Jazz

Lorsqu’une petite merveille de Dot Time Records est à paraître en CD et numérique le 13 novembre puis le 8 janvier en vinyle… on se plie en 8 et on écoute en urgence cette jolie grappe de musiciens: “Monsieur” Chet Baker, avec Larry Correl (guitare), Buster Williams (basse) Tony Williams (batterie) et le vibraphoniste Wolfgang Lackerschmid. On retient son souffle et on se contente seulement de vous raconter l’histoire de cet enregistrement qui date de 1979…
Les coffres d’archives ont été rouverts par Dot Time Records après le succès mondial de Wolfgang Lackerschmid et Chet Baker’s Ballads For Two. JazzTimes a noté que “la sérénité imprègne Ballads For Two, une sérénité née d’une logique interne qui se sent à la fois bienvenue et étrangère”. Quintet Sessions 1979 offre une vision distincte au travers de laquelle nous entendons ces excellents musiciens fusionner. Avec deux pistes qui n’ont jamais été publiées et une présentation unique sur les versions CD/ Vinyle montrant l’étonnante musicalité et les prouesses de composition de chacun de ces cinq leaders avec leurs instruments.
C’était donc en 1979: Lackerschmid et Baker avaient voyagé en train et en ferry de la Norvège à l’Autriche pour se produire dans des festivals suite au succès de la sortie de Ballads for Two. Après une prestation en duo particulièrement mémorable, le guitariste Larry Coryell est revenu dans les coulisses, les larmes aux yeux. Ému par la performance, il a fait remarquer qu’il adorerait rejoindre le duo un certain temps. L’agent de Baker a tout de suite compris cela, suggérant que les trois artistes fassent un disque avec une section rythmique. Cette suggestion a été accueillie par une réponse bourru de Baker: “Nous n’avons pas besoin de section rythmique”. Lackerschmid a poursuivi, en remarquant, en plaisantant à demi-mot, que les seuls joueurs de la section rythmique en qui il aurait confiance pour le projet ont tous deux le nom de famille “Williams”. Quelques semaines plus tard, Lackerschmid a reçu un appel de l’agent de Chet Baker indiquant que “Buster et Tony sont ravis de jouer à cette session d’enregistrement”. C’est de cette façon que la collaboration entre ces cinq des musiciens est née.
Larry, Buster et Tony sont arrivés très excités à l’idée de cet enregistrement à Stuttgart, chacun avec ses propres compositions. “Quintet Sessions” commence à battre son plein avec “Mr. Biko”. Lackerschmid note que “[la mélodie] a créé une excellente atmosphère avec différentes couleurs, reliant les différentes saveurs musicales des musiciens d’une manière très élégante. Coryell, Baker, Lackerschmid et Buster Williams apportent tous quelque chose d’unique et de puissant à l’oeuvre lors de segments d’improvisation inspirés.”
“Balzwalz” de Lackerschmid fait vibrer l’ensemble.”Balzen” est l’expression allemande de la cour, qui pourrait expliquer la ligne de basse presque imposante de Buster Williams et le jeu bluesy passionné du guitariste Larry Coryell conduisant à un grognement instinctif de la section rythmique (à 1:40). La voix et l’acuité mélodique de Baker se manifestent sous une forme merveilleuse au fil des titres. Coryell a apporté “The Latin One”, un morceau de sa plume d’inspiration latine au tempo lumineux. Au cours de son solo, le guitariste a décidé de passer à un autre morceau qu’il avait écrit, “Rue Gregoire Du Tour”. Lackerschmid note “parce que l’ambiance de “The Latin One” avait si bien commencé, nous avons gardé ces deux minutes et nous nous sommes accrochés au solo de Larry avant qu’il ne s’arrête.”
Chet Baker brille sur “Rue Gregoire Du Tour”, livrant un solo virtuose aux intrigues mélodiques. L’album se termine par un blues énergique, “Toku Du”. Baker et Coryell démontrent leur vocabulaire bop et leur merveilleuse sensation temporelle sur les fondements rythmiques synaptiques primordiaux de Tony Williams. Buster Williams livre plusieurs refrains animés avant que Lackerschmid ne termine la mélodie avec une merveilleuse invention mélodique émouvante, accompagnée avec ardeur par Coryell.
Et c’est donc avec une certaine émotion, plongeant dans cette belle histoire du jazz contemporain, que les rédactions de Bayou Blue Radio et Paris-Move glissent cet album dans la catégorie des “indispensables”.

Thierry Docmac
Bayou Blue Radio – Paris-Move

PARIS-MOVE, October 31st 2020

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