Blues, Chanson française |
“Il est des gens qui ont le triste privilège d’être insolents sans rien dire, leur silence parle et il offense, leur attitude injurie, leur regard seul est une insulte. Il en est d’autres, au contraire, dont toute la personne transpire la bonhomie et la cordialité, à peine les a-t-on abordés qu’on les aime, leur regard vous caresse, leur sourire est une aimable séduction. Ils n’ont pas encore dit un mot que vous accourez tout de suite au-devant d’eux par votre sympathie, vous en faîtes vos amis sans les connaître, et quand ils s’éloignent de vous, leur souvenir vous reste comme un parfum dans le coeur.”
Alfred Auguste Pilavoine – “Pensées, mélanges et poésies” (1845)
Il est des gens, il est des artistes dont je suis fier de faire partie de leurs amis, ceux avec qui les affinités s’affirment en toute réciprocité, empruntes de sincérité. Comme c’est le cas avec Tyo Bazz, celui que j’appelle avec une certaine affection, mon “p’tit père Tyo”, et ce depuis ma première rencontre avec lui, depuis bientôt une décennie.
Et ce n’est pas mon boss et ami Frankie, manager de Paris-Move, qui me contredira, loin de là. Car lui aussi éprouve amitié, respect et affection pour ce personnage hors du commun qu’est notre “p’tit père Tyo”.
Tyo Bazz, poète et troubadour des temps modernes, disciple d’un François Villon (correctement orthographié avec un V, ne nous égarons pas avec la lettre F), signe un nouvel et sixième album de compositions intitulé “Regards” et sous-titré “…ou vues avec le cœur!”.
En toute quiétude, fidèle à ses habitudes, Tyo, en ‘One Man Band’ accompli, a écrit textes et musiques de cet opus façonné et enregistré chez lui, à la maison, sans prétention mais avec toujours une délicate et infinie attention.
Dans les controverses de son univers, au gré de sa discographie, sociologue et humaniste, l’artiste conjugue le présent à l’imparfait, reflet d’un monde surfait, pique quelques coups de gueule légitimes ou dresse quelques portraits de personnalités rarissimes.
Cette fois ci, avec ses “Regards … ou vues avec le coeur”, Tyo Bazz se fait le témoin anonyme de toutes ces personnes sans patronymes qui errent dans l’actualité de notre société. Dans ce road movie qu’est la partition de la vie, parfois la note est blanche, parfois la note est noire, dans l’insouciance ou l’illusoire, Tyo Bazz trace en chansons des histoires.
Ce ne sont pas les choses qui nous touchent, mais le regard qu’on leur porte, ce ne sont pas les choses que l’on voit, mais le sens qu’on leur trouve. Le premier titre “Rejoins moi dans la rue” est une invitation, chaleureuse. La voix émeut, comme un appel, car les gens oublient parfois leurs espoirs perdus. Il y a des jeux sournois qui nous blessent et nous tuent, la douleur nous répond qu’on est toujours debout, ils sont loin les chemins qui ramènent chez nous.
Très poignante et chargée d’émotion est cette deuxième chanson, ‘Venus de loin’, comme une main tendue vers tous ces migrants, venus de loin pour nulle part, venus de loin comme par hasard.
Le titre “Je bois, me dit-il” traite d’un sujet grave, un fléau, l’alcoolisme, mais avec ses mots et sa sensibilité, Tyo Bazz nous touche, et nous avons envie d’aller vers cet homme qui boit, pour l’aider et le comprendre. “Quel est le fond de son histoire, la vie l’a fauché en chemin. La vie n’est plus ce qu’elle était, les couleurs semblent un peu fanées, il n’y a plus de soleil en été. Je bois me dit-il, je bois et tant pis.”
Ponctué d’humour, le titre ‘Juste une idée’ ironise sur un incident de parcours, ces matins où vous n’avez plus envie de rien, dans votre auto lorsque vous partez au boulot, sans envie de vouloir y aller. Les aléas et les surprises s’enchainent… et je vous laisse deviner la suite!
Ce titre, ‘L’artiste’, dévoile une face cachée de la solitude: “Il a joué en silence, les doigts sans toucher les cordes. Il est juste venu s’asseoir et a caché son visage sur la cadence des silences que l’on s’accorde.”
