Il n’y avait qu’elles, pourrait-on dire, pour pouvoir tenter ce pari fou-fou-fou de faire cohabiter sur un même album J.S. Bach, Jobim, les Beatles, Chico Buarque et bien d’autres encore. Car pour faire cohabiter du classique, même revisité par Eva et Gérard Gambus, et les Beatles, fallait du culot, ou un talent fou. Les trois sœurs de Trio Esperança ayant les deux, le talent et le culot, elles nous offrent ici douze chansons fabuleuses et absolument délicieuses.

 

Comme sur chacun de leurs opus, les voix sont magiques, ensorceleuses, divines. Rien, aucun style ni aucun genre ne semble leur poser le moindre souci. Les voix sont tendres et chaudes, intenses et caressantes, subtiles et légères comme la brise, emportées vers les étoiles par des arrangements particulièrement ciselés où un piano voisine avec un accordéon, où des cordes s’effacent devant une guitare. C’est léger, aérien et cela vous emporte vers des sommets de tendresse où la musique est plus douce que le coton et la soie.

 

En écoutant le premier titre, une adaptation de l’Aria de Bach (3^ème suite), on se dit qu’il est bien loin le temps où les petites Corrêa jouaient aux chanteuses en faisant d’une caisse une scène et d'un manche à balai leur micro, au fond du jardin familial, à Rio de Janeiro.

 

C’est cette chaleur intuitive brésilienne ressentie dès leur plus jeune âge qui transforme les deux titres des Beatles repris ici, ‘Penny Lane’ et Black Bird’. Elle les transcende, les pare de couleurs sonores multicolores, les intègre dans un univers musical brésilien qui n’attendait que ces titres pour offrir le plus beau des hommages au duo Lennon-McCartney.

 

Moins risquées que Bach et les Beatles, leurs interprétations de Antonio Carlos Jobim, Chico Buarque et Vinicius de Moraes n’en sont pas pour autant sublimes, les trois sœurs apportant dans chaque parole, chaque note, leur émotion propre. Cela vous donne des chansons qui touchent parfois au divin, comme ce ‘Cantiga (Caico)’ signé Villa Lobos, Milton Nascimento / Teca Calazans qui vous fera dresser les poils. Un énorme moment d’émotion que je vous conseille de prolonger par ‘Uma Gota Do Mar’ et ses percussions qui vous rendront le sourire pour des années, car avec le Trio Esperança et cet album vous avez du plaisir, de la bonne humeur et de l’amour pour des années et des années.

 

Frankie Bluesy Pfeiffer