Jazz Fusion, Musique expérimentale |
Derrière ce nom original de formation musicale (qui n’a rien à voir avec les pseudos de certains joueurs asiatiques avec profils de personnages de Manga, tels XZonn ou XZon, par exemple) on croise la route de deux musiciens, le bassiste Bernard Paganotti et son compère Bertrand Lajudie (piano, claviers et programmations) qui se sont retrouvés pour élaborer un nouveau projet discographique afin de composer et interpréter une musique instrumentale électrique et organique.
Le binôme a associé dans sa démarche le batteur Antoine Paganotti, fils de Bernard, l’impliquant dans le processus créatif, le trio signant d’ailleurs ensemble le sixième et dernier titre de cet opus, ‘Fast’.
Avant de se pencher sur ce nouvel album, quelques références passées sont à souligner, qui vous permettront ainsi de comprendre l’orientation musicale proposée par ‘Ondes’.
Le nom étrange de la formation, XZonn, mais surtout celui de Bernard Paganotti, feront revenir en mémoire de ‘vieux’ souvenirs à ceux qui ont vécu l’émergence puis le raz de marée Magma. Car de la rencontre de Bernard avec Christian Vander, en 1966, naît le groupe Chinese, formation que Vander quittera un an plus tard mais que Bernard va s’employer à faire tourner, sous le nom de Cruciférius Lobonz puis Cruciférius, jusqu’à la fin de l’aventure, en 1970. Mais le lien Vander-Paganotti n’est pas cassé et c’est en décembre 1974 que Christian Vander propose à Bernard de remplacer Jannick Top au sein de Magma. Sur plusieurs albums de Magma, Bernard sera ainsi mentionné sous son ‘nom kobaïen’: Ẁurd/ Ēmgalaï. En ’76, Bernard quittera Magma et sera très demandé comme ‘session man’ (pour un album de Higelin, notamment) avant de former Paga Group, formation dans laquelle on retrouve… Bertrand Lajudie aux claviers.
Ce sont ces deux compères que l’on retrouve ici, et vous ne serez donc pas surpris si vous retrouverez dans ‘Ondes’ des envolées musicales aux saveurs ‘magma-éennes’ ou ‘zappa-iennes’, car le trio a jonglé dans la créativité débridée pour affiner des ambiances originales qui tranchent avec la musique indigeste des radios FM actuelles. On savoure avec délice les impulsions de la basse mordante de Bernard Paganotti, les nappes de claviers qui luttent avec la guitare du ‘special guest’ Anthony Jambon ou qui se font happer par la batterie d’Antoine Paganotti. Et parfois, on a même envie de crier à Antoine, pour l’avoir tant aimé avec ses kobaïens, ‘Christian, sors de ce corps !’.
Les 6 titres alignés sur cet opus sont proposés comme 6 puzzles dans lesquels chaque pièce de puzzle, très différente des autres, ne peut être placée sans prise en compte du jeu collectif autant que des pièces voisines, dédiées aux solistes. Interventions brèves, mais foudroyantes.
L’atmosphère du premier titre, ‘IC 1101’, vous fait entrer de suite dans cet univers dont vous ne ressortirez pas sans vouloir y replonger, pour un second voyage interstellaire. Et ressentir totalement ces ondes qui émanent de tous côtés. Ici, c’est Stéphane Chausse (clarinette basse, flûte) qui œuvre comme ‘spécial guest’, tout comme sur le quatrième titre, ‘Ikari’. Des instruments à vent qui font briller sur ces deux titres des étincelles que la basse et les claviers prennent en chasse, pour mieux les envelopper, les subtiliser à la réalité et les envoyer dans les cieux comme des ondes radio-actives.
‘Processionnaire’, à notre humble avis, est le titre majeur de cet opus. Qui vous happe dès l’intro, comme si vous pénétrez dans une maison hantée. Les cymbales d’Antoine vous poussent à avancer, à continuer à découvrir cette pièce musicale qui va se complexifier, se magnifier. Vous proposant d’autres pièces de ce puzzle-là. Avec cette fabuleuse basse 6 cordes électro-acoustique qui ne vous lâche plus, qui vous tient la main, qui vous ensorcelle. Le rythme, plus posé que sur ‘CI 1101’, vous invite à effacer les frontières et à accompagner le trio dans des contrées inexplorées. Et c’est la voix d’Antoine qui vous fait ressentir des mêmes frissons ‘zappa-iens’ avant que les instruments ne vous saisissent à nouveau, pour ne plus vous lâcher. Un grand, GRAND, morceau, qui fait de ce ‘Ondes’ un grand, GRAND, album.
Enregistrées initialement en trio et en direct, les six morceaux de ce puzzle musical ont été ensuite enrichis de divers éléments sonores (bois, programmation…) donnant une profondeur de champ à cette photo instantanée saisie en studio. Car tout comme la photo de couverture, superbe, cet opus est une photo-souvenir d’un grand, très grand moment de création musicale. Un album à cheval entre le jazz fusion, l’impro collective, le rock progressif à la sauce Magma et Zappa, un album inclassable et qui mérite incontestablement le sticker ‘indispensable’. Un monument!
Frankie Pfeiffer
Editor in chief – PARIS-MOVE
PARIS-MOVE, November 17th 2024
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