerris, sur tous les titres déjà cités donnent de par leurs talents respectifs quelques lettres de noblesse supplémentaires à ce blues identitaire, tout comme le fait Zu, disons le, guitariste hors pair.

Dans notre patrimoine du Blues chanté en français, Zu n’est pas le seul à exceller, tant par la force des textes, de la poésie et de la musique, il sont un certain nombre. Je ne vais pas ici les citer de crainte d’en oublier, mais sachez qu’il existe une page Facebook consacrée à cette discipline du Blues chanté en français où vous pourrez retrouver et également découvrir tous ces artistes, c’est ICI

Si Paris vaut bien une messe dite en latin, l’hexagone vaut bien au moins un festival de Blues chanté en français! Mesdames et Messieurs les programmateurs, le message est passé! Tous ces artistes et ces groupes méritent amplement de partager la scène lors des différentes manifestions dans le milieu de blues, en France, et même au delà de nos frontières.
Public de la région lyonnaise, notez sur vos agendas cette date du 4 octobre 2019 à l’Entrepot à Villemoireu, dans l’Isère. Zu et les Zigs joueront pour la sortie live de cet album. L’occasion de vous le procurer avec dédicace!
Sinon, pour le commander, ainsi que les deux précédents opus de Zu, rendez-vous sur son site officiel, c’est ICI
L’album est également distribué sur le label Bluesiac, ICI
Et n’oubliez pas de vous rendre sur le page Facebook de Zu Blues pour suivre ses actualités, ICI

Et surtout rappelez-vous ceci: ‘On ne vit qu’une fois’, alors laissez le bon temps rouler! Pour voir la vidéo de ‘On ne vit qu’une fois’, c’est ICI

Il faut le dire et le redire: Zu est un poète, sa plume tisse des fils de différentes textures et différentes couleurs pour broder les mots, embobiner le verbe pour qu’il s’accoquine en toute impunité avec le sujet, conjuguant le participe passé en bleu indigo jusqu’au présent de l’imparfait en monochrome. Un travail d’orfèvre comme savaient si bien le faire dans un autre domaine les dentelières d’antan.

Alain AJ-Blues
Rédacteur en chef adjoint – Paris-Move

PARIS-MOVE, September 11th 2019