Je me passerai de mots sur le titre ‘Gilet jaune’, brûlant d’actualité. Amis lecteurs de Paris-Move, jugez par vous mêmes, car voici en cadeau la vidéo de ce titre ‘Gilet jaune’. Pour voir la vidéo cliquez ICI
Puis ce titre ‘Alors que faire’ est une affirmation ou peut-être une question, car vous n’avez que l’embarras du choix, “Alors que faire de nos dix doigts pour remettre le monde à l’endroit. Si le droit vient d’en haut, le combat vient d’en bas.”
Cette chanson ‘Et donc je marche’ est un constat sur la vie qui passe au fils des décennies, lorsque vous regardez en arrière et que vous voyez de moins en moins. Vous vous dites, en positivant, donc je marche car le parcours n’est pas fini.
Le titre ‘Tout ceci n’est que du blues’ est à conjuguer au sens propre comme au figuré. J’en fais d’ailleurs personnellement un clin d’oeil amical et humoristique au femmes de musiciens que je connais: “Je ne fais rien de mes dix doigts, je n’ai pas mangé de deux jours, j’ai les neurones aux abois, mon portefeuille est plein de trous. Et n’en déplaise à nos épouses, ceci n’est que du blues.”
‘Solidaires’ est un titre qui en dit long et qui est toujours d’actualité: “Des cadeaux pour les plus riches et des larmes pour les pauvres. Un discours de rhétorique pour cacher le pot aux roses……Moins de dupes, plus de rebelles, moi je suis fier, la France est belle.”
Comme le chante si bien Tyo Bazz, conjuguant l’essentiel à tous les âges de la vie sur ce titre, ‘Si j’attends tout, je ne veux rien’, tout est dans les petits riens, “je ne veux pas être riche, plutôt rester au coeur des miens. Je suis riche de ma famille, je suis riche de mes amis.”
Dernier regard porté, dernier titre de l’album, ‘Idée de réel’ est à méditer: “Demain sera beau si on s’y prend tôt, demain sera laid si on s’en fait l’idée. Il n’y a de présent que de rêver bien avant.”
Musicalement, je pense que cet album de Tyo Bazz est le plus abouti. Sur tous les titres, il excelle de son jeu de guitare blues-roots, fin et racé, avec quelques riffs savamment dosés. Jubilation, mon p’tit père Tyo, une nouvelle fois tu m’as collé quelques sacrés frissons. Tout comme tu sais si bien le faire sur une majorité des titres avec tes harmonicas, parfois ils semblent rire, parfois ils semblent pleurer au rythme de ton souffle, de tes battements de coeur, contrastant entre l’ombre et la lumière de tes chansons. Chez toi, tout est ‘fait maison’, sans aucune contrefaçon, jusqu’aux ‘Stomp-boxes’, percussions aux pieds de ta fabrication. Tu te dis être un lointain cousin du “Bobdylan”, ou un enfant illégitime de Robert Johnson et de Georges Brassens. Sans parti pris, même si certains en doutent, peu importe, je m’en moque, car il y a des jours où Cupidon s’en fout, et quand on aime on ne compte pas. J’ai simplement envie de te dire, ami Tyo, que tu es unique. Ta littérature et ta poésie, noblesse de la chanson française, devraient figurer dans tous les manuels scolaires à partir de la sixième dans les collèges et lycées l’hexagone.
A l’écoute de tes regards, jusqu’à la lie, de tes ‘tyobazzeries’ je m’enivre.
Lecteurs de Paris-Move, cet album ‘Regards’, teinté de blues, de folk, et de bien d’autres émotions musicales, avec de sublimes textes écrits dans la langue de Molière, est pour tout public et toutes générations confondues.
N’attendez pas une seconde de plus et rendez- vous sur les sites de l’artiste, ici:
http://tyobazz.blogspirit.com/
https://jmsauret.wixsite.com/tyobazz
Vous le découvrirez au gré de sa discographie, du parcours de sa vie, il vous fera vivre ses émotions et vous les partagerez. N’hésitez pas à commander cet album ‘Regards’, bien sûr, mais aussi tous les autres, si le coeur vous en dit et avant que certains soient définitivement épuisés, pour que l’ironie du destin les classent dans ce que les inconditionnels appellent des “collector”.
Sachez également que pouvez également inviter Tyo Bazz chez vous, oui, pour un “concert privé à la maison”, lors d’une soirée ou d’une fête entre amis. Il se fera un plaisir de venir avec guitare et harmonicas, et après avoir fait sa connaissance, tout comme moi, je pense, mon p’tit père Tyo’, vous l’appellerez.
Alain AJ-Blues
Rédacteur en chef adjoint – Paris-Move