WES MONTGOMERY & THE WYNTON KELLY TRIO

Smokin' In Seattle : Live At The Penthouse (Resonance / Bertus)
Jazz

Décédé en 1968 à 45 ans à peine, Wes MONTGOMERY n’en demeure pas moins l’une des figures les plus emblématiques de la jazz guitar – l’une des dix historiques, si l’on en croit les exégètes. Lesquels s’accordent à découper sa carrière en trois périodes: ses débuts sur Riverside, de 1958 à 1964, puis sa période Verve, de 64 à 66 (la plus riche, sur le plan qualitatif), et enfin celle chez A&M (quand il s’abandonna à des enregistrements plus commerciaux). Le label Resonance exhume deux demi-heures d’enregistrements inédits, issus de captations au fameux club Penthouse de Seattle. Initialement destinés à la diffusion radio, ces extraits de concerts distants d’une semaine (les 14 et 21 avril 66) présentent certes Wes MONTGOMERY en compagnie familière (n’avait-il pas déjà enregistré avec le Wynton Kelly Trio les fameux “Full House” et “Smokin’ At The Half Note”?), mais dans un line-up quelque peu inédit. Le contrebassiste Paul Chambers ayant entretemps fait sécession, ce fut au jeune Ron McClure qu’échut en l’occurence le rôle du croque-mort (pour mémoire, les jazzmen appelaient alors l’étui de contrebasse le “cercueil”). Faut-il rappeler qu’avec Kelly et le batteur Jimmy Cobb (également ici présent), Chambers anima la section rythmique de Miles Davis de 1959 à 1963? Les trois compères assurent seuls les deux plages introductives de chaque set, Wes (alors en pleine consécration) n’apparaissant que sur six des dix titres proposés. On aurait tort de minorer pour autant l’intérêt crucial de ces enregistrements. Tout d’abord, Kelly s’avère un fin pianiste, dont le jeu aussi délié que swing à souhait illumine des tempos moyens tels que “Not A Tear” (et ses digressions façon Brubeck), ou encore le “Sir John” de Blue Mitchell. Le son et la mastérisation s’avérant remarquables, ce sont bien sûr les interventions de MONTGOMERY qui constituent l’intérêt majeur de cette édition. Aussi volubile et inventif que sur la dizaine d’albums témoignant de cette période faste, son jeu décolle littéralement sur ses propres “Jingles”, “What’s New”, “West Coast Blues” et “Blues In F”. Un copieux livret de 40 pages accompagne ce CD (également édité en vinyle), avec interviews de Jimmy Cobb, Ron McClure et Kenny Barron, ainsi que les commentaires de Pat Metheny. Bref, comme disait l’autre: amis du jazz et de la guitare, bonsoir!
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Patrick Dallongeville
Paris-Move, Blues Magazine, Illico & BluesBoarder
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