TRÉ BURT – Caught It From The Rye

Oh Boy / Thirty Tigers
Folk
TRÉ BURT - Caught It From The Rye

On a beau tenter d’en réfréner le constat, sur des titres tels que “Undead God Of War”, “Franklin’s Tunnel” ou “Only Sorrow Remains”, la similitude avec le jeune Bob Dylan s’avère trop flagrante pour être niée. Ce guitar strumming, ces interjections d’un harmonica strident, et par dessus tout, ce timbre nasal aux inflexions emphatiques: tout hurle au clônage!.. Cependant, l’art de Tré Burt paraît si sincère et naturel que l’on ne peut qu’y souscrire. Loin de ne s’avérer qu’un vulgaire plagiaire, ce gars a simplement puisé aux meilleures sources que l’Amérique ait produites en matière de singer-songwriters, de Woody Guthrie à John Prine. Ce fut d’ailleurs ce dernier qui prit, avant de nous quitter, l’initiative de le signer sur son propre label. On fait pire, en guise de parrainage et d’adoubement. Originaire de Sacramento, Tré Burt délaissa les amphis de l’université de San Francisco pour se consacrer plutôt au busking, cette pratique de la manche sur le trottoir qui rapporte davantage quand on s’y munit d’une guitare en bois. Lorsque, comme dans un conte de fées, un illuminé et généreux donateur déposa nonchalamment 1.000$ dans l’étui de son instrument, Tré abandonna son carrefour urbain pour s’embarquer dans sa première tournée improvisée. Sa voiture ayant inopinément rendu l’âme à Portland, il s’y produisit dans des boutiques, librairies et pizzérias, avant d’y exercer divers métiers cinq ans durant. Ce ne fut qu’à l’occasion d’un séjour confiné en Australie qu’il se prit à composer avec assiduité. À son retour aux States, il publia un premier EP, puis cet album (initialement autoproduit en 2018), qui suscita l’intérêt de Jody Whelan, directeur exécutif d’Oh Boy Records. “What Good”, “Real You”, “Moth’s Crossing”, “Get It By Now Blues” et la plage titulaire évoquent pour leur part la facture acerbe et ciselée du regretté Townes Van Zandt, même si le “Last Hurrah” qui ferme le ban renvoie, avec une évidence de plus, au barde de Duluth. Gageons que le talent d’écriture et l’éloquence de Tré Burt lui vaillent bientôt la même audience que celle d’un Sam Lewis. À suivre, et de près…

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, June 6th 2020