ZIAD RAHBANI – Bennesbeh Labokra… Chou?

WeWantSounds / Modulor
Musique de film
ZIAD RAHBANI - Bennesbeh Labokra… Chou?

Fils aîné de l’immense diva libanaise Fairouz (ainsi que de son mari Assi Rabhbani), Ziad Rahbani entama sa carrière musicale dès l’âge de 17 ans, en écrivant pour sa mère le tube “Sa’ Alouni El Nas”, avant de reprendre auprès d’elle le rôle de directeur musical laissé vacant par son père malade. Ayant déjà réédité les imparables “Wahdon” (de 1979) et “Maarifti Fik” (1987) qu’il composa et produisit pour elle, WeWantSounds s’attache à présent à réhabiliter un véritable joyau de la musique arabo-occidentale des seventies, avec la réédition de son second album solo. Remastérisée au format LP vinyle (et reproduisant fidèlement la pochette originale gatefold double), celle-ci met, sinon fin, un frein conséquent à la quête spéculative de collectionneurs éperdus disséminés de par le monde. Sorti la même année que son prédécesseur de quelques mois (“Abu Ali”, lui aussi incunable notoire), “Bennesbeh Labokra… Chou?” constitue la bande originale d’une pièce de théâtre écrite, montée et interprétée par Ziad en 1978. Et le moins que l’on puisse en dire est qu’elle rivalise aisément avec nombre de film-scores de son époque. Des plages où l’on décèle des références patentes à Henry Mancini (“The Pink Panther”), telles que les bossas “First Introduction”, “Second Introduction” et “Last Scene”, ainsi que le languide “Variation 5” (que Ziad interprète seul au piano), ou d’autres plus proches de Lalo Schifrin (“Variation 1”, “Variation 2”, “Variation 3″, Variation 4”, et surtout ce magistral “Final Theme”, aux orchestrations dignes d’un John Barry), en avoisinent d’autres davantage représentatives de la tradition orientalo-libanaise (“Reda”, “Al Bosta”, “Wahda Balak”). Songer que ce surdoué trublion n’était alors âgé que de 22 ans donne le tournis : voici en effet une authentique pépite, méritant de figurer au panthéon des plus brillantes B.O. seventies. Rien d’étonnant à ce que l’on se la soit échangée au prix fort sur le marché parallèle des décennies durant. Alors qu’il vient de fêter son 65ème anniversaire, Ziad Rahbani, son répertoire et celui, intimement lié, de sa mère, figurent au patrimoine immatériel d’une nation libanaise meurtrie, mais plus que jamais attachée à sa culture après des décennies de guerre, de corruption, d’occupation et de drames. Tandis que le cours de sa monnaie poursuit sa chute vertigineuse, son PIC (Produit Intérieur Culturel) se maintient donc pour sa part au top.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, March 22nd 2021

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Cela ne nous rajeunit certes pas, si l’on se souvient que cet album est sorti en 1978. Mais cela ne transparait pas dans la musique que nous écoutons en ce moment. Car WeWantSounds est une référence en matière discographique. Un label global qui fait le choix de se centrer sur des artistes et des disques qui lui tiennent à coeur! A ce jour, 78 albums figurent dans le catalogue: Buddy Terry, Harold Land, Jack Wilkins, Don Cherry, Jaye P. Morgan, Alice Clark sont de ces artistes qui en font partie. Un onglet “communauté” assure le lien quand on ouvre le site entre les gens du label et les mélomanes, fans des musiques proposées par celui-ci, pour que les échanges opèrent entre les différents membres. Ce disque est un mélange de musique arabe, de jazz et de musiques qui pourraient apparaître comme des bandes originales de cinéma. En fait, la musique proposée sur ce disque est la musique originale d’une pièce de théâtre écrite et interprétée par Rahbani lui-même. Cet album est devenu un classique, très recherché par les collectionneurs. Sa réédition est pour eux, et pas pour les spéculateurs de tout poil. Mario Choueiry, de l’Institut du Monde Arabe, a supervisé la réédition de l’album avec sa pochette originale gatefold, remasterisé et avec insert de 2 pages, et il en présente une nouvelle introduction. Ziad Rabhani n’a pas attendu les années pour se faire remarquer sur la scène musicale libanaise. Fils de la Diva libanaise Fairouz et de Assdi Rahbani, compositeur et membre d’un groupe célèbre, il a composé pour plusieurs disques et est devenu un producteur fameux. Il produira lui-même sa mère, à la mort de son père. Il réussit très vite à fusionner influences occidentales et musique traditionnelle arabe. En plus de l’album dont nous parlons il réussit à sortir un deuxième album en 1978, Abu Ali. Cette musique, bande originale de la pièce, est avec celle-ci un immense succès qui contribue à ce que l’album sorte la même année. Il fallait à la diatribe sociale sur la société Beyrouthine (entre l’Europe, l’Occident et le Moyen Orient) un fond musical qui lui corresponde: mélange de musique arabe, bossa-nova, groove et jazz! Le contrat est plus que rempli avec ce superbe album qui n’a pas pris une seule ride.

Dominique Boulay
Paris-Move & Blues Magazine (Fr)

PARIS-MOVE, May 5th 2021