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Née à Alteridgeville et élevée à Mamelodi (un des townships de Pretoria), la chanteuse Sud-Africaine Tutu Puoane réside depuis une vingtaine d’années à Anvers, après avoir poursuivi ses études musicales au Conservatoire Royal de La Haye (dans la foulée d’un cursus entamé dans son pays à l’université du Cap). Ayant successivement enregistré avec le Brussels Jazz Orchestra et le Royal Flemish Philarmonic (sous la direction de Bert Joris), elle propose à présent le second volet d’un diptyque où elle met en musique les poèmes de son compatriote Leo Mashile. Accompagnée du Metropole Orkest néerlandais (une cinquantaine de musiciens, sous la direction de Jacomo Bairos), elle livre une prestation éblouissante, au fil de huit plages où alternent féérie flûtée sur tapis de cordes (“Dawn”, “Found My Self In A Poem”), jazz-funk cuivré évoquant les riches heures de Chicago Transit Authority (“Elasticiy”, avec le slammer Shariff Simons) et la soul élégiaque de Roberta Flack et Nina Simone (“Open Your Eyes”, “Pretty Black Girls”, “When We Love”). En co-signant les musiques avec son producteur, Ewout Pierreux, Tutu Puoane a conçu l’écrin idéal pour sublimer des textes remarquablement évocateurs et lourds de sens. Sur le touchant “Song For Kedi”, elle s’approche même de l’expressivité d’une Helen Merrill, tandis que les cuivres de l’époustouflant “Stories” (alternant tornade et brise) rappellent ces fauves domestiqués que furent les orchestres de Ray Charles et Sinatra, et que Tutu n’y rechigne pas à laisser sa voix parler le blues. Entre l’émotion communicative d’une Meredith d’Ambrosio, l’autorité modulée de Dee Dee Bridgewater et le lyrisme fragile mais déterminé de Joni Mitchell – à qui elle rendit hommage sur un plein album en 2016 – auxquels elle associe le tempérament de sa compatriote Myriam Makeba, Miss Puoane ne laisse jamais la technique (qu’elle maîtrise pourtant au plus haut point) prendre le pas sur le feeling, et le big band qui la soutient lui sert des arrangements concoctés par Bert Joris avec la sophistication subtile de l’équipage d’un paquebot de luxe. Une authentique splendeur, suscitant le désir irrépressible d’en écouter sans tarder le premier volume (bardé de prix internationaux l’an dernier).
Patrick DALLONGEVILLE
Paris-Move, Illico & BluesBoarder, Blues & Co
PARIS-MOVE, August 31st 2025
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