TONY McLOUGHLIN – True Native

Fuego
Americana

Dès le “Blood On Blood” introductif, les références sautent aux tympans: depuis Neil Young circa Crazy Horse jusqu’à Tom Petty et dans une moindre mesure, Dylan via Springsteen, Tony McLoughlin a manifestement potassé ses classiques. Mais à nos pauvres oreilles européennes, une similitude plus flagrante encore apparaît avec éclat: le regretté Calvin Russell. Mêmes thématiques (la légion des laissés pour compte), même timbre vocal nasal et restreint, même capacité à asséner ses quatre vérités à la face veule d’un monde ignorant sciemment les perdants qu’il génère, et aussi même background sudiste. Cette impression s’accentue avec “Flying Bird”, où les chœurs de Jean Anne Chapman Tarleton font merveille (d’autant qu’il s’agit d’une seule et même personne). Entre country, blues et folk, ce bon Calvin n’avait jamais vraiment choisi. Tony McLoughlin en fait autant pour “The Colour Of Spring”: american Music, comme le proclamaient les Blasters des frangins Alvin. Avec un bon tuner, toutes les radios sont à portée, et c’est ainsi (davantage que par les flingues) que se fédère avant tout une véritable culture nationale. La plage titulaire et la cover du “If You Were A Bluebird” de Butch Hancock lorgnent vers le boss de “The River”, avec leur lazy tex-mex groove: le majeur le plus subtilement dressé à la face du Le Pen squattant ces temps-ci une Maison que l’on n’avait jamais trouvée si blême, depuis ce trépané fourbe de Nixon. Dans un monde cohérent, Status Quo aurait porté aux cîmes “Here Comes The Wind” (slide boogie gaillard, avec chœurs féminins affriolants), mais pas dupe pour deux cents, Tony McLoughlin préfère emprunter la piste de Tulsa pour un “Treeline” dont les Eagles se seraient contentés pour leur ordinaire. “Below Zero” confirme s’il en était besoin la parenté avec l’auteur de “A Crack In Time”. Riff buté, slide menaçante, vocals nimbés de delay et lyrics sans appel: ne manque plus que le galurin cabossé pour compléter le tableau! Sur un mode proche du “Blood On The Tracks” de Dylan, l’acoustique et dépouillé “Mercury” parachève cet album enregistré entre Tipperary et Nashville: un classique inattendu!

Patrick Dallongeville
Paris-MoveBlues Magazine, Illico & BluesBoarder

PARIS-MOVE, November 3rd 2019