WAYNE NICHOLSON & JOHN CAMPBELLJOHN – Elmore’s Blues

Brindstone Records
Blues
WAYNE NICHOLSON & JOHN CAMPBELLJOHN - Elmore's Blues

57 ans après sa disparition prématurée, l’aura d’Elmore James n’a cessé de croître parmi les générations de bluesmen qui lui ont succédé, depuis le Fleetwood Mac originel, les Allman Brothers et autres George Thorogood (pour le versant blanc de ses émules), jusqu’aux regrettés Homesick James, Hound Dog Taylor et JB Hutto au cœur des clubs de Chicago (où sévissent encore les furieux Lil’ Ed & The Blues Imperials, sans doute ses plus dignes héritiers actuels). Le guitariste John Campbelljohn (de Cape Breton, avec quatorze albums à son actif, sans compter ses nombreuses collaborations avec d’autres artistes) et le chanteur Wayne Nicholson (de Halifax, huit albums au compteur, et leader de son propre band, les East Enders) sont deux vétérans confirmés de la scène blues est-canadienne. Ces deux pointures joignent leurs forces pour ce nouveau tribute au pionnier de la slide électrique saturée, et le challenge s’avère de taille, car ils ne sont assurément pas les premiers à s’y frotter. Avec de tels monuments, le défi est double: à trop s’éloigner du son et de l’esprit de l’original, on risque d’en dénaturer l’esprit, mais à n’en restituer qu’une servile copie, on n’aboutit le plus souvent qu’à un réchauffé stérile. Louvoyant habilement entre ces deux écueils, nos comparses parviennent à ranimer la flamme des douze originaux qu’ils reprennent ici, y ajoutant même deux compositions de leurs plumes croisées. Attribué malencontreusement à Elmore James et Joe Bihari, le “Standing At The Crossroads” de Robert Johnson prend ainsi des accents à la Allman Brothers (le timbre voilé de Nicholson y évoquant celui de Gregg, tandis que la slide qu’y imprime Campbelljohn rappelle celle du frangin Duane). Cette similitude se prolonge sur l’un des deux originaux co-signés par les deux principaux protagonistes de cet album, la ballade bluesy “If I Was Blue” (avec l’orgue churchy de Kim Dunn), ainsi que leurs versions de “Knocking At Your Door” et “Sunnyland”. Autant dire que nos amis ne se cantonnent (ach, cheu te mots!) pas à une régurgitation orthodoxe du répertoire du slide-wizard de Canton, Mississippi, comme en atteste leur savoureuse relecture reggae du fameux “I Believe” (l’une des multiples déclinaisons par James de son propre hit, “Dust My Broom”, lui-même emprunté à Robert Johnson). Au registre des crédits erronés, leur version de “Rollin’ And Tumblin'” (de Willie Newburn) et celle du “It Hurts Me Too” de Hudson Whittaker (alias Tampa Red) ne sont rachetées que par l’originalité de leur interprétation (même si l’on demeure interloqué de telles bévues quant à la paternité de standards si éculés). Les puristes trouveront néanmoins leur compte à l’écoute des transcriptions fidèles de shuffles classiques comme “Happy Home”, du mambo initial de “No Love In My Heart”, ou encore du swing boogie éperdu de “I May Be Wrong”, “Shake Your Money Maker” (avec le piano virevoltant de Barry Cooke, augmenté de gouleyants soli de basse et de batterie) et “Strange Kinda Feeling”, voire du mid-tempo “Sinful Woman” (dans un registre toutefois plus proche de B.B. King). Une franche réussite, manifestement pétrie d’une joie communicative.

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, August 26th 2020

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