UNITED STATE OF MIND

Manhaton Records
Funk-Blues
UNITED STATE OF MIND

Sur le papier déjà, l’idée interpelle, sans que l’on puisse déterminer pourtant s’il s’agit ou non d’une bonne idée. En effet, si l’on peut déceler sans peine ce qui relie le vétéran du funky blues anglais Robin Trower à Livingstone Brown (ce dernier ayant en effet co-produit jadis son “20th Century Blues”, sur lequel il tenait également déjà la basse), leur association avec le dénommé Maxi Priest (de son vrai nom Max Elliott) sous le nom de UNITED STATE OF MIND revêt de prime abord un aspect incongru. Cousin du fameux Jacob Miller, ce natif de Lewisham aligne en plus de trente ans de carrière (et une dizaine d’albums sous son nom) une tripotée de hits dans le registre reggae mainstream, ainsi que maints duos fructueux dans les charts (depuis Roberta Flack jusqu’à UB40, en passant par Shaggy, Beres Hammond et Buju Banton). Bref, issus de sphères (et de générations) radicalement différentes, ces musiciens n’avaient à priori que peu de chances d’entamer la moindre collaboration, et c’est pourquoi l’on aborde cet album avec la circonspection de circonstance. Doyen de ce trio, Trower (75 balais au compteur) semble de fait celui qui peut avoir le plus à perdre dans cette aventure. En un demi-siècle de carrière (et 25 albums), cet émule assumé de Jimi Hendrix semble ne plus rien avoir à prouver, quand tant de ses contemporains ont déserté les planches pour celles des pompes funèbres, ou bifurqué vers la maison de retraite des guitar-heroes arthritiques. Avec son funk mollasson enrobé d’arrangements synthétiques, la plage titulaire d’introduction semble confirmer nos craintes, en dépit des licks éparses qu’y disséminent les cordes hululantes de ce bon vieux Robin. Wah-wah au pied, “Are We Just People” prolonge le malaise, un peu comme la rencontre inopinée du Marvin Gaye de “What’s Going On” avec le gaucher vaudou, sous la houlette d’un Isaac Hayes à la main lourde. Ce n’est certes ni totalement mauvais ni indigeste, mais il faut indéniablement à l’oreille le temps de s’y faire. Le solo de Trower sur la coda y déboule avec une telle langueur vicieuse que l’effet produit évoque un déroutant sucré-salé. Le semi-grotesque funk “On Fire Like Zsa Zsa” semble parodier le pourtant sacro-saint “Victims Of The Fury”, et l’on se demande quelles abominations peut encore recéler ce disque, quand un répit providentiel se matérialise enfin au fil du bluesy “Walking Wounded”. L’esprit du splendide “Bridge Of Sighs” surplombe en effet cette plage, et le timbre soulful de Maxi Priest y réalise enfin l’équilibre avec le jeu sorcier d’un Trower au zénith de son pouvoir. On y retrouve ce qui distinguait autrefois ce nabot au nez brisé de la horde de virtuoses interchangeables et convenus dont il s’est toujours démarqué. Cette veine se perpétue avec bonheur sur le non moins émouvant “Sunrise Revolution” (dont le solo brode autour du “Summertime” de Gershwin, tandis que des cuivres tempérés lui donnent la réplique). L’anodin mid-tempo “Hands To The Sky” ne suscite hélas pas la même adhésion, mais le lent “Bring It All Back To You” ravive à nouveau les souvenirs de “Caravan To Midnight”, piste de décollage en douceur d’un solo aussi délicat et aérien que ceux dont Jimi gratifiait “Little Wing” et “The Wind Cries Mary”. Décidément, ce Robin là ne parvient jamais à se départir de la grâce qui distingue le poète du tâcheron. En dépit de ses vocaux mielleux, “Good Day” témoigne encore furtivement (via ces éternelles six cordes enfiévrées) de ce qui subsistait du funk originel dans “Electric Ladyland”, au fil de titres tels que l’enlevé “Gipsy Eyes”. La ballade finale “Where Our Love Came From” conjugue in extremis la sensiblerie du “Nights In White Satin” des Moody Blues (ces violons en escadrille) avec la perversité lascive du Prince de “Purple Rain”. À l’arrivée, un album certes à part dans la discographie de l’angélique diablotin Trower, mais finalement moins déplaisant que le naufrage qu’il semblait annoncer. Rien ne va plus, faîtes vos jeux…

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, February 2nd 2021

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Au siècle dernier, on avait vite fait de parler de “Super Groupe” lorsqu’un album était interprété par des musiciens venant de différents horizons et appartenant à différentes formations (Blind Faith ou Cream, par exemple). Dans le cas présent, il est vrai que c’est le cas pour le noyau central des musiciens. Jugeons plutôt: Robin Trower, guitare (8 albums avec Procol Harum, 33 albums avec le Robin Trower Band, 8 compilations, 3 albums avec Bryan Ferry, 5 avec Jack Bruce), Maxi Priest, chant (11 albums et 3 compilations), Livingstone Brown, basse et claviers, mais aussi ingénieur du son et producteur (et on ne compte plus les albums produits par ce monsieur). Les 9 titres ont été composés par les trois artistes anglais. Ils sont accompagnés par Chris Taggart à la batterie, Fergus Gerrand aux percussions, Angus Moncrieff à la trompette, James Arben au saxophone, Ed Rieband au trombone, Steve Morris au violon, Adrian Smith à l’alto, Chris Worsey au violoncelle et Eileen Hunter à la flûte. Franchement, il s’agit de l’enregistrement d’un album de soul & funk-blues music plutôt réussi, la voix de Maxi Priest s’épanouissant dans ce registre et Robin Trower trouvant toujours prétexte à égrener avec talent ses notes de guitare. Et même plutôt de manière parcimonieuse sur ces titres-là! La juxtaposition de deux ensembles de musiciens, orchestre de cuivre et orchestre de chambre, brouille quelque peu les pistes. S’agit-il bien de soul, funk, blues, ou bien de musique à consonnance plutôt “classique”? On peut se poser la question… Cet album arrive dans un immense contexte de crise inégalée depuis des lustres et il signifie beaucoup! Il en prend d’autant plus de valeur que l’objectif de cette smooth soul est justement d’apporter de la quiétude au plus grand nombre et d’apaiser les esprits! L’objectif sera ssans nul doute atteint avec ces mélodies interprétées bien harmonieusement.

Dominique Boulay
Paris-Move & Blues Magazine (Fr)

PARIS-MOVE, February 9th 2021

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Note du rédacteur en chef: Cette formation n’a aucun lien historique avec le groupe The United States Of Mind, formation établie en 1999 à Brighton (UK) par le chanteur guitariste Rocco Antonelli. Le line up original tel que présenté sur leur premier 7″ single (True To Your School b/w Never Grow Up / Ode to Walt) mentionnait “2 kids from Boston/ 2 kids from Brighton. Boston being Boston, Massachusetts USA and Brighton being Brighton, England.”

UNITED STATE OF MIND vous est présenté sur le site de nos amis All About The Rock, ICI

UNITED STATE OF MIND v2 Snapshot Sep 8, 2020 at 5:13:05 PM:

UNITED STATE OF MIND (official video):
https://www.youtube.com/watch?v=SK05mIPMsF